Noah Barberot (20 ans) est l’unique masculin de la sélection tricolore engagé sur les championnats du monde de gymnastique acrobatique qui se sont ouverts ce 19 septembre à Guimaraes. Portrait.

Noah Barberot et Celena Fernandes aux championnats du monde de Guimaraes. Photo Maëlie Abadie

Dès son entrée dans la salle d’entraînement de l’OAJLP Trampoline Gymnastique acrobatique, située dans les sous-sols de l’Azur Arena d’Antibes où le club partage les installations avec le pôle France de trampoline, Noah Barberot dégage immédiatement une forme de bienveillance. Ici c’est le grand frère et ça se sent. Arrivé à Antibes à l’été 2022 en provenance d’Albertville, le gymnaste de 20 ans évolue désormais en duo mixte avec Celena Fernandes avec qu’il dispute ses premiers championnats du monde de gymnastique acrobatique en senior. Un duo qui a tout de suite parfaitement fonctionné. “On s’entend très bien tous les deux, on se soutient beaucoup, et c’est hyper important” , sourit-il.

Le duo s’était déjà rencontré deux ans plus tôt à Bakou. “À l’époque, Celena était en trio avec le club d’Antibes et moi en duo mixte avec une autre partenaire de mon club à Albertville. On s’était déjà très bien entendu. Pourtant à l’époque ce qui était marrant c’est qu’on n’avait aucune idée qu’on allait être en duo mixte quelques semaines plus tard ! Je ne savais d’ailleurs même pas que j’allais rejoindre le club d’Antibes. Et depuis, on évolue ensemble et on est super heureux.” Un duo qui s’est trouvé et qui a construit un pan de son histoire ensemble avec une première qualification sur des championnats du monde senior. Le Graal.

Trajectoire d’un gymnaste doué
Avant de découvrir la gymnastique acrobatique, Noah a d’abord commencé par le cirque. Il avait 3 ans lorsque sa mère décide de l’inscrire, voyant que son fils appréciait déjà faire quelques acrobaties. “On faisait un peu de tout au cirque, on faisait du fil suspendu, de la poutre, et on faisait aussi quelques portées avec nos entraîneurs” , se souvient-il. “J’aimais faire la roue, le grand écart et ma mère avait vu que ça me plaisait donc elle a cherché un club qui proposait de la gymnastique acrobatique.”

C’est alors qu’il s’inscrit au club de Crolles, situé dans la banlieue de Grenoble. “J’avais 7 ans et j’ai tout de suite accroché. Dès le premier essai en loisir, j’ai adoré et on m’a directement proposé de rentrer dans le groupe compétition car j’avais de grandes qualités en souplesse. Mais mes parents ont préféré que je fasse un an de loisirs d’abord pour me familiariser un peu avec la discipline et les entrainements, et c’est ensuite que je suis entré dans le groupe compétition et j’ai rapidement progressé” , éclaire-t-il.

Il commence d’abord en tant que voltigeur, en duo et en trio, avant de passer porteur à son entrée en 5ème. “Pendant deux ans, j’étais porteur dans un duo mixte à Crolles et ensuite j’ai changé de club pour rejoindre Albertville après avoir été détecté lors de stages régionaux. Le club d’Albertville était beaucoup plus développé et me permettait d’être intégré à un projet international avec une nouvelle partenaire.” Un projet qui l’a tout de suite séduit, car il avait envie de voir plus grand. De progresser encore plus et de porter les couleurs de la France sur les compétitions et tournois internationaux.

C’est donc à son entrée en 3ème que Noah quitte la région grenobloise pour s’installer à Albertville. “Je suis monté sur le groupe national en 2019 et j’ai décroché mon premier titre de champion de France en avenir. En 2020, à ma rentrée en Seconde, j’ai commencé l’élite et avec ma partenaire on a intégré le collectif France de gymnastique acrobatique en 2021” , énumère le gymnaste. “Ensuite, on a participé aux championnats d’Europe et aux compétitions mondiales par groupe d’âge.” Des années où il progresse bien sûr mais où il évolue et grandit gymniquement et personnellement. “Quand Noah est arrivé à Albertville, c’était un jeune qui manquait beaucoup de confiance en lui” , confie Claudine Marchal, la responsable du secteur GAC à Albertville et l’ancienne entraîneure de Noah. “Mais je me souviens, il avait des étoiles plein les yeux et une telle motivation. Il était volontaire, généreux, il avait cette envie d’apprendre et il avait en plus de très belles qualités, dont la souplesse, ce qui était très intéressant, et il aimait danser. Au fil du temps, il a gagné un peu confiance et il a développé encore plus ses qualités artistiques. C’est vraiment un chouette jeune homme. On est ravi de ce qu’il lui arrive. Il a déjà participé aux compétitions mondiales par groupe d’âge, mais là il s’est qualifié avec sa partenaire aux championnats du monde senior et c’est vraiment mérité. Il a passé encore un stade. Même si depuis, il n’est plus au club, on est et il est toujours resté attaché. Dès qu’il peut, il vient nous voir et il donne même un coup de main pour faire les choré des filles. Le lien qu’on a tissé ensemble est très fort.

Noah et Celena ont commencé à évoluer ensemble à l’été 2022. Photo DR

Nouveau projet, nouvelle vie, nouveaux objectifs
Après avoir décroché son bac, en juin 2022, il a dû changer de club pour pouvoir poursuivre sa progression. Le tout en parfaite harmonie avec son club d’Albertville. “Ma voltigeuse à Albertville commençait à devenir très grande donc c’était le moment pour elle de devenir porteuse” , explique-t-elle. “Il n’y avait plus de partenaire au club avec qui j’aurais pu continuer à prétendre évoluer au niveau auquel je prétendais, alors avec Claudine mon entraineur, on a lancé un appel sur la France auprès des clubs afin de savoir si certains avaient un projet à me proposer.” Trois clubs ont répondu et il en pré-sélectionnera deux. “J’ai fait un test en juillet 2022 à Antibes et Talence, et j’ai choisi de rejoindre Antibes pour intégrer le duo mixte avec Celena. Quelques semaines à peine après mes tests, j’étais sur Antibes, ravi d’entamer un nouveau cycle” , sourit-il.

Dès son arrivée sur la côté méditerranéenne, il prend immédiatement ses nouvelles marques. “Il a tout de suite su trouver sa place. Aux premiers abords, Noah peut avoir une apparence un peu froide, mais en réalité c’est quelqu’un avec une très belle âme, sensible, généreux avec les autres et très bienveillant” , analyse Camille Curti, ancienne internationale française et entraîneur au club de l’OAJLP Trampoline Gym Acro. “Il est très appliqué et investi dans tout ce qu’il fait. A l’entraînement mais aussi dans ses études et pour le club. Il n’hésite jamais à aider les plus jeunes.”

En plus de ses qualités humaines, Noah a cet atout d’être extrêmement souple. “C’est plutôt rare pour les garçons et c’est une grande qualité surtout en gymnastique acrobatique” , commente Camile Curti. “Il est aussi très gracieux, ce qui est une qualité toute aussi importante pour ce sport.” Mais a côté de ça, Noah garde, malgré les années qui passent et l’expérience qui s’accroit, un certain manque de confiance en lui. “Il ne se pense pas capable de faire les choses, alors que pourtant il est très talentueux. C’est quelque chose sur lequel il travaille.

En parallèle de ses entraînements, il a également entamé son cursus en études supérieures et pris son indépendance. “Terminé la famille d’accueil, sourit-il. J’ai pris mon appartement et j’organise mon quotidien entre mes études et mes entrainements.” Étudiant en licence design d’espace et architecture d’intérieur et ne disposant pas d’horaires aménager, il a mis en place une organisation bien ficelée qui lui permet de mener de front son double projet. Un emploi du temps réglé comme du papier à musique, musique sur laquelle le reste du temps il se sublime. “Comme je suis seul dans mon cas dans ma promo à être identifié sportif de haut-niveau, ils ne pouvaient pas aménager l’emploi du temps de toute une promo uniquement pour moi. Mais je finis généralement à 16h ou 17h30, et comme mon école est à 5 minutes à pied de la salle d’entrainement, j’enchaine directement.”

De son côté, Celena disposait jusque-là d’un emploi du temps aménager avec le collège, ce qui lui permettait de finir les cours à 14h et de s’organiser en fonction de Noah. “Celena arrive généralement 30 minutes avant moi et prend le temps de s’échauffer avant de commencer notre travail en duo.”

En 2023, ils disputent les championnats d’Europe ensemble. Photo DR

Une première dans la cour des grands
Un duo qui progresse ensemble, uni comme les cinq doigts de la main. En 2023, ils participent à leur premier championnat d’Europe en duo mixte junior 13-19 ans et se hissent en finales du concours général et par appareil (statique et dynamique). “C’était assez inattendu pour nous de parvenir à se qualifier sur les trois finales, on était super heureux car initialement on visait principalement celle du concours général. Alors décrocher notre place sur les 3 finales, c’était génial !” Ils terminent alors 5ème au général, 5ème en dynamique et 6ème en statique. Pas de médaille mais beaucoup d’expérience pour leur première grande compétition internationale ensemble. “Juste avant, nous avions participé à un tournoi à Varsovie, mais là c’était vraiment notre première grosse compétition internationale tous les deux. On était hyper fier de notre performance, surtout qu’il y avait beaucoup de concurrence.”

Dorénavant, c’est en senior que le duo évolue, Noah n’ayant plus l’âge d’évoluer en junior. L’entrée dans la cour des grands. Un rendez-vous tant attendu, convoité, pour lequel ils ont beaucoup travaillé mais qu’ils auraient pu manquer… En juin dernier, aux championnats de France, alors qu’il avait décroché son ticket pour les Mondiaux de Guimaraes à la suite d’un premier test organisé au début du printemps, il se blesse à la cheville en plein passage de son dynamique avec Celena. S’il parvient à terminer son mouvement, impossible en revanche pour lui de présenter le combiné le lendemain et de tenter d’aller chercher un deuxième titre de champion de France consécutif en duo mixte. Si la déception était grande, les regards étaient également déjà tournés vers l’après. Vers les Mondiaux de Guimaraes.

De retour à Antibes, les examens révèlent deux ligaments rompus et un arrachement osseux au niveau de la cheville. Une course contre la montre était lancée. Mais Noah prend le temps de se soigner. Sans brûler la moindre étape, respectant le protocole médical dans le moindre détail, afin de mettre toutes les chances de son côté pour être sur pied et en pleine possession de tous ses moyens à temps. Il porte une botte pendant deux semaines et en profite pour travailler le haut du corps. “Noah a toujours été un garçon extrêmement volontaire et il a profité de cette période pour travailler une autre partie du corps, développer un peu plus sa musculature dans le haut du corps, et revenir plus fort” , explique Camille Curti. “Ensuite, il a enchaîné avec une semaine d’attelle, un peu de vacances et il a pu reprendre l’entraînement mi-juillet en même temps que le reste du groupe. Progressivement d’abord, avant de pouvoir revenir à 100%. Désormais il n’a plus du tout de douleur et sa cheville est bien stable. Il a réussi a revenir à temps et on est tous très heureux pour lui.”

Surtout que ces championnats du monde à Guimaraes marquent également la fin d’une ère pour le duo Noah/Celena qui dispute sa toute dernière compétition ensemble, Celena ayant grandi et ne pouvant plus être voltigeuse. Alors ils comptent bien profiter de ce dernier moment qui s’offre à eux. À leur duo. À leur histoire… à deux.

Noah et Celena avant leur passage dynamique aux Mondiaux de Guimaraes. Photo Maelia Abadie

 

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