À la suite des Jeux Olympiques de Paris 2024, Mélanie De Jesus Dos Santos s’était faite discrète. Marquée par une compétition difficile, sans finale par équipe pour la France ni qualification individuelle pour elle, la gymnaste avait choisi de prendre du recul. Plusieurs mois plus tard, elle s’exprime pour la première fois dans deux entretiens exclusifs accordés à L’Équipe et Olympics.com. L’occasion pour elle de revenir sur cette période post-olympique, d’évoquer les raisons de son silence, sa reconstruction, et de faire le point sur ses réflexions concernant la suite de sa carrière.

Mélanie De Jesus Dos Santos et Marine Boyer. Photo IMAGO / Schreyer

On l’avait quittée en larmes, triste, anéantie, lors des qualifications des Jeux Olympiques cet été à Paris. La France n’avait pas réussi à décrocher une place en finale par équipes. Mélanie De Jesus Dos Santos, elle, n’avait pas réussi à se qualifier pour les finales individuelles. Une douche froide et acide pour des gymnastes qui, chez elles, dans l’antre bouillante de Paris Bercy, méritaient tellement mieux.

Car les Jeux Olympiques, en France, à Paris, aurait dû être une fête. Un rêve éveillé. L’accomplissement d’années de travail permettant aux gymnastes françaises de se sublimer devant des milliers de personnes. De faire parler leur talent. De faire rayonner la gymnastique auprès des passionnés, bien sûr, mais aussi du public, dans sa globalité. La réalité sera finalement toute autre. Tel un cauchemar sans fin, dont on a dû mal à se réveiller et qui laisse des traces. Une expérience traumatisante pour cette équipe de France de gymnastique qui, oui, méritait tellement mieux. Méritait son heure de gloire. Sa standing ovation. Méritait la Une des journaux… pour le meilleur… Elles, qui font rêver, au quotidien, des milliers de passionnés.

La tournée avec Simone Biles, comme première étape de guérison 
Après les Jeux, Mélanie est retournée chez elle, en Martinique. Son havre de paix. Là où elle se sent bien, où la vie est plus douce, plus calme et où elle est entourée des siens. Ses proches qu’elle a dû quitter jeune, à l’âge de 12 ans, pour rejoindre la métropole et le pôle de Saint-Etienne pour poursuivre son rêve de haut-niveau. Un retour aux sources salvateur avant d’entamer le Gold Over America Tour, aux côtés de Simone Biles, sa partenaire d’entraînement pendant deux ans au sein du célèbre World Champions Center à Houston. Une parenthèse pailletée, entourée de gymnastes de nationalités différentes, qui a permis à la Française de réparer une partie de son coeur meurtri. De retrouver le sourire. De s’épanouir à nouveau sur un praticable, une poutre, des barres asymétriques.

La tournée est la meilleure chose qui aurait pu arriver après les Jeux“, explique-t-elle à Olympics. “Je crois vraiment que s’il n’y avait pas eu cette tournée après les Jeux olympiques, il aurait été encore plus difficile de rebondir. Me connaissant, si je n’avais pas eu cette tournée, je me serais renfermée sur moi-même. Je serais restée chez moi à ne rien faire“.

Un tournée mythique de plus de 30 dates dans différentes villes américaines. L’occasion pour la gymnaste de 25 ans de pratiquer la gymnastique autrement. La gym sans pression de résultats. Sans pression de performance. Sans pression tout court. La gym passion. La gym plaisir. De quoi la réconcilier avec ce sport qui l’accompagne depuis tant d’années, et d’atténuer toutes les émotions négatives qui émanent de toute la période olympique.

Guérir et rebondir 
Si la gymnaste de 25 ans avait retrouvé le sourire sur la tournée de Simone Biles, elle était toutefois restée silencieuse dans les médias. Jusqu’à cette semaine, où elle a donc accordé deux interviews : l’une à Céline Nony, journaliste à L’Equipe, l’autre à Scott Bergman, d’Olympics.com. Etait venu le temps où elle était prête à parler. À se confier.

Après les Jeux, la quadruple championne d’Europe individuelle et médaillée de bronze mondiale a eu besoin de prendre de la distance, “par rapport à son sport, par rapport aux attentes, par rapport à tout” , écrit Olympics.

Aujourd’hui, dans un long entretien à L’Equipe, elle confie être “passée à autre chose“, même si certaines blessures ne sont pas encore totalement refermées. “C’est toujours dur d’en parler” , avoue-t-elle toutefois. Avec certaines séquelles qui restent. “Je suis récemment passée devant Bercy en voiture, et je n’étais pas bien. Ça prouve à quel point ce traumatisme restera à vie. Mais ça se travaille, ça guérira.” Pas bien, cette même sensation qu’elle avait ressenti quelques mois plus tôt dans le bus qui l’emmenait à Bercy, juste avant les qualifications, confiant alors à L’Equipe avoir fait une crise d’angoisse.

Dix mois après la fin des Jeux de Paris 2024, Mélanie n’a encore pas remis les maniques, expliquant à L’Equipe n’avoir “pas mis les pieds dans un gymnase depuis les Jeux” , à part pour “accompagner Lorette (Charpy)”, venue lui rendre visite il y a quelques mois. Pour le moment, la passionnée de mode préfère marcher, courir, nager. Et quand on la questionne sur l’après, il lui est difficile de répondre. Pas parce qu’elle ne veut pas, plutôt parce qu’elle ne le peut pas, elle-même ne sachant pas encore de quoi son avenir gymnique sera fait. “Je n’ai pas encore de réponse” , confie-t-elle au quotidien sportif français.

Mélanie De Jesus Dos Santos en Martinique. Capture d’écran Instagram

Mais si elle ne sait pas de quoi l’avenir sera fait, elle confie malgré tout à Olympics qu’elle ne veut pas terminer sur cette expérience olympique parisienne. “Je ne pense pas être prête à dire que je mets fin à ma carrière, mais je ne suis pas prête non plus à dire officiellement que je reviendrai pour telle ou telle compétition, à telle ou telle date. je vais que je ne vais pas terminer sur ce qu’il s’est passé aux Jeux, car j’ai fait beaucoup trop de sacrifices pour en rester là. Je ne terminerai pas sur ce qui s’est passé aux Jeux.”

Un retour à la gym, qui, s’il se confirme, se ferait cependant différemment. “Si jamais je redeviens gymnaste, j’ai envie de le faire avec ma vraie personnalité, pas cette personnalité qu’on ma construite” explique-t-elle dans L‘Equipe. Cette pratique de la gymnastique qu’elle a découverte à son arrivée au World Champions Center où elle a été entraînée par Cécile et Laurent Landi, après les Jeux Olympiques de Tokyo, et qui lui a permis de faire de la gym pour elle, et non pour les autres. “Pour moi, la chose la plus importante, c’est de trouver le bon environnement, des gens avec qui je me sens bien” , précise-t-elle à Olympics. “J’ai connu cela avec Cécile et Laurent aux Etats-Unis, et je veux retrouver ce sentiment que j’ai connu.”

Rebondir en NCAA ?
Approchée par Cécile Landi pour rejoindre la NCAA et l’université de Géorgie, où cette dernière officie désormais en tant qu’entraîneuse, Mélanie De Jesus Dos Santos a pour le moment décliné la proposition. “J‘avais tellement de pression dans les compétitions par équipe – apporter ma gymnastique à une équipe, obtenir de bons résultats pour une équipe – qu’il me semblait impossible de retourner dans un cadre d’équipe parce que c’est un sujet sensible depuis longtemps. Cela m’a vraiment angoissée” , avoue-t-elle sur Olympics.

Mais si pour le moment, elle a décliné la proposition, rien n’indique qu’elle reste campée sur cette première décision. “Je suis quelqu’un qui fonctionne à l’instinct, et parfois, quand je sens que je dois aller quelque part, je pars sans me poser de questions !” , peut-on lire sur Olympics. A l’image de ce moment où elle a quitté le pôle de Saint-Etienne, après les Jeux Olympiques de Tokyo, pour rejoindre le World Champions Center à un moment où elle avait besoin de renouveau. De se retrouver. Et de retrouver le plaisir de la gym qu’elle commençait à perdre.

Mélanie De Jesus Dos Santos entourée de ses entraîneurs Laurent et Cécile Landi. Photo Spot Gym

Mais pour l’heure, Mélanie De Jesus Dos Santos préfère prendre le temps de se remettre sur pied. De prendre soin d’elle. Physiquement et mentalement. Alors elle se ressource sur ses terres, en Martinique, auprès des siens, continuant de soigner ses blessures physiques et mentales. Quant à l’après, seul l’avenir le dira… et lorsqu’elle se sentira prête, elle entamera un nouveau départ… en tant que gymnaste ou non… avec cette volonté première de s’écouter et d’être la Mélanie qu’elle a envie d’être et plus celle que les autres ont envie qu’elle soit.



Retrouvez l’intégralité de l’interview de Mélanie De Jesus Dos Santos dans L’Équipe en cliquant ici 



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