Léa Marques : “Il est temps pour moi d’entamer une nouvelle page de vie”

Après 16 ans de pratique, Léa Marques a annoncé l’arrêt de sa carrière de gymnaste de haut-niveau. Elle quitte le Pôle de Marseille le coeur lourd mais l’esprit léger, contente et pressée de se consacrer à sa nouvelle vie d’étudiante en psychomotricité. Elle se confie.

Gym and News : Léa, tu viens d’annoncer ta retraite gymnique, comment vas-tu et surtout comment te sens-tu ?
Léa Marques : Je vais très bien. Le confinement se passe bien et je suis contente d’avoir officialisé mon arrêt. C’est une décision réfléchie, il ne me restait plus qu’à l’annoncer. Ça me fait un pincement au coeur de me dire que tout cela est désormais derrière moi car je suis dans un gymnase depuis l’âge de 2 ans mais c’est une page qui se tourne.

L’annulation du Top 12 et des championnats de France élites a-t-elle accéléré l’officialisation de ta fin de carrière ?
Oui. Au début, je voulais attendre la fin de la saison pour pouvoir matcher en Top 12 avec mon club de Hyères et également disputer les championnats de France élite. J’avais prévu de faire mon annonce après ces deux compétitions. Mais ces deux compètes étant annulées et ne voulant pas que mon arrêt soit découvert au moment de la publication des listes du Gym Eval, j’ai préféré prendre les devants. Je ne voulais pas que l’information tourne sur les réseaux sociaux, on sait que ce genre de choses arrivent souvent au moment de la publication des listes du Gym Eval, je préférais donc l’annoncer par moi-même.

Peux-tu revenir sur les grandes lignes de ta carrière ?
J’a débuté la gym en baby gym, à l’âge de 2 ans, au club de Hyères. C’est mon club de toujours, je ne l’ai jamais quitté. Ensuite, en CM1, je suis rentrée en pré-pôle à Toulon. En CM2, j’ai été repérée lors de stages et de compétitions et Eric Boucharin m’a alors proposé de rejoindre le pôle de Toulon. J’y ai fait tout mon collège. Lorsque le pôle de Toulon a fermé, à l’été 2016, j’avais fait la demande de rejoindre l’INSEP mais à cette époque-là, j’étais blessée à l’orteil, ça n’arrivait pas à guérir, j’ai dû me faire opérer 3 fois, et mon entrée à l’INSEP m’avait été refusée. On m’a alors proposé d’entrer à Marseille. Au début, je ne voulais pas et j’y suis allée un peu par dépit…

Et finalement tu y es restée 4 ans…
Oui (Rires). Vincent (Pateau) et Elvire (Teza) m’ont dit d’essayer et de faire un essai sur le mois d’août. J’ai donc tenté l’expérience. Les premiers jours n’étaient pas forcément évidents et puis finalement j’ai tout de suite accroché avec Vincent, je me suis très bien entendue avec lui et j’ai donc décidé de rester. En 4 ans, il y a certes eu quelques moments compliqués, quelques accrochages entre nous, mais c’est normal, on passe nos journées entières à la salle de gym. Mais sans Vincent, j’aurais arrêté la gym depuis bien longtemps. C’est un des premiers, avec Pascal au pré-pôle de Toulon, qui a cru en moi. Le feeling est vraiment bien passé entre-nous et il est très important pour moi. C’est comme mon deuxième père. Il fait partie de ma famille.

Quels sont tes meilleurs souvenirs de carrière ?
Le Massilia, l’an dernier, avec l’équipe de France où je remporte l’or en équipe et en individuel au concours général. C’est un de mes meilleurs souvenirs. Surtout que l’année d’avant, je n’avais pas été prise pour matcher en équipe de France au Massilia. Mon club de Hyères avait donc décidé d’engager une équipe afin de me permettre d’y participer… mais ça a été un carnage monstre (Rires) ! On était en salle d’échauffement à 7h30, la compétition démarrait à 8h30, on était fatiguées et j’avais complètement raté ma compète ! J’avais fait 4 chutes, je n’avais jamais fait une compétition aussi nulle ! Donc revenir un an après et avoir de tels résultats, c’est super comme revanche. D’autant plus que les mois précédents n’avaient pas été forcément évidents pour moi…

Pourquoi ? Que s’était-il passé ?
Ce n’est un secret pour personne mais j’ai toujours eu énormément de mal à gérer mon stress en compétition. Quelques mois avant le Massilia, Vincent m’avait proposé de travailler  avec un préparateur mental, Thomas Sammut. Au début j’ai tout de suite refusé ! Puis au fur et à mesure, je voyais que je ne m’en sortais pas, je faisais des trucs de malades à l’entraînement et dès que j’arrivais en compétition ou en test, je ratais tout. Alors Vincent m’a reparlé du préparateur mental, il a un peu insisté, et comme il n’y a que les imbéciles qui ne changent pas d’avis (rires), j’ai fini par accepter. Et je ne le regrette pas du tout !

Sur quoi avez-vous travaillé avec le préparateur mental ?
Il m’a appris à prendre confiance en moi. J’ai tout de suite accroché avec Thomas et les 4 premières séances que j’ai faites avec lui, je n’ai pas arrêté de pleurer d’ailleurs. Mais cela a été très utile et ça a débouché sur cette belle victoire au Massilia. Cette victoire, elle était pour moi mais aussi pour lui.

Avec du recul, penses-tu que le stress t’a empêchée d’être plus souvent sélectionnée en équipe de France ?
Oui clairement ! À l’entraînement, j’arrivais à sortir plein de choses et dès que j’étais en test ou en compétition, je n’arrivais plus rien. Je ne savais plus rien faire. Je pouvais même chuter sur une bascule ! Ça m’arrivait tout le temps. Pour les championnats d’Europe junior de Bern par exemple, en 2016, j’aurais dû être dans l’équipe, mais lors d’un test de sélection France à Marseille, j’ai tout raté. J’ai chuté au sol, aux barres et j’ai eu un zéro au saut, je suis tombée à plat ventre ! C’était une catastrophe ! Je n’ai donc finalement pas été sélectionnée. Je suis passée à côté de beaucoup de tests et donc de beaucoup de sélections, ce qui m’a souvent fait sortir de l’équipe de France.

Penses-tu que si tu avais rencontré Thomas Sammut un peu plus tôt, ta carrière aurait pu être différente ? Plus belle ?
Je ne pense pas. Thomas est arrivé au bon moment. Je n’étais pas prête à faire un travail sur moi-même avant.

D’autres compétitions t’ont-elles marquée ?
Le DTB Pokal l’an dernier était aussi un très bon souvenir. J’ai fait des super barres aux qualifications, avec les filles il y avait une super ambiance donc c’est vraiment un très bon souvenir. Une très belle aventure. Et puis il y a aussi toutes les compétitions que j’ai eu l’occasion de faire avec l’équipe de France. C’est quelque chose d’énorme de représenter son pays et de porter le justau France.

Quels sont tes souvenirs plus douloureux ? Moins agréables ?
(Silence)

Il n’y en a peut-être pas ?
Oh si, il y en a… Le Massilia, il y a 3 ans, a vraiment été une compétition galère pour moi. Et puis il y a plein de championnats de France élite. Je ratais tout et je remettais tout en doute dès que la compétition débutait.

Au pôle de Marseille, tu étais la plus vieille, quel rôle jouais-tu auprès des plus jeunes ?
J’avais un peu le rôle de grande soeur. Les filles venaient souvent me demander quelques conseils, elles savaient qu’elles pouvaient venir me voir et que j’étais là pour les écouter, les conseiller. Je m’entendais bien avec tout le monde, même si avec certaines il y avait des affinités beaucoup plus fortes.

Comme avec Taïs Boura par exemple ? 
Oui avec Taïs, nous avions une relation très fusionnelle. Je me suis tout de suite bien entendue avec elle, dès que je suis arrivée à Marseille. Tout le monde disait que Taïs était la fille de Léa d’ailleurs (Rires). Elle va me manquer.

Qu’est-ce qui va te manquer également ? 
La gym va me manquer mais je pense que ce qui va me manquer le plus ce sont les relations humaines. À Marseille, nous sommes toutes très soudées, nous sommes une grande famille. C’est ce qui fait la force du pôle. Donc c’est toute cette ambiance qui va me manquer.  Ces quatre années passées à Marseille ont vraiment été une belle aventure.

Désormais quels sont tes projets ? 
Je vais pouvoir me consacrer à 100% à mes études. Je suis en école de psychomotricité sur Marseille, je suis en première année. J’ai validé mon premier semestre et avec le confinement on attend de savoir comment vont se passer les examens du second trimestre. Nous sommes un peu dans le flou. Cette saison, j’avais déjà beaucoup de mal à concilier études et entraînements, j’étais d’ailleurs obligée de réduire considérablement mon nombre d’heures d’entraînement et l’an prochain, j’ai vraiment envie de me mettre à fond dans mes études. La charge de travail est de plus en plus importante, je vais avoir plusieurs stages à faire et je n’aurai plus le temps de m’entraîner. C’est donc le meilleur moment pour moi de raccrocher. J’ai vécu de très belles choses et maintenant il est temps pour moi d’entamer une nouvelle page de vie.

Propos recueillis par Charlotte Laroche
Photos Anne-Sophie Henri 

 

 

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