
Les délégations olympiques ont la responsabilité de désigner leurs porte-drapeaux pour la cérémonie d’ouverture et de clôture des Jeux Olympiques. La norme, depuis les JO de Tokyo est que chaque drapeau est porté à la fois par une femme et un homme. Retour sur les gymnastes mis à l’honneur à l’édition de Paris 2024.
Lors de chaque édition des Jeux Olympiques la désignation des différents porte-drapeaux est un enjeu qui prépare à l’événement. Choix arbitraire, choix réfléchi, vote organisé auprès des athlètes, chaque pays est décisionnaire.
Le choix stratégique et politique pour la Cérémonie d’ouverture
La cérémonie d’ouverture est un moment extrêmement important, et regardée par des milliards de personne. Le défilé des délégations est un moment particulièrement codifié et attendu. Il n’y a que très peu de place à la folie. C’est un moment de liesse et de communion, mais très cadré.
Parfois il faut prendre en considération le calendrier des épreuves : pour les sports collectifs par exemple, elles commencent avant la cérémonie d’ouverture, d’autres disciplines débutant le lendemain matin du défilé, ou au contraire à la fin de quinzaine. Il faut aussi prendre en considération que la cérémonie d’ouverture est un long processus, fatiguant : longues heures debout, ou dans des situations inconfortables, risques météorologiques (comme cette année où la pluie s’est mêlée à la fête), puis il faut rentrer au village, avec l’excitation de l’événement, la foule, etc…
Être porte-drapeau est aussi une charge mentale intense en amont de l’événement : il faut représenter la délégation, parfois avoir des obligations protocolaires qui peuvent impacter physiquement ou mentalement la préparation optimum d’un athlète qui doit être au meilleur de lui-même pour performer. C’est une reconnaissance inégalable, mais il faut en avoir conscience pour s’y préparer.
Au cours des années, la France a eu l’exemple et le contre-exemple de la performance des porte-drapeaux : Tony Estanguet en 2008 échoue dans sa quête d’un troisième titre de rang, tout comme Laura Flessel en 2012 à Londres où elle conclut sa carrière, alors que Marie-Josée Pérec, David Douillet ou Teddy Riner ont plutôt été portés par l’événement.
Cela dépend bien sûr de l’engagement du porte-drapeau auprès de sa délégation et de sa capacité à gérer de front les responsabilités politiques et sportives.
Depuis 2020, les responsabilités sont partagées sous le joug de la parité : ainsi en 2021 Samir Aït Saïd et Clarisse Agbégnénou se partagent les honneurs, en 2024 c’est Mélina Robert-Michon et Florent Manaudou à qui reviennent ce drapeau.
En France, généralement il s’agit de sportifs déjà médaillés, au firmament d’une carrière exceptionnelle en termes de résultats et de longévité.
Souvent les sports individuels sont préférés aux sports collectifs, à la fois pour des difficultés de calendrier compétitif, mais aussi pour la difficulté à ne désigner qu’un(e) seul(e) représentant(e) de l’équipe.
Les gymnastes à l’ouverture de Paris 2024
Les épreuves de gymnastique démarrent dès le lendemain matin suivant l’ouverture. Il est parfois difficile pour un gymnaste de pouvoir performer à sa juste valeur après avoir assisté à cet événement si excitant, si unique soit-il. Et bien évidemment que chacun souhaite être présent, mais les porte-drapeaux gymnastes sont chaque année très rares pour des raisons essentiellement logistiques.
En 2024, cinq pays avaient désigné un ou une gymnaste à cette tâche. Chacun et chacune portant fièrement la bannière du pays à l’avant d’un bateau qui parcourait les 6 km de la Seine. Deux hommes, Mahdi Olfati pour l’Iran et Audrys Nin Reyes pour la République Dominicaine, et trois femmes, Lynzee Brown pour Haïti, Hilary Heron pour Panama et Caitlin Rooskrantz pour l’Afrique du Sud.
Pour la plupart de ces gymnastes, il s’agit de la première participation de leur pays dans leur discipline (à l’exception de l’Afrique du Sud), voire de leur sport. C’est ainsi qu’ils marquent à la fois l’histoire de la gymnastique et l’histoire de leur pays qui a décidé de leur rendre hommage et de saluer leur performance qui, au-delà du résultat final et de leurs prétentions sportives reste exceptionnelle.
Et si l’essentiel est de participer, à voir les réactions de Caitlin, Mahdi et Audrys, leurs attentes sportives étaient bien au dessus de ce qu’ils ont pu montrer, mais jamais ô grand jamais ils n’oublieront que derrière eux suivaient, une délégation et un peuple !
La festive cloture
La cérémonie de clôture contrairement à l’ouverture, même si elle répond à un cadre, reste plus festive et surtout moins normée. Chaque pays, durant la quinzaine, nomme son ou ses porte-drapeaux. Là encore le CIO préconise un homme et une femme, mais parfois, le choix est plutôt rattaché au retour des sportifs dans leur pays, et donc aux sportifs présents qu’à un vrai choix. Certains pays sont confrontés à un choix sportif évident, mais d’autres plutôt à un choix économique, et aucun des sportifs n’est resté sur place. Ainsi c’est un volontaire de l’organisation qui portera le drapeau.
De façon générale, il est admis qu’une fois leurs épreuves terminées, les sportifs quittent le village olympique pour laisser ceux encore en lice se concentrer. Il n’y a pas de règle établie, elles sont à la discrétion des délégations selon les places qui leur sont attribuées. Certains athlètes peuvent rester, d’autres rentrer chez eux (éventuellement revenir pour la clôture si c’est accessible) ou encore loger à proximité dans des hôtels prévus par les délégations, ou à titre personnel.
A Rio, Simone Biles avait été désignée par les Etats Unis pour porter la bannière étoilée, à Tokyo Rebecca Andrade avait eu l’honneur du Brésil. Ces deux championnes de gymnastique sont encore au firmament de leur art mais n’ont pas été retenue. Simone Biles sera néanmoins au cœur de la transmission du drapeau olympique entre Paris et Los Angeles.
La Cérémonie de clôture fait défilé en ordre uniquement les porte-drapeaux, alors que le reste des délégations circule librement autour du Stade. Il s’agit d’une cérémonie beaucoup plus festive où l’athlète est littéralement au cœur de l’arène.
Neuf gymnastes ont été désignés comme porte-drapeaux de leur délégation le 11 août 2024 au Stade de France, jour de cérémonie de clôture des Jeux de Paris 2024. Pour nombre d’entre eux il s’agit de gymnastes rythmiques dont les épreuves viennent tout juste de se terminer et dont la contrainte du retour ne se pose pas.
La Bulgarie désigne la médaillée d’argent en individuel : Boryana Kaleyn (la Bulgarie n’avait pas obtenu de médaille individuelle dans ce sport national depuis 1988). L’Azerbadjian et l’Israel désignent Zeynab Hummatova et Romi Paritzki issues de leur ensemble olympique, alors que le Kazakhstan et Chypre misent sur leur individuelle : Elzhana Taniyeva et Vera Tugolukova dont la qualification avait fait l’objet d’une controverse et qui aura amené la FIG à suspendre la présidente du Comité Technique de European Gymnastics (L’Equipe).
Le Laos a aussi nommé sa gymnaste individuelle qui a bénéficié d’un spot offert par la commission tripartite et devient ainsi la première athlète laotienne olympienne : Praewa Misato Philaphandeth.
La Grande Bretagne a désigné la championne olympique de trampoline Bryony Page.
En GAM et en GAF, deux gymnastes qui ont également écrit l’histoire de leur pays durant cette édition parisienne puisque le désormais double champion olympique (sol et saut) Carlos Edriel Yulo, premier double médaillé d’or de son pays les Philippines et la première médaillée olympique en gymnastique du continent africain, l’algérienne Kaylia Nemour sont également inévitablement tous les deux désignés comme porte étendard.
Plus de 200 nations, à l’appel, près de 180 porte-drapeaux et toujours une dizaine de gymnastes qui font la fierté et l’Histoire de leur pays et de leur discipline. Même éreintée par la quinzaine, tous dressent leur drapeau fièrement, arborent un sourire éclatant et les étoiles du ciel parisien et les artifices d’une cérémonie inoubliable se reflètent dans leurs yeux comme dans un rêve éveillé. C’est alors que le monde entier lance le décompte vers Los Angeles.