Médaillé d’argent à la barre fixe et de bronze en équipes et au saut à Sofia, aux championnats d’Europe junior en 2014, finaliste au saut aux championnats d’Europe senior en 2016, champion de France au concours général et à la barre fixe et vice-champion de France au saut et sol en 2017, finaliste au saut toujours, son agrès de prédilection, aux championnats d’Europe et du monde la même année et médaillé à plusieurs reprises en coupe du monde, Zachari Hrimèche était l’un des meilleurs gymnastes français de sa génération. Il était de presque toutes les sélections et était parvenu à se frayer un chemin au milieu des plus grands malgré son jeune âge. Des années prolifiques qui ont ensuite laissé place à une traversée du désert avec des années difficiles. Dans l’ombre et loin de l’agitation médiatique, le sociétaire du club de Vélizy, formé à Bourny puis La Nantaise, a alors pris le temps de se recentrer sur lui-même. De remettre de l’ordre dans ses idées, sa tête, sa gym jusqu’à retrouver cet équilibre dont il avait besoin pour performer à nouveau. Ce week-end à Saint-Brieuc lors des championnats de France élite, il a remis le pied à l’étrier retrouvant les sensations perdues et le chemin des podiums avec un titre de vice-champion de France au saut. Le début d’une nouvelle longue série ?

Spot Gym : Zachari, quel bilan faites-vous de vos championnats de France élite ?
Zachari Hrimèche : Je suis mitigé par rapport à ma compétition, notamment par rapport au concours général du vendredi. Il y a des choses très positives notamment au saut de cheval où j’ai remis le tsukara double arrière carpé, un saut de classe mondiale, que je n’avais plus présenté en compétition depuis 2018, donc ça commençait à remonter. De le refaire et le réussir compétition, c’est une grosse étape et je suis vraiment content. Dans le cadre de la préparation pour les championnats du monde et les Jeux Olympiques, c’est également très positif. Après, au niveau du concours général, je suis déçu car à la barre fixe je fais deux chutes et un contre-élan, je fais de la faute aussi donc la note ne sort pas du tout ce qui me fait dégringoler au classement général. Aux anneaux je chute également sur un élément que normalement je réussis tout le temps donc je suis déçu mais sinon le reste était plutôt correct. Il y a du positif et je me rends compte que je ne suis pas loin de pouvoir sortir à nouveau un bon total points au concours général. Et puis la compétition s’est terminée par une belle médaille d’argent en finale saut donc je suis content.
Bilan mitigé mais avec tout de même du positif donc ?
Oui… je me sens revenir et ça fait du bien. J’en avais besoin. Mentalement et physiquement, je sens que ça revient et je suis content. J’ai vécu une période un peu difficile lorsque je suis sorti des radars et ce n’était pas évident. J’avais besoin de prendre du recul pour me retrouver. Je m’entraînais moins, dans la tête c’était plus dur et du coup physiquement aussi c’était moins bien. Car forcément, quand dans la tête ça ne va pas, le corps a du mal à suivre aussi. Là, ça commence à faire un petit moment que je reprends un bon rythme à l’entraînement, je me sens mieux, alors même si ça ne s’exprime pas encore pleinement sur les compétitions, je sens que je suis entré dans une toute autre dynamique. Et avec l’expérience que j’ai pu acquérir par le passé, je sens que ça peut revenir rapidement.
Reprendre du plaisir en compétition ça fait du bien ?
Honnêtement oui, ça fait beaucoup de bien. Avant la compétition, j’étais stressé et ça faisait longtemps que je n’avais pas ressenti ce stress. C’était du bon stress. Pas le stress où tu as l’impression que tu subis ta compétition. J’avais envie d’être là, je me sentais prêt et j’avais envie de montrer ce que je savais faire. Ça faisait longtemps que je ne m’étais pas senti prêt comme j’ai pu l’être aujourd’hui (vendredi, sic) et j’avais vraiment envie de vivre le moment à fond. Alors certes ça n’a pas payé au général mais c’est sur la bonne voie.
Ces sensations retrouvées vous redonnent la gnaque que vous aviez fini par perdre à un moment ?
Oui clairement ! Ça motive pour les entraînements. Ça aussi, ça faisait longtemps que je ne ressentais plus cette envie de retourner tout de suite à l’entraînement pour travailler. La compétition, ça me donnait tout le temps faim avant. J’avais envie de travailler encore plus, travailler de nouveaux éléments, travailler ce qui n’avait pas été pour revenir encore plus fort. C’était des sensations que je ressentais tout le temps avant et que j’avais fini par perdre. Là je les ai retrouvées et ça fait plaisir. Petit à petit, tout se remet bien.

En parallèle de la gymnastique, vous poursuivez également vos études supérieures. En quoi consiste ce double projet ?
J’étudie à Sciences Po. Il y a deux ans, j’ai intégré la formation des sportifs de haut-niveau à Sciences Po, c’est une formation Bac+3 avec des horaires aménagés et je m’épanouis énormément dans mes études. Je suis hyper intéressé par tout ce que j’apprends et ça me permets de voir autre chose que la gym. Ce double projet m’apporte un équilibre dont j’avais besoin. Et c’est une formation que je fais par passion. J’ai toujours aimé lire le journal, le Monde diplomatique notamment, je me suis toujours intéressé à la géopolitique et toutes les matières que j’étudie me passionnent. L’histoire, les relations internationales, l’économie, je kiffe apprendre !
Cette formation qui s’adresse aux sportifs de haut-niveau permet de s’adapter à votre rythme afin de vous permettre de vous concentrer sur votre carrière de sportif de haut-niveau ?
Oui, la formation est vraiment bien adaptée. On n’a pas de pression sur le rythme à avoir. On rend les devoirs en fonction de notre calendrier sportif, les professeurs sont toujours extrêmement disponibles, on choisit les matières qu’on veut passer, tout est vraiment fait pour qu’on puisse aller à notre rythme et ainsi nous concentrer sur notre projet sportif. Le corps professoral sait que notre carrière sportive est notre priorité numéro un donc ils aménagent tout pour qu’on puisse s’entraîner et étudier dans de très bonnes conditions. On peut valider notre diplôme en 3-4 ou 5 ans, ce n’est pas grave, le principal est d’aller au bout et de valider nos acquis tout en poursuivant notre carrière sereinement.
Quel est votre rythme d’études de votre côté ?
Je vais en cours une matinée par semaine et sinon le reste du temps je suis les cours en visio et je fais beaucoup de travail personnel entre deux entraînements sur la pause du midi ou le soir.
On vous sent heureux ?
Je suis bien oui. Je me sens bien et j’ai trouvé mon équilibre. Le temps où j’étais en retrait, j’ai pris le temps de réfléchir, de mettre les choses à plat. J’ai eu besoin de me mettre en retrait pour me retrouver. Depuis petit, je suis à fond dans la gym, j’avais de gros objectifs, je ne réfléchissais pas trop et comme tout se passait bien, tout roulait. J’enchaînais les compétitions, les sélections, les bons résultats, j’avais beaucoup d’objectifs et tout tournait autour de la gym. Mais je ne m’en rendais pas forcément compte à ce moment-là. Et quand j’ai commencé à avoir des premières déceptions en gym, certaines décisions que j’ai vécues comme des injustices, il m’a fallu du temps pour les encaisser. Je suis parti m’entraîner en Angleterre, ça m’a fait beaucoup de bien, mais ensuite il y a eu le Covid et les choses se sont compliquées. Je ne savais plus trop où j’en étais et j’ai pris conscience de certaines choses. Je me suis rendu compte qu’à part la gym, je n’avais rien à côté et qu’il me manquait quelque chose. Avec du recul, je me dis que mes déceptions m’ont permis de mettre à plat certaines choses et de savoir exactement ce que je voulais faire, ce que je ne voulais plus faire et de trouver cet équilibre qui me manquait.
Un équilibre dont vous aviez besoin pour relancer votre carrière et performer à nouveau…
Oui c’est ce dont j’avais besoin. Cet équilibre est important pour performer. Je me suis marié il y a peu, je suis heureux, je suis épanoui dans mes cours, dans ma gym aussi et ça fait du bien de se sentir bien. La gym revient très bien et maintenant je m’entraîne à fond avec cette envie de décrocher à nouveau de belles sélections.
Propos recueillis par Charlotte Laroche





