Youna Dufournet, le coup de Maître !

Première internationale issue du club d’Avoine-Beaumont Gymnastique, médaillée mondiale et européenne, olympienne en 2012 à Londres, vainqueur des barres asymétriques aux Internationaux de France de Bercy, Youna Dufournet a été désignée pour ouvrir la 2ème journée des finales par agrès.

On aurait pu pronostiquer, en ce jour de finale olympique aux barres asymétriques qu’Emilie Le Pennec ouvrirait la compétition. Seule et unique médaillée d’or de la gymnastique française, le 22 août 2004 elle aurait été légitime. Finalement c’est le choix du cœur qui a primé.

Le contexte de cette finale était connu de tous, l’algérienne d’Avoine-Beaumont Gymnastique, Kaylia Nemour, était la très grande favorite de cette compétition. Et c’est un vrai choix du cœur qui a guidé ceux qui ont orchestré cette ouverture.

Le choix s’est porté sur Youna Dufournet, olympienne, médaillée européenne et mondiale, mais surtout native du Véron, et élève durant de nombreuses années de Gina et Marc Chirilcenco. Un clin d’œil, un coup de cœur, une belle Histoire.

L’Histoire est belle
Double surprise pour Youna Dufournet dans cette mise à l’honneur lors des Jeux Olympiques.

Une première fois lorsque le Comité Olympique l’a appelée il y a une dizaine de jours. « J’étais très fière qu’ils aient fait appel à moi, parce que cela fait quelques années que j’ai arrêté la gymnatsique, je n’ai pas eu de médaille olympique, et je trouvais que ma légitimité était moindre face à d’autres gymnastes. J’étais donc très très honorée. Je me suis dit que c’était super chouette, que c’était une très belle opportunité », explique-t-elle.

Une seconde fois lorsque sa maman lui a appris que ce serait le jour de la finale que tout le Véron attend : les barres asymétriques. « Je n’avais pas du tout réalisé que cela tomberait le jour de la finale des barres, car je croyais qu’il n’y avait que deux jours, saut barres le samedi et poutre sol le dimanche. Et là j’ai vraiment trouvé cela extraordinaire, comme un signe du destin. »

On a envie de voir cela comme un beau message, comme une envie de croire que le soutien du monde du sport pour Kaylia Nemour est entier, et universel, au-delà de la gymnastique. C’est un très beau message, et une prise de position subliminale qui sont envoyés.

Une sensation de fierté jusque dans le public
Lorsqu’elle se trouve dans le SAS d’attente, Youna se replonge quelques années en arrière alors qu’elle participait aux Internationaux de France. A ce moment-là, à la fois une « petite montée d’adrénaline, petite pression », confie-t-elle avant de compléter : « mais aussi j’étais très impressionnée d’être à Bercy au cœur de la salle avec tout ce public venu aussi pour supporter Samir. J’avais l’envie de bien faire, d’être dans le rythme des Trois Coups. Je ressentais beaucoup de fierté pour tout ce que ça représente. » L’honneur qui lui est fait, elle en a conscience, c’est un moment unique dont il faut profiter et se nourrir. Une récompense pour une carrière de gymnaste exceptionnelle, mais aussi un engagement d’une vie.

Après les trois coups, Youna rejoint la tribune d’honneur en compagnie des toujours présents Bart Conner et Nadia Comaneci, mais aussi Yann Cucherat, le futur directeur de l’ANS (Agence Nationale du Sport), au rendez-vous de ce moment historique, au rendez-vous pour Samir Ait Saïd également.

« C’est unique d’être si bien entourée pour une finale olympique. Être présente pour la finale de l’agrès qui m’a fait  le plus vibrer en tant que gymnaste, celui qui me plait le plus à regarder. Et puis entendre la ferveur du public , quand Samir est passé. ça m’a fait vibrer, il a fait un superbe mouvement, il a tout donné pour cette médaille, c’aurait été mérité à mon avis. »

Fluidité et souffle coupé
Et puis, Kaylia se présente. Youna, même si elle connait le mouvement par cœur ressent la pression. « J’ai éprouvé beaucoup de stress, plus que si je faisais moi-même la compétition, on n’est maître de rien, on sait qu’elle peut le faire ! La chinoise juste avant hausse son niveau, elle met une pression intense, incroyable, on sait tous que Kaylia n’a pas droit à l’erreur. »

Peut être encore plus que d’habitude, Kaylia vole, Kaylia est précise, Kaylia est impériale. Encore faut il attendre la note. « Quand la note est tombée, que j’ai vu qu’elle était 1ère, j’ai cru que j’allais perdre mes jambes, m’évanouir, les larmes sont montées. J’étais tellement heureuse pour elle, pour eux, je sais le combat qu’ils ont tous menés, je sais à quel point c’est important. Et c’est la plus belle des récompenses pour un athlète et ses entraîneurs qui travaillent dur toute leur vie, pour l’entourage qui accompagne aussi. Et évidemment quand la dernière gymnaste est passée, que j’étais sûre à 100% que Kaylia gagnait j’ai explosé de joie» déclare celle qui reste le modèle de la désormais championne olympique.

Youna revient sur la performance exceptionnelle, unique de Kaylia. Elle ne manque pas d’éloge sur la touche Nemour. « son mouvement est tellement aérien, fluide, c’est à couper le souffle. La façon dont Kaylia fait des barres, la façon dont elle sent les barres, est singulier. Elle est si légère, elle rend les autres mouvements presque fades. Une spécialiste comme Nadia Comaneci qui l’a vu de ses propres yeux ne se trompe pas ! Et je suis comblée car Kaylia est une gymnaste que j’apprécie, Gina et Marc des entraîneurs que j’adore mais en plus c’est beau de voir le classement juste. La chinoise a un mouvement beau et difficile, mais il manque ce petit truc en plus, dont seule Kaylia est capable. »

Une émulation territoriale ambitieuse et fidèle
Si pour cette finale aux barres, Youna était invitée d’honneur des Jeux Olympiques, elle a vécu le Concours Général, chez elle à Avoine, auprès des siens, réunis dans une salle mise à disposition par la commune d’Avoine. Une ambiance exceptionnelle pour les 300 chanceux.

Les communes d’Avoine et de Beaumont en Véron, la communauté de communes ont toujours été au soutien du club au soutien des entraîneurs et des gymnastes. Aujourd’hui l’engouement est réel et récompensé. « C’est une fierté pour tous ceux qui ont été fidèle et engagé de voir les couleurs du Véron hissées si haut jusqu’au titre olympique. On parle d’Avoine Beaumont dans tous les journaux et pour une vraie performance historique. Je pense que dans le cœur des gens qui ont toujours été présents, qui étaient réunis devant l’écran, Kaylia représente avant tout Avoine Beaumont, ce petit village de France qui acquiert une notoriété immense ».

Si le club du Véron dispose de conditions exceptionnelles, il faut associer au travail technique, l’engagement politique. « On a la chance d’avoir les moyens financiers grâce à l’activité de la centrale, et à la politique de Terre de Champions menée par les collectivités. ».

Il faut aussi associer l’engagement des structures scolaires. « Les professeurs du collège et du lycée étaient présents, on dispose d’un accompagnement investi autour du double projet de l’athlète, c’est aussi de cela dont a besoin le sportif. Il a besoin d’être entouré de ses proches, de se savoir dans un concon, et de savoir qu’il peut aussi travailler pour son avenir. »

L’engouement que le titre olympique de Kaylia va accentuer doit permettre de fédérer encore plus, d’asseoir cette politique de soutien des collectivités et d’échanger et comprendre la démarche locale. Youna estime que ces moments de liesse autour de Kaylia, dans cette fan zone locale doit permettre d’ouvrir la porte à d’autres sports pour investir plus pour les athlètes et leurs entraîneurs.

A n’en pas douter cette victoire est aussi la victoire d’une politique de soutien incroyable, d’une équipe soudée autour d’un projet. Et les élus ont déjà donné rendez-vous en septembre pour fêter cette performance à la hauteur de ce qu’elle doit. Ce sera l’occasion pour Youna de retrouver sa famille gymnique car même si elle a pu croiser Marc et Kaylia avant le passage en zone mixte, elle attend que la pression soit retombée. « Je n’ai pas vu Gina. Mais ils savent tous exactement ce que je pense. C’était leur moment à eux, et j’aurais le temps de les féliciter une nouvelle fois lorsque l’effervescence sera passée ».

Un moment extraordinaire
Avant de repartir vers des Jeux Olympiques devant son écran, Youna nous confie que même si elle était « sceptique comme beaucoup de français au début des Jeux Olympiques », elle se rend compte que c’est réellement incroyable. Comme tous ceux qui sont présents dans la capitale, elle est impressionnée de la plus-value que cela apporte. « Ça a tellement embellit la ville de Paris ».

Cette « magnifiance » est sublimée par les résultats exceptionnels de l’Equipe de France olympique dans son ensemble, des athlètes français qui se transcendent et qui rassemblent. « Tous les athlètes français font d’excellents résultats, ça nous fédère, on a à cœur de voir cela. Tous les 4 ans on se rassemble, on soutient des sportifs dont on n’a jamais entendu le nom, on se passionne pour des sports dont on ne connait pas les règles. C’est vraiment génial, même devant la télévision. C’est le plus grand événement planétaire. Je ne pensais pas pouvoir les vivre physiquement, c’est une vraie chance que d’y avoir été conviée par le CNOSF. »

Un événement qui fait rêver et que Youna espère pouvoir un jour revivre dans le cadre professionnel : « J’espère, grâce à mon métier, pouvoir un jour les organiser dans une autre vile du monde. » C’est tout ce que l’on peut lui souhaiter.

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Membre de l'association des Femmes Journalistes de Sport

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