
À deux jours des matchs de barrages décisifs, l’impatience grandit et l’intensité monte d’un cran ! Les équipes se préparent à livrer une belle bataille pour assurer leur maintien parmi l’élite du championnat de gymnastique en France. Pour mieux comprendre les enjeux et les dynamiques de chaque équipe, nous avons rencontré les entraîneurs des huit formations en lice. Dans cette série d’interviews, plongez au coeur de leur préparation, de leurs stratégies et de leurs ressentis avant ces confrontations cruciales. Découvrez les défis qu’ils ont dû relever tout au long de la saison ainsi que les forces et les faiblesses de leurs équipes. Chaque entraîneur partage également sa vision et ses attentes, tout en évoquant la pression inhérente à ces matchs décisifs. Des entretiens exclusifs qui permettent de prendre la température à l’approche des barrages, de saisir l’intensité de l’enjeu et de ressentir la passion qui anime ces entraîneurs et leurs gymnastes.
Alors qui réussira à s’imposer et à assurer sa place en Top 12 ? La réponse samedi…
Pour ce premier numéro, Kevin Crovetto, entraîneur et gym de Monaco, revient sur la première partie de saison, sur les nombreuses difficultés rencontrées et sur l’état d’esprit avant de rencontrer Cascol, une équipe qu’il connaisse très bien. Habitués aux phases finales, les Monégasques vont cette fois-ci découvrir l’ambiance d’un match couperet, décisif pour leur avenir en Top 12.
“Je ne pensais pas qu’on puisse avoir autant de malchance sur la saison, mais c’est la gym et le sport de haut-niveau”
Spot Gym : À deux jours du match face à Oullins, comment vous sentez-vous et dans quel état d’esprit se trouve l’équipe ?
Kevin Crovetto : On se sent bien. Je ne cache pas que la saison a été un peu compliquée pour nous, il y a eu pas mal de changements par rapport à la saison dernière avec plusieurs départs, donc on a dû se restructurer et ressortir les anciens du placard (Rires). Mais on se sent bien et on y va avec un état d’esprit de conquérant pour essayer de nous maintenir face à une belle équipe de Cascol avec qui, je pense, ça va être un match serré.
Vous parlez d’anciens qui ont rempilé, qui sont-ils ?
Il y a Paul-Alexis Ranq qui avait fait son dernier passage en Top 12 en 2022 en petite finale face à Noisy-Le-Grand. Après deux ans sans s’entraîner, il est revenu pour nous donner un coup de main aux anneaux. Ensuite, il y a Romain Chapelle qui s’est remis à s’entraîner régulièrement, il vient quasiment tous les soirs à la salle. Il a un profil plus généraliste et il a tous repris sauf les arçons. Il y a aussi Loris Racca qui avait arrêté le Top 12 en 2019. Au départ, il était revenu pour nous donner un coup de main aux barres parallèles et aux arçons et puis finalement aussi sur les anneaux et la barre fixe. Enfin, Arnaud Dubien est aussi venu en renfort pour le sol et le saut. Tous ces gyms sont des gyms du club, que nous connaissons très bien, avec qui nous nous sommes entraînés pendant des années. Ils ont tous proposés de revenir spontanément cette saison pour nous aider en Top 12. Je dois avouer que voir les anciens qui se mobilisent pour sauver notre saison en Top 12 me touche beaucoup et je ne les remercierai jamais assez.
Revenons sur le parcours de l’équipe cette saison en Top 12. Comment ça s’est passé pour vous jusque-là ?
Le premier match à Lille pour nous a été compliqué. On avait vu qu’ils avaient fait une belle entame de saison face à Franconville donc on savait que ça allait être un match relevé mais on ne pensait pas qu’ils seraient aussi forts. Ils ont un niveau incroyable. On a l’habitude de les jouer mais ils ont clairement survolé la rencontre et ils nous ont mis une petite dérouillée. Ensuite, on est allé à Franconville et c’est à ce moment-là qu’on a eu nos premières galères de la saison avec nos étrangers.
C’est-à-dire ?
Cette année, on avait pris la décision de ne plus faire appel à Illia Kovtun car on ne pouvait plus assumer financièrement. Mais mi-août, nous avions six étrangers sur notre liste qui était prêts à venir nous renforcer sur certaines rencontres. Malheureusement fin août, le norvégien Sofus Heggemsnes s’est rompu le tendon d’Achille et le belge Glen Cuyle, suite à ses bons résultats aux Jeux Olympiques de Paris 2024, a fait son service militaire avant de reprendre sa carrière. Nous savions donc que cette année, ils ne pourraient pas nous rejoindre. Pour le match de Franconville, Fabrizio Valle était indisponible, Joël Plata qui était présent au match à La Madeleine, avait un empêchement d’ordre personnel, tout comme Courtney Tulloch, ce qui les empêchaient tous les deux à regret, d’être avec nous pour ce match. Le match face à Franconville a été le premier tournant de la saison. On n’a pas fait un mauvais match mais au sol, ils ont pris le dessus psychologiquement après un duel aux anneaux qu’on avait perdu pour 0,066 points, ce qui nous avait mis un coup sur la tête. Après la phase aller, on avait 14 points de retard, on savait que leur reste de la saison allait être compliqué pour nous et qu’on irait certainement aux barrages.

Comment s’est ensuite passée la phase retour ?
On a reçu Lille à la maison, on perd de peu sur le score de 22 à 26. Pour ce match, on n’avait pas de gymnastes étrangers disponibles pour la barre fixe, mais nous avions le renfort de Courtney Tulloch pour le saut et les arçons, même si les arçons ne sont pas son agrès fort. Malheureusement, la veille Lilian Piotte se fait une fissure au niveau du genou et il n’a donc pas pu faire de sortie à la barre fixe sur l’ensemble de la phase retour. Ensuite, Ethan Legeley, qui était l’un de nos gros atouts pour le saut et la barre fixe, se blesse lourdement au genou pendant l’échauffement général, juste avant le début de la rencontre. Le match a été serré jusqu’au bout, mais une nouvelle fois nous n’étions pas à 100% de nos forces vives. Et la blessure d’Ethan nous a mis un gros coup au moral.
De quoi souffre-t-il ?
Rupture des ligaments croisés avec également les deux ménisques cassés et une fracture du plateau tibial.
Difficile de débuter la rencontre après une telle blessure ?
Ce n’était pas évident, on avait l’impression que le sort s’acharnait sur nous. Romain Chapelle était le premier à passer, il a présenté un saut qu’il maîtrise depuis des années, mais malgré toute l’expérience qu’il a, il est tombé. On n’avait pas encore totalement la tête dans le match à ce moment-là. Je m’étais aussi fait les croisés au saut par le passé, donc on a toujours un traumatisme qui reste avec ce genre de blessure. Je suis passé, mais avec une petite appréhension forcément. Et puis par rapport à Ethan, pour ma part en tant qu’entraîneur, ça fait encore plus mal, car on a toujours ce petit truc de se dire qu’on n’a pas réussi à empêcher la blessure.
Comment s’est passé le dernier match face à Franconville ?
On a totalement craqué aux arçons, alors que c’est l’un de nos agrès fort. On a fait des mouvements corrects mais avec des erreurs sur la sortie ce qui nous a coûté très cher. Franconville de son côté a fait un super match et on perd 19 à 29, ce qui nous a envoyé aux barrages.
Comment vous êtes vous préparés pour ce match de barrage ?
On insiste sur le travail de précision. On a un collectif plutôt vieillissant avec moins d’horaires d’entraînement, donc on travaille sur les petits détails, sur la précision. On n’a pas encore réussi à sortir nos matchs de référence tous en même temps, c’est ce qui a péché sur la phase de poules. Donc là, on travaille avec cet objectif de tous claquer notre match parfait (Rires) ! C’est ce qui permettrait de faire la différence. Et puis de mon côté, j’avais débuté la saison en n’étant pas à 100% car je revenais d’une blessure à l’épaule, désormais ça va beaucoup mieux ce qui me permet d’être plus libéré dans ma gym.
Mentalement, comment vous sentez-vous à l’approche de la rencontre ?
On est une équipe d’expérience, on a déjà connu des matchs couperet. Habituellement, nous disputons des demi-finales ou des petites finales, on n’a encore jamais connu des matchs de barrages, mais on a l’expérience des matchs à enjeu, donc on s’est préparé normalement, prêt à donner le meilleur de nous-même.
Tu as évoqué les soucis que vous avez rencontrés tout au long de la saison avec vos renforts étrangers, qu’en est-il pour samedi ?
Nous aurons Fabrizio Valle avec nous. Il devrait être aligné sur les six agrès. On a tellement connu de malchance jusque-là que je préfère rester vigilant. Joël Plata s’est blessé au genou et ne pourra donc pas être présent et Courtney Tulloch s’est également fait mal au genou lors d’un entraînement pendant la coupe du monde de Cottbus et comme il y a les sélections britanniques pour les championnats d’Europe qui arrivent, il se préserve afin de se remettre sur pied à temps. C’est assez atypique comme situation, je ne pensais pas qu’on puisse avoir autant de malchance sur la saison, mais c’est la gym et le sport de haut-niveau.
Quels sont les agrès forts de l’équipe ?
Les arçons et la barre fixe sont des agrès sur lesquels nous sommes plutôt à l’aise en général, mais ça reste des agrès à risque où l’erreur peut vite arriver et redessiner un match.
Vos agrès plus faibles ?
Sans Ethan, suite à sa blessure au genou, nos agrès plus faibles sont le sol et le saut sur ce match.
Un mot sur votre adversaire : Cascol ? Quel regard portes-tu sur cette équipe ?
Cascol est une équipe qu’on connaît très bien, certains gyms sont des amis. Il y a beaucoup de respect et d’amitié entre nos deux équipes. C’est une belle équipe, un peu comme nous, je pense qu’on est les deux équipes les plus vieilles du Top 12, à part Antonin (Delaye), le pilier de l’équipe, un jeune gym qui est très très solide. Cascol est aussi une équipe qui est habituée à disputer ce genre de match, puisqu’ils ont déjà fait deux barrages donc ils connaissent l’enjeu, le stress. C’est une équipe redoutable mais ça va être un beau match entre amis. On s’est écrit pour se dire que le contexte n’était pas cool, on avait les boules de faire ce barrage l’un contre l’autre, parce qu’on sait que ce sera soit eux soit nous et qu’une de nos équipes descendra. Il y a beaucoup de solidarité entre nous et comme on s’est dit, l’équipe qui gagnera sera contente pour elle, mais d’un autre côté, on s’apprécie tellement qu’on sera aussi forcément triste pour l’équipe qui descendra.
En guise de conclusion de cet entretien, un mot pour finir ?
Même si la saison a eu son lot de difficultés, on a pris énormément de plaisir à se retrouver pour matcher tous ensemble. Les départs ont entraîné le retour des anciens, nous sommes tous des gyms issus du club, on se connaît tous très bien, alors même si on a pris des gifles à droite à gauche cette saison, ça n’a pas enlevé le plaisir qu’on a pris à se retrouver tous ensemble. Les voir remettre le bleu de chauffe pour dépanner, voir cet élan solidaire pour le club, ça fait chaud au coeur. On a profité de cette saison tous ensemble et on a d’ailleurs même décidé de prolonger le plaisir puisque tout le monde s’est engagé aussi sur les compétitions individuelles ce qui va nous permettre de faire les déplacements tous ensemble, comme avant, et de retrouver notre bel esprit de club familial.
Propos recueillis par Charlotte Laroche
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