Zakaria Leccheb est un gymnaste acharné, solaire et animé d’une passion sans limites pour son sport. À seulement 15 ans, il trace son chemin avec détermination, oscillant entre la France, où il s’entraîne, et le Maroc, qu’il représente sur la scène internationale. Il impressionne par son énergie, son sérieux et son ambition. De ses débuts à Mâcon Gym à ses premières compétitions internationales, son parcours est celui d’un jeune athlète qui ne cesse de repousser ses limites. Portrait d’un gymnaste au sourire communicatif et
prometteur.

Une vocation née dès l’enfance
Zakaria Leccheb découvre la gymnastique à l’âge de cinq ans, influencé par son frère aîné qui pratiquait ce sport au club de Mâcon Gym. Fasciné par les mouvements et l’ambiance des entraînements, il décide de s’y mettre lui aussi. “Quand je venais le voir j’aimais trop ce qu’il faisait et cela m’a attiré aussi. En m’entraînant j’ai vu que j’avais de bonnes capacités donc j’ai continué et ça m’a amené où je suis aujourd’hui”, confie-t-il.
Contrairement à son frère, qui n’a pas accroché avec la discipline, Zakaria se passionne immédiatement pour la gymnastique et progresse rapidement. Il a aussi été influencé par son père, grand sportif également, qui lui a donné le goût du sport. Sa mère Anissa partage qu’elle aurait voulu un fils tennisman mais il leur a fait comprendre qu’il préférait les praticables aux filets. “C’est lui qui a choisi la gym” , éclaire-t-elle. “Il posait la raquette par terre et il marchait sur les mains.”
Dès l’âge de sept ans, il se fait remarquer. Son entraîneur, Frédéric Guillot, qui l’accompagne depuis ses débuts, se souvient d’un jeune garçon “extrêmement motivé, très appliqué aux entraînements et particulièrement attentif aux conseils des adultes, ce qui est rare pour un enfant de son âge”. Cette assiduité lui permet alors de remporter ses premières compétitions départementales et régionales. À ce moment-là, un choix se dessine : faire de la gymnastique un véritable projet. “Mon entraîneur m’a dit : on peut essayer de faire quelque chose, donc ça voudrait dire qu’il faut que tu viennes tous les jours”. Zakaria accepte le défi et intensifie son entraînement, passant progressivement de 10 à 22 heures hebdomadaires.
Un gymnaste rigoureux, appliqué et persévérant
Il est décrit unanimement par son entourage comme un gymnaste acharné, sérieux et rigoureux. Son entraîneur français met en avant “sa persévérance et son attitude de vainqueur, qui se sont affirmées au fil des années”. Toutefois, il possède un caractère bien trempé et peut parfois se montrer “grincheux lorsqu’il rencontre des difficultés à réussir certains exercices”. Son amour du challenge le pousse également à toujours vouloir apprendre et repousser ses limites.
Ses points forts résident dans sa technique et sa capacité d’adaptation. Il se distingue particulièrement aux arçons, un agrès qu’il apprécie et envisage de spécialiser, bien qu’il reste un gymnaste généraliste. “Je suis très fort aux arçons, sans vouloir me vanter (rires)”, plaisante-t-il. Un attrait pour les arçons qui n’est pas nouveau pour Zakaria. “Il m’avait envoyé une vidéo s’entraînant chez lui, au domicile de ses parents” , se souvient Frédéric Guillot. “On le voyait travailler des cercles sur l’accoudoir du canapé ! Il devait avoir neuf ou dix ans à l’époque.”
Cependant, il souligne également que son principal point faible reste sa préparation physique et ses repères en acrobatie. Ce dernier met également un point d’honneur sur son mental. “Il a besoin d’être rassuré et de se sentir en confiance pour aborder sereinement les compétitions.”
Zakaria se prépare méthodiquement. Chaque matin, il suit un programme personnalisé de renforcement musculaire et d’endurance incluant de la course à pied. “Vu qu’on a un grand parc à côté de chez nous, j’ai un programme de course pour l’endurance, avec un peu de travail sur les tractions et je ramène quelques haltères pour faire du travail sur les soleils aux anneaux. Je fais ce qu’on n’a pas trop le temps de faire à la salle le soir. J’en ai pour deux heures à peu près”, explique-t-il. Une discipline qui témoigne de son sérieux et de son engagement.
Le choix du Maroc et ses débuts en compétition internationale
Alors qu’il aurait pu concourir sous les couleurs de la France, Zakaria a fait le choix de représenter le Maroc, pays d’origine de sa famille. Ce choix s’est fait naturellement lorsqu’il a été repéré par la Fédération Royale Marocaine de Gymnastique via les réseaux sociaux. “Une fois par hasard sur les réseaux sociaux, ils m’ont vu, puis ils ont contacté ma mère et lui ont proposé que je vienne faire un stage au gymnase lorsqu’on viendrait au Maroc”, raconte-t-il. Après plusieurs stages et une intégration réussie, il obtient la double nationalité en août 2024 et rejoint officiellement l’équipe nationale marocaine.
Son choix de représenter le Maroc ne découle pas d’un manque de sélection en équipe de France. “Il n’a jamais été en sélection pour la France, mais ce n’est pas pour ça qu’il a rejoint le Maroc”, précise Anissa. C’est la fédération marocaine qui l’a contacté, et il a saisi cette opportunité avec enthousiasme, trouvant dans ce projet une source de fierté et d’épanouissement.

Représenter le Maroc est pour lui une immense fierté. “Il faut que je rende honneur au pays, je n’ai pas le droit de ne pas réussir”, dit-il avec détermination. Il jongle ainsi entre ses entraînements en France et les consignes techniques de ses entraîneurs marocains. Ali Boumadiane, membre de la direction technique nationale et entraîneur au Maroc, insiste sur le potentiel du jeune gymnaste : “Zakaria est talentueux, courageux et compétitif. Il aime perfectionner son niveau technique.”
Sa mère parle d’un garçon sociable et ouvert qui va à la discussion avec les autres gymnastes marocains. Des traits de caractère qui ont aidé son intégration dans l’équipe de la Force Armée de Rabat (FAR), où il s’entraîne, mais également l’apprentissage de l’arabe marocain pour faciliter la communication. Elle partage aussi une discussion avec Hamza Hossaini, membre de l’équipe Top 12 de Noisy-le-Grand, qui aurait influencé son choix, “Il l’a un petit peu aidé avec une phrase qu’il aurait pu dire un jour, “pourquoi tu pars pas ?””. Ce dernier fait partie de l’équipe du Maghreb Sportif de Rabat (MSR).
Aujourd’hui l’intermédiaire entre la France et le Maroc se fait de manière assez fluide mais nécessite certains ajustements explique Frédéric Guillot : “Nous devons composer avec les calendriers sportifs marocains et français. Cette saison, Zakaria a dû commencer plus tôt que les autres gymnastes, en mettant davantage l’accent sur la répétition des éléments et des mouvements, parfois au détriment de sa préparation physique.”
Sa première grande compétition internationale, le ComeGym fin décembre, fut une expérience marquante pour lui. Stressé par l’enjeu et impressionné par le niveau de ses adversaires, il aborde l’événement avec humilité. “Sur place j’ai vu que j’étais le plus jeune de la compétition. Je suis né en 2009 et il y avait des gymnastes nés en 2006 face à moi.” Finalement, il parvient à atteindre la finale à la barre fixe et décroche une belle cinquième place. Une expérience qui le motive encore plus : “Ma mère était sur place en Tunisie, donc je lui ai demandé de filmer les autres surtout les Italiens pour voir leur niveau et les éléments qu’ils font pour m’en inspirer pour mes futurs mouvements.”
Un mental forgé par son entourage
À un moment clé de son parcours, Zakaria a passé quatre années, de 2020 à 2024, au Pôle Espoir de Montceau-les-Mines, une expérience qui s’est avérée formatrice mais difficile moralement. Éloigné de sa famille et de son club d’origine, il a eu du mal à s’adapter à cette nouvelle dynamique et aux aller-retours constants. Finalement, son retour à Mâcon s’est imposé comme une évidence, tant sur le plan personnel que pratique. “Son orientation professionnelle était plus facile à Mâcon qu’à Montceau“, explique également sa mère.
Loin d’être un parcours classique, l’ascension de Zakaria a été marquée par des défis. Issu d’un quartier où la gymnastique est perçue comme un sport féminin, il a souvent dû justifier son choix. “Il a entendu ça toute sa vie, tout le monde lui a dit : “Mais pourquoi tu ne fais pas du foot ?” Et franchement, il leur a tenu tête et j’ai trouvé qu’il avait vraiment du caractère, parce qu’il est passionné de gym et il disait “Non, je veux faire de la gym et puis c’est tout !” raconte sa mère, admirative de sa détermination.

Son entourage joue un rôle clé dans son équilibre mental. Sa mère, son premier soutien, est toujours présente lors de ses compétitions et l’aide à gérer son stress. “Elle me connait par coeur, et moi je suis quelqu’un d’assez stressé et elle arrive à me dire “ça va le faire t’inquiète pas.”
Son entraîneur, Frédéric Guillot insiste également sur ce besoin de confiance : “Zakaria a besoin d’être rassuré et de se sentir en confiance pour aborder sereinement les compétitions.” Il ajoute également devoir travailler avec lui sur son mental, pour le rassurer et faire redescendre la pression dans les moments clés. “Ma relation avec Zakaria est franche et réciproque. Je prends souvent le temps de discuter avec lui pour maintenir son niveau de motivation au plus haut, le rassurer sur ses peurs” , éclaire-t-il.
Des ambitions bien ancrées
À court terme, Zakaria vise les championnats africains, les championnats de France élite ainsi que les grandes compétitions marocaines. Ali Boumadiane explique que Zakaria doit travailler pour adapter ses mouvements au nouveau code FIG (Fédération Internationale de Gymnastique) pour les prochaines compétitions, mais ne s’en inquiète pas. “Pour nous ce travail est programmé lors du prochain regroupement de l’équipe nationale qui aura lieu en avril prochain à Casablanca.” Il confirme que la Fédération suit Zakaria avec attention à l’approche des prochaines compétitions internationales : le Championnat méditerranéen junior (ComeGym) qui aura lieu en octobre prochain à Marrakech, le Championnat d’Afrique junior en 2026 et les Jeux Olympiques de la Jeunesse en 2027. Le tout bien évidemment encadré avec “un planning de préparation et des tests de sélection au niveau national” ajoute Ali Boumadiane.
Zakaria puise son inspiration chez des gymnastes de renom, notamment Anthony Mansard, dont il admire le style et la maîtrise. “Quand je regarde sa gym, je suis toujours impressionné”, confie-t-il. Il évoque également Benjamin Osberger, une référence pour lui aux arçons, son agrès favori.
Un avenir prometteur
Sur le long terme, il préfère ne pas trop se projeter concernant ses objectifs. “On verra comment ça se présente. Je préfère vivre au jour le jour et je ne veux pas trop me programmer pour vivre l’instant présent. Comme ça il n’y aura pas de regret.” Mais son entourage sait qu’il a un rêve en tête : les Jeux Olympiques. “Il ne vous l’a pas dit par humilité mais je sais que c’est son rêve”, confie sa mère.
En parallèle de sa carrière de gymnaste, Zakaria se prépare déjà à l’avenir. Passionné par l’entraînement et la transmission du savoir, il suit une formation en alternance avec son club Mâcon Gym pour obtenir son diplôme d’entraîneur. Il prend un plaisir immense à coacher les plus jeunes : “Quand je vois les petits réussir à faire un nouvel élément et qu’ils sourient j’ai l’impression de me voir dix ans en arrière.”
À seulement 15 ans, Zakaria Leccheb a déjà prouvé qu’il avait les qualités d’un grand gymnaste. Travailleur, perfectionniste et animé par une passion sans faille, il construit son chemin avec patience et détermination.