
Ils étaient 8 pour 5 places et ce sont finalement Julien Gobaux, Loris Frasca, Cyril Tommasone, Antoine Borello et Paul Degouy qui s’envoleront pour Doha dans quelques semaines dans le cadre des championnats du monde qui se dérouleront du 25 octobre au 3 novembre prochain. Une officialisation de la sélection par la Fédération qui a fait couler beaucoup d’encre avec cette même question qui revient sans cesse sur les réseaux sociaux : pourquoi Samir Aït Saïd ne figure pas parmi les 5 titulaires ? Explications.
Absent lors des derniers championnats d’Europe en raison d’une blessure à une épaule, il espérait confirmer son bon état de forme aux championnats du monde de Doha après un premier retour réussi aux Internationaux de France où il a décroché l’or aux anneaux, son agrès de spécialité. Mais la commission aura finalement décidé se s’envoler pour Doha sans lui. Un choix stratégique expliqué par le fait de la volonté de « composer la meilleure équipe du moment et donc la plus complémentaire » afin de « sécuriser des agrès sur lesquels nous pourrions être en difficulté, en raison des forfaits survenus, notamment aux arçons et aux barres parallèles » , explique Kevinn Rabaud, le DTN dans une interview accordée à la Fédération (lire sa déclaration ici). Les arçons et les barres parallèles, deux agrès sur lesquels Samir Aït Saïd n’évolue pas. À la différence de Cyril Tommasone, pur spécialiste de cette équipe masculine, qui a pu profiter de sa force aux arçons, agrès faible de l’équipe, pour glaner une place de titulaire. « Un concours par équipes peut se jouer aux arçons. C’est un agrès difficile sur lequel il est vite possible de faire des erreurs, notamment avec la pression. Il a donc fallu faire des choix qui ont été faits en totale concertation avec l’ensemble des entraîneurs présents sur l’ensemble de la préparation. Nous ne pouvions pas nous permettre de mettre que 3 gyms prêts aux arçons car, en cas d’erreurs, il est vite possible de descendre à une note à 10. Nous aurions pris un trop gros risque » , précise Yann Cucherat, le directeur du haut-niveau masculin.
Car l’objectif de ces championnats du monde de Doha est de rester en course pour les Jeux Olympiques de Tokyo. Et si l’objectif principal est de rester dans le Top 12, terminer parmi les 24 premières nations est tout d’abord une première étape à passer pour pouvoir participer aux championnats du monde de Stuttgart en 2019, qualificatifs pour les Jeux de Tokyo. « Si nous souhaitons aller chercher des médailles à Tokyo, il faut d’abord aller chercher la qualification olympique et donc participer aux Mondiaux de Stuttgart. À Doha, nous allons donc nous présenter avec une équipe homogène et complémentaire, composée avec un effectif fortement réduit par les blessures, les maladies, etc. Ils n’étaient plus que 8 dans la dernière étape de sélection et ils n’étaient même plus que 7 à la fin puisque Zachari est tombé malade la veille du tournoi en Belgique. Nous avons donc fait en sorte de composer l’équipe la plus cohérente qui nous permettra d’atteindre nos objectifs. Nous savons que sur le papier nous ne faisons pas partie des 12 meilleures nations mondiales mais… c’est sur le papier ! En compétition, tout est différent. Et l’équipe a su le prouver aux championnats d’Europe en allant chercher le bronze grâce à cette solidarité et cette âme qui est en train de naître dans cette équipe de France. Un état d’esprit qui se dessine où chacun a envie de se battre pour l’autre avec une énergie commune qui est fédérée » , analyse le technicien masculin. L’âme de l’équipe de France, cette même âme et solidarité qu’on retrouve tant du côté des féminines, vice-championnes d’Europe en titre, et qui est en train de se dessiner du côté des masculins pour permettre au collectif de grandir et s’épanouir autour – notamment – d’un socle solide composé des deux généralistes Loris Frasca et Julien Gobaux, dont le talent ne cesse de se confirmer au fil des sorties internationales.
Alors pour atteindre Tokyo, des choix stratégiques ont dû être opérés. Et Samir Aït Saïd, quatrième aux anneaux aux derniers Mondiaux à Montréal, fait partie de ceux qui ont été laissés sur la touche. Mais malgré cette non-sélection, celui qu’on surnomme le seigneur des anneaux ne perd pas pour autant de vue ses objectifs et, même s’il ne peut cacher sa déception, reste néanmoins concentré sur ses prochaines échéances. « Je suis déçu, c’est normal. Je suis un compétiteur et c’est toujours une fierté pour moi de représenter la France à l’étranger mais c’est ainsi. Je respecte cette décision. Ça va me donner encore plus la gnaque et je vais continuer à travailler pour l’équipe de France. Mon but est de représenter fièrement mon pays, de me positionner sur des étapes de coupe du monde, de décrocher des médailles et d’entendre la Marseillaise. Ce sera la plus belle des récompenses », livre-t-il. Samir le battant et le compétiteur n’a donc rien perdu de sa force mentale. Prochaines échéances pour lui à l’international : une étape de Coupe du monde à Cottbus en novembre prochain puis une autre à Melbourne en février.
Zachari Hrimèche et Edgar Boulet, les autres absents
Si l’absence de Samir Aït Saïd a réveillé les foules, deux autres absences ont également été particulièrement remarquées et regrettées sur les réseaux sociaux, avec des messages de soutien qui ont afflué : celles de Zachari Hrimèche et Edgar Boulet. Tous deux pré-sélectionnés, ils n’ont finalement pas été conservés en tant que titulaires. Ils cèdent leur place à Antoine Borello et Paul Degouy, tous deux auteurs d’un très bon match face à la Belgique et aux Pays-Bas, le week-end dernier, avec notamment une bonne performance aux barres parallèles (14.000 pour Antoine et 13.950 pour Paul, NDLR). Deux forces montantes de ce collectif France senior. « Antoine est un vrai bosseur qui a beaucoup de qualités et c’est également un vrai généraliste qui évolue sur les 6 agrès avec les barres parallèles et la barre fixe en point fort et une note aux arçons correctes. Son profil rentrait parfaitement dans la stratégie que nous nous sommes fixée. Quant à Paul (Degouy), il ne faut pas oublier qu’il faisait partie des titulaires pour les championnats d’Europe de Glasgow mais il avait dû déclarer forfait à cause d’une blessure. Edgar, remplaçant, était alors rentré en tant que titulaire. Paul a pu se soigner et il a fait un très bon match en Belgique ce qui lui a donc logiquement ouvert les portes de la sélection » , complète Yann Cucherat.
Malade lors du dernier tournoi en Belgique, Zachari Hrimèche, tout juste de retour d’une suspension de six mois, n’a quant à lui pas eu l’occasion de faire ses preuves lors de cette dernière sortie internationale et son retour en équipe de France devra donc encore attendre un peu. « Je m’attendais un peu à ne pas être dans l’équipe du fait de mon absence lors du dernier tournoi. Je suis tombé malade la veille donc je savais que j’allais être écarté. En plus j’avais une douleur au tendon d’Achille qui m’empêchait de faire du sol et du saut depuis deux semaines » , confie le sociétaire du club de Vélizy avant de préciser : « Aujourd’hui, je pense que l’équipe envoyée est celle qui est la plus prête au vue des derniers tests et celle qui pourra le mieux performer en équipe à Doha. C’est ce qui compte avant l’année décisive à venir. En ce qui me concerne, je vais soigner ma douleur au tendon et travailler pour la suite. »
De son côté, Edgar Boulet, qui a terminé au pied du podium à la barre fixe aux Internationaux de France, sera lui du voyage à Doha mais en tant que remplaçant. Une annonce qui ne l’a pas surpris non plus. « J’étais préparé à peut-être ne plus être sélectionné en tant que titulaire car on savait que le test à Gand pouvait redistribuer toutes les cartes. Alors oui, je suis forcément déçu car on a toujours envie d’être dans l’équipe mais j’ai fait tout ce que j’avais à faire donc je ne suis pas déçu de moi-même. C’est le principal. Ce sont des choix qui ont été faits pour le bien de l’équipe, je sais qu’avec moi l’équipe aurait été plus fragile aux arçons donc le choix est logique » , analyse-t-il. Mais s’il n’a pas été sélectionné en tant que titulaire, Edgar se prépare à tenir pleinement son rôle de remplaçant. « Je me tiendrai prêt jusqu’à la dernière minute et surtout je serai là pour soutenir l’équipe et la mettre dans les meilleurs dispositions possibles. C’est aussi ça être remplaçant » , conclut-il.
Désormais place donc à la préparation de la compétition… Les Mondiaux de Doha souriront-ils au clan tricolore ? Les choix stratégiques se révéleront-ils payants et permettront-ils à la France de rester parmi les 12 meilleures équipes mondiales ce qui permettrait d’envisager l’avenir plus sereinement, à un peu moins de deux ans des Jeux de Tokyo ? La réponse le 3 novembre !
Charlotte Laroche
Super article qui explique très bien le choix de la sélection merci!