La carrière de cinq gymnastes du club de Mérignac menacée faute de place dans un collège

Cinq jeunes gymnastes du club de Mérignac se retrouvent face à un obstacle majeur en cette rentrée scolaire 2024. Alors qu’ils s’apprêtent à entrer en Sixième, ils n’ont pas obtenu la dérogation nécessaire qui leur aurait permis d’intégrer le seul collège du secteur proposant une section sportive scolaire adaptée à leur ambitions sportives.

Photo SAM

Ils s’appellent Olivia, Paolo, Arthur, Simon et Oihan et ont tous été acceptés au DRA Nouvelle-Aquitaine (dispositif régional d’accession) par la fédération française de gymnastique, faisant partie des vingt meilleurs gymnastes de leur génération. Mais aujourd’hui, leur avenir gymnique est compromis. Depuis la réception de l’avis défavorable de dérogation à la carte scolaire, tout pourrait malheureusement voler en éclat…

Non sectorisés au collège Gisèle-Halimi de Mérignac, le seul établissement du secteur disposant d’une section sportive scolaire, les cinq gymnastes, quatre garçons et une fille nés en 2013, ont formulé une demande de dérogation auprès de l’Académie de Bordeaux afin de pouvoir intégrer le collège et ainsi pouvoir disposer d’horaires aménagés, indispensable pour la bonne poursuite de leur formation gymnique et leur accession vers le haut-niveau. Sauf que, faute de place dans l’établissement, celle-ci a été refusée. “Ils privilégient les enfants du secteur, ce que nous comprenons totalement” , explique Mathieu Peyrot, responsable de la section collège et entraîneur GAM au sein du club. “Mais ce qu’on a du mal à comprendre c’est pourquoi aucune classe supplémentaire n’est créée alors que la capacité du collège est passée de 500 à 700 élèves” , à la suite de travaux d’envergure réalisés en mars 2023 pour un coût de 28 millions d’euros comme le rapporte le journal Sud Ouest. “Les moyens ont été mis pour permettre d’accueillir plus d’élèves, pourquoi ce n’est pas le cas ? “, s’interroge légitimement l’entraîneur.

En outre, le club, soutenu par la municipalité, déplore le fait que ce soit au total 16 jeunes du club omnisports du SAM qui sont concernés par ce refus. “Si à notre échelle ce sont 5 enfants de la filière gymnique qui sont concernés, le SAM, qui est un club omnisports et dont nous faisons partie, a déposé seize demandes de dérogations, tout sport confondu. Toutes ont été refusées alors que ça représente déjà la moitié d’une classe. Pourquoi ne pas prendre cet élément en compte ? D’autant plus qu’ouvrir une classe supplémentaire permettrait également de désengorger les autres classes de Sixièmes qui comptent pour certaines 30 élèves. Face à tous ces paramètres, on est dans l’incompréhension la plus totale. Cela fait depuis 1998 que le SAM a conclu une convention avec le collège Gisèle-Halimi, il y a trois ans nous avons créé une section sportive scolaire, un organisme mis en place par l’Education nationale et validé par le rectorat spécifiquement pour la gym, mais cette année pour des raisons qui nous échappent, les dérogations de toutes nos Sixièmes ont été refusées.”

De son côté, “l’Académie de Bordeaux précise que les affectations pour des élèves hors secteur s’articule autour de sept niveaux de priorité, du handicap, aux bourses ou encore au rapprochement familial“, rapporte France 3 Régions, avant de préciser : “Les demandes de dérogation pour l’intégration d’une section sportive sont de niveau 7.” 

Avis favorable de l’établissement
Dans ce contexte, si l’Académie n’a pas donné de suite favorable aux demandes de dérogation, en revanche l’établissement avait approuvé la candidature des cinq gymnastes. “Quand on a fait la demande de dérogation auprès du rectorat, en parallèle, on a également fait une demande pour intégrer la section sportive scolaire auprès de l’établissement” , éclaire Mathieu Peyrot avant de poursuivre. “Pour intégrer la section, il faut respecter certains critères d’entrée liés au niveau scolaire et gymnique. Tous nos gymnastes respectaient le cahier des charges demandé et la professeur en charge de la section et la principale de l’établissement avaient donné leur accord.” Sauf que tant que la demande de dérogation à la carte scolaire n’est pas acceptée par l’Académie, les jeunes élèves ne peuvent pas intégrer le collège, ni la section sportive scolaire.

Une situation qui impacte lourdement leur pratique gymnique et leur volume horaires d’entraînement quotidien et hebdomadaire, car sans cette dérogation, ils seront tous scolarisés dans leur collège de secteur qui ne disposent pas d’horaires aménagés. “Ils ne pourront s’entraîner que 2 heures par jour, à raison de 3-4 fois par semaine, donc le projet de haut-niveau est directement avorté” , regrette Michael Pallares, responsable technique du club. “Si la dérogation est acceptée, ils pourront en revanche continuer les entraînements bi-quotidien, et s’entraîner jusqu’à 25 heures par semaine. Entre 25 heures et 8-10 heures par semaine, la différence est énorme. C’est leur avenir gymnique qui est en jeu.”

On sait que ce sera compliqué si la situation ne se débloque pas” , regrette Mathieu Peyrot. “On a réfléchi à un plan d’organisation en faisant du cas par cas afin d’essayer de trouver les moins pires des solutions pour les enfants, mais le volume horaire d’entraînement ne pourra jamais être suffisamment conséquent dans ces conditions-là. C’est tout un projet de formation mis en place ces dernières années qui s’écroule.”

En effet, sans les horaires aménagés, les enfants termineront le collège plus tard et donc, par ricochet, les entraînements plus tard. À cela s’ajouteront également les trajets supplémentaires avec des distances entre le collège et la salle d’entraînement rallongées. “Les horaires aménagés permettent également de pouvoir amener une dynamique de collectif” , précise Mathieu Peyrot. “C’est quelque chose que ces cinq gymnastes ne pourront plus avoir. Et forcément faire 4 heures de gym en 2 temps dans une journée grâce aux entraînements bi-quotidien, ce n’est pas du tout la même chose que faire 4 heures d’entraînement en une seule fois après une longue journée d’école. Ça n’engendre pas du tout la même fatigue. On se retrouve donc à ne pas pouvoir offrir aux enfants la dynamique optimale qu’ils méritent. Ils ont fait tout ce qu’il fallait en amont, il y a eu beaucoup de travail et d’investissement de leur part, mais là c’est comme si on leur disait, ça fait 4 ans que vous travaillez pour rien et que tous vos efforts n’auront servi à rien. On parle de carrière de jeunes gymnastes qui débutent… on n’a pas envie de leur dire que tout va s’arrêter maintenant pour des raisons indépendantes de notre volonté. C’est leur ambition, leur passion, ils ne méritent pas ça.”

Olivia Martin, médaillée de bronze en Nationale 1, aux côtés de son entraîneur Michael Pallares. Photo DR

Du côté des familles, la situation est tout aussi compliquée à gérer. “On la vit mal” , souffle Sandrine, la maman d’Olivia, jeune gymnaste talentueuse qui s’est révélée depuis son arrivée au SAM il y a 2 ans et qui a remporté la médaille de bronze aux derniers championnats de France. “Olivia avait décidé de rejoindre le club pour performer, avec cette envie de faire du haut-niveau. Elle s’est donnée les moyens pour commencer à atteindre son objectif, vivre son rêve. Elle avait été intégrée dans le cursus primaire qui lui permettait de disposer déjà d’entraînements bi-quotidiens. Elle s’entraîne avec les 2009-2010-2011, est la plus jeune du groupe d’entraînement, côtoie au quotidien Maiana (Prat) ce qui lui permettait de se dire qu’en étant à Mérignac, elle pouvait atteindre l’équipe de France en restant dans son club, auprès de ses parents. Elle a beaucoup progressé, s’est beaucoup investie, elle a terminé troisième en individuel pour ses premiers championnats de France, elle a fini première en équipe en Nationale 2 10 ans et + et elle a été repérée sur le plateau de compétition ce qui lui a permis d’être intégrée au collectif avenir de Nouvelle Aquitaine” , énumère la maman… “Mais là tout risque de s’arrêter. C’est dur pour elle, car si elle ne peut pas intégrer le collège Gisèle-Halimi, elle ne pourra plus disposer d’entraînements bi-quotidiens et elle perdra plus d’une dizaine d’heures d’entraînement par semaine. On souhaite préserver notre enfant avant tout, elle ne va pas aller à l’entraînement jusqu’à 21 heures chaque soir de la semaine alors qu’elle aura eu une journée de 7 heures au collège, sinon elle va exploser en plein vol en cours d’année. Pour les enfants, ce n’est pas viable.”

Une situation d’autant plus frustrante que la ville soutient pleinement ces jeunes athlètes, et qu’en pleine année olympique, le discours politique national prône le soutien aux jeunes sportifs dans leur pratique sportive quotidienne. Mais malgré les efforts déployés par les autorités locales, le club et les familles, l’Académie maintient sa décision.

Ce lundi 2 septembre, c’est donc dans leur collège respectif de secteur que les cinq gymnastes feront leur rentrée… avec toutefois l’espoir que la situation puisse se débloquer et que leur demande de dérogation finisse par être acceptée. “On garde espoir” , lance Michael Pallares. “Il faut garder espoir.” Dans le cas où de nouvelles inscriptions d’élèves de secteur aient lieu, une classe supplémentaire pourrait être ouverte ce qui pourrait alors redistribuer les cartes et offrir une meilleure perspective d’avenir pour les cinq gymnastes.

Et si nos enfants doivent changer d’établissement en cours d’année afin de leur permettre d’intégrer la section sportive scolaire du collège Gisèle-Halimi et ainsi poursuivre leur rêve d’atteindre le haut-niveau, on n’hésitera pas à une seconde car c’est leur souhait. On va garder espoir même si c’est difficile et on continuera de se battre pour l’avenir de nos enfants” , conclut la maman d’Olivia.

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1 COMMENTAIRE

  1. Travaillant dans un collège je ne suis malheureusement pas étonnée de cette situation… Les choix d’ouverture de classe ne sont que mathématiques et ne prennent pas en compte l’humain.
    Accepter une quinzaine de dérogations impliquerait l’ouverture d’une classe, donc un coût pour le rectorat qui ne pourrait sûrement pas fermer une autre classe autre part si les élèves viennent de différents secteurs.

    Bref tout n’est qu’une histoire d’argent et c’est bien triste pour ces sportifs.

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