Tous les ans, des gymnastes mettent fin à leur carrière. Certaines y sont contraintes, d’autres le font par choix. Quand une gymnaste de haut-niveau arrête, la nouvelle se propage très rapidement, et pendant deux à trois jours, la communauté gymnique ne parle que de cela. Cette transition vers une « nouvelle vie » n’est pas évidente pour la grande majorité des jeunes, qui se sont impliqués, depuis leur plus jeune âge, dans ce sport.
Pourquoi un/une gymnaste décide-t-il/elle de mettre fin à sa carrière ? Blessures, ras-le-bol, manque de résultats, envie de changement, éloignement familial difficile, impossibilité de concilier sport et études… sont quelques-unes des raisons qui poussent les sportifs à mettre fin à leur carrière. Cette liste n’est pas exhaustive et de nombreuses autres raisons existent.
Que se passe-t-il alors dans sa tête avant, pendant et après l’annonce de cette nouvelle ?
Avant de se pencher plus en détail sur cette question, il est important de préciser que chacun réagit différemment en fonction de ses expériences, ainsi que de sa personnalité. Pour les gymnastes qui font le choix d’arrêter, une longue réflexion précède l’annonce. Elles se demandent si elles sont prêtes à ne plus faire le sport qu’elles ont a tant aimé pendant toutes ces années, si elles vont supporter le fait de ne plus constamment être occupées, s’il s’agit du bon moment pour arrêter et de la bonne décision. Elles font un « état des lieux » de leurs carrières gymniques et se remémorent les moments passés avec leurs coéquipières et entraîneurs pendant les entraînements et les compétitions. Cette phase de questionnement est une étape importante pour la gymnaste. Plus elles sont prêtes à arrêter, le mieux se fera la transition. Enfin, c’est ce que beaucoup d’entre elles croyaient.
« J’avais pris la décision de ma date de « retraite » sportive bien en avance. Je profitais de chaque dernier moment qu’il me restait avec mes entraîneurs et coéquipières, mais j’avais aussi hâte de mettre un terme à ma carrière. J’étais prête à tirer un trait sur cette période de ma vie et d’en débuter une nouvelle. Puis, le moment arriva, un peu plus tôt que prévu. Du jour au lendemain, pouff, fini ! Libérée, délivrée !!! Enfin, c’est ce que je croyais. Les premières semaines étaient « faciles ». Je me croyais en vacances. Mais plus le temps passait, plus cet arrêt était difficile à digérer, bien qu’il s’agissait de ma décision prise après beaucoup de réflexion. » Alors imaginez-vous quand on impose à une gymnaste d’arrêter ou que l’arrêt d’une carrière se fait suite à une blessure…
Cette étape est très difficile pour de nombreux sportifs et les gymnastes ne sont pas des exceptions. Tout est angoissant dans ce moment : le passé, le présent et le futur.
Concernant le passé, les moments difficiles refont souvent surfaces. Ils s’accompagnent majoritairement par de la colère, de la tristesse et de l’incompréhension. Pourquoi les choses se sont passées ainsi ? Pourquoi ces paroles blessantes ? Pourquoi ces comportements ? Mais aussi un sentiment de fierté en portant un regard sur sa carrière et sur la capacité du sportif à avoir fait face à ces difficultés qui le rendront plus forts demain.
Concernant le moment présent, c’est l’angoisse parce que le sportif ne sait pas quoi faire. Il s’ennuie et cette sensation lui est étrangère, car depuis son plus jeune âge, il est occupé du matin au soir et a un programme très précis à suivre tous les jours.
Et enfin, une incertitude quant au futur. Que va-t-il se passer demain ? Vais-je réussir à m’adapter à cette nouvelle vie ? Est-ce que je vais réussir à me faire des amis et à m’intégrer dans un nouveau groupe de personnes ? Comment mon corps va-t-il réagir à l’arrêt du sport ? Comment vais-je m’occuper pendant ces longues journées ? Questions que la majorité des gymnastes et sportifs dans cette situation se sont posées à un moment ou à un autre.
Mon conseil pour toutes les personnes qui vont se trouver dans cette situation est d’être PATIENT. Je sais que personne n’aime ce mot. Jour après jour, vous trouverez votre chemin, et vous découvrirez qui vous êtes vraiment.
L’entourage de la gymnaste (famille et amis) est essentiel durant cette période de transition. La gymnaste ferme un chapitre de sa vie et s’apprête à en ouvrir un autre, qui pour l’instant est flou. C’est également lors de cette phase que la gymnaste se rend compte des traumatismes physiques ou moraux qu’elle a subis pendant sa carrière. C’est en vivant en dehors de ce cocon que les choses deviennent plus claires. Ces souvenirs peuvent être difficiles à digérer. Certaines personnes auront besoin de se détacher complètement de cet environnement et de couper les ponts avec tout souvenir lié à ce sport. Cette « pause » peut être temporaire ou permanente. Encore une fois, cela dépendra de chaque personne. Si vous avez l’impression que c’est le cas pour une personne que vous connaissez, respectez son choix. Elle sait ce qui est le mieux pour elle. Un jour peut-être, elle sera prête à renouer avec son passé. D’autres au contraire, resteront actives dans la discipline que ce soit en tant que juge, entraîneur ou même gymnaste.
De nombreux sportifs professionnels ont commencé ces dernières années à parler plus ouvertement de leur fin de carrière. Un grand nombre d’entre eux évoquent une période difficile. Pour certains, cette période s’est accompagnée d’une dépression. Ainsi, pour appréhender cette nouvelle période délicate, une solution est de se faire accompagner par des professionnels. Et il n’y a aucune honte à avoir à ce sujet. La fin de la carrière d’un sportif peut se comparer à un départ à la « retraite ». Ces deux événements ont beaucoup de choses en commun d’après les psychologues. Le fait de pouvoir partager son ressenti sur la situation, ses peurs et ses inquiétudes quant à cette nouvelle étape de vie avec une personne de confiance peut être très bénéfique. Cela peut permettre au sportif de découvrir qui il est au-delà du sport, de découvrir de nouveaux centres d’intérêts, et de vivre le mieux possible cette période de transition.
Si vous vous retrouvez dans ces phrases, sachez que vous n’êtes pas seul. De nombreuses personnes avant vous sont également passées par cette phase de transition. Et d’autres la vivront après. Au final, chacun a trouvé sa voie. Sachez juste que cela peut prendre du temps. Tourner la page après 10 ou 20 ans de votre vie ne va pas se faire du jour au lendemain. Soyez patient.
AK
À noter : Une série d’articles sur la fin de carrière est à venir sur le site. L’occasion de revenir sur les dispositifs mis en place et de revenir sur quelques expériences.