Hugo De Moura : “Il faut montrer qu’on peut avoir nos propres enchaînements et ne pas être une copie de la GR féminine”

Dans l’univers principalement féminin de la gymnastique rythmique, où grâce et souplesse sont les mots clés, Hugo De Moura y écrit sa propre histoire. Licencié au club de Thiais, il fait partie des rares gymnastes masculins à évoluer dans cette discipline presque entièrement dominée par les femmes. Entre passion, persévérance et quête de reconnaissance, il repousse les limites. Lors d’une interview accordée à Spot Gym avant son entraînement, il partage son rêve, celui d’un avenir où la gymnastique rythmique masculine aurait pleinement sa place dans les esprits de tous. Portrait découverte d’un jeune homme qui brise les codes. 

Un parcours hors normes

Avant de se tourner vers la gymnastique rythmique, Hugo De Moura est passé par le rugby et le football. Mais c’est la dimension esthétique et technique de la GR qui le fascine depuis son plus jeune âge. Il est conscient de l’originalité de son choix car il souligne que “pour un garçon c’est compliqué de faire de la GR directement et de trouver ça logique comme sport.” Contrairement à beaucoup, il a eu la chance d’être soutenu par des parents ouverts d’esprit, qui l’ont encouragé à poursuivre son rêve dans un sport où les hommes sont encore rares. “Mes parents sont assez ouverts d’esprit donc ils ont tout de suite soutenu mon projet d’aller vers un sport qui ne correspond pas à l’image que la société a des hommes.

Dès l’âge de 9 ans, il a dû s’adapter à un environnement majoritairement féminin. Son entraîneur, Agnès, souligne qu’au départ “il était plus attiré par le travail des engins et moins exigeant sur son corporel.”

Mais son évolution est fulgurante : en individuel, il passe du niveau régional au fédéral, puis au national en très peu de temps. Cette progression rapide est le fruit d’un travail entre lui et son entraîneur, qui décrit leur relation comme une véritable collaboration dans la création de ses chorégraphies. “C’est quelqu’un d’assez artistique, qui a plein d’idées (trop des fois)” dit-elle.

Hugo possède une excellente technique aux engins, tourne bien sur les pivots et a une bonne puissance sur les sauts, mais son surplus d’énergie et sa précipitation l’empêchent parfois de maîtriser parfaitement ses enchaînements. Il est aussi reconnu pour son sens artistique et sa créativité, bien que son enthousiasme débordant nécessite parfois d’être canalisé“, partage Agnès. Parfait pour le jeune gymnaste qui a pour projet de se diriger vers le monde de l’événementiel et du spectacle pour ses études supérieures.

Elle ajoute que Hugo est très à l’aise dans ce milieu et qu’il est même parfois le “chouchou de ces dames (rires)”. Toutefois, ses coéquipières savent aussi le recadrer quand il le faut, un équilibre qui l’a beaucoup aidé à progresser.

En France, ils sont peu nombreux à suivre cette voie. Parmi eux, on peut citer Peterson Ceus, qui, comme Hugo, œuvre pour la reconnaissance de cette discipline au masculin. Malgré les préjugés, Hugo s’impose dans cet univers, prouvant que la grâce et la puissance ne sont pas une question de genre.

Une reconnaissance progressive

La gymnastique rythmique masculine peine encore à s’imposer en France, contrairement à des pays comme le Japon où un sport tout entier a été crée. Cependant, Hugo reste un peu sceptique face à cela car selon lui “Ça marque encore plus l’écart entre les deux genres, ça en devient un autre sport et ça décrédibilise les hommes qui font de la GR féminine.” Mais également l’Espagne, où elle est mieux intégrée. Comme il l’explique, lors d’un gala d’exhibition en marge des championnats de Marbella, où des hommes ont réalisé une démonstration. “Ils ne sont pas en compétition, mais ils existent”. Une avancée qui montre que la visibilité est la clé du changement pour Hugo.

“C’est bien de vouloir faire des catégories masculines, mais il faut des hommes. Aujourd’hui on a un vrai problème, on va peut-être pouvoir se retrouver avec un bon quota en championnat de France mais en région et en département c’est plus compliqué”, rappelle-t-il. Le manque de représentation est l’un des principaux freins au développement de la GR masculine. Trop peu de personnes savent qu’elle existe et peu d’hommes savent qu’ils peuvent pratiquer ce sport, ce qui empêche la discipline d’évoluer. Son ambition est claire : voir émerger une véritable catégorie masculine, avec des compétitions dédiées et un code adapté aux spécificités physiques des gymnastes masculins.

Adapter la GR aux hommes : un défi à relever

Hugo De Moura ne milite pas seulement pour une reconnaissance du sport, mais aussi pour son évolution. Selon lui, la gymnastique rythmique masculine doit se démarquer en intégrant des éléments qui lui sont propres en prenant en compte les morphologies masculines. “Il faut montrer qu’on peut avoir nos propres enchaînements et ne pas être une copie de la GR féminine.”

Il propose d’adapter les exercices en y ajoutant davantage de puissance et d’acrobaties, pour compenser une souplesse généralement moindre chez les hommes. L’intégration d’éléments inspirés de la gymnastique artistique permettrait également de créer une identité distincte. Toutefois, une question demeure : faut-il créer des catégories masculines spécifiques ou adapter les catégories existantes pour qu’elles conviennent à tous ? Hugo souligne que “Oui il n’y a pas de catégories masculines, mais comment on en crée ? Comment on arrive à les juger ? Est-ce qu’il faut un nouveau code ou on adapte celui qu’on a déjà ?”

Son entraîneur partage ce constat et souligne que la GR peut être adaptée aux hommes. “Mais tant qu’ils seront en compétition contre des filles/femmes ça ne changera pas et les exigences seront toujours plus adaptées aux femmes qu’aux hommes.”

Un modèle pour les générations futures

Hugo De Moura veut être un exemple pour les jeunes gymnastes masculins. Pour lui, la GR ne doit pas être une affaire de genre, mais de passion et de talent. Il encourage les garçons à franchir le pas, à surmonter les barrières et à affirmer leur place dans ce sport tout en restant restant, admettant qu’il est difficile de s’y faire une place.

Enfin, son combat ne se limite pas à sa propre progression : il souhaite avant tout changer les mentalités afin que plus de garçons osent pratiquer la gymnastique rythmique : “Si on arrive à faire changer ne serait-ce qu’une ou deux personnes d’avis, c’est déjà une victoire pour nous.”

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