Dans l’ombre des agrès, un allié inattendu apaise les gymnastes américains : Beacon, un golden retriever, premier chien thérapeutique officiel d’USA Gymnastics. Sa mission ? Faire retomber la pression et ramener le sourire.
Par Charlotte Laroche et Mazarine Mayangha

Dans les couloirs des compétitions, à l’abri de l’agitation, Beacon, golden retriever et premier chien thérapeutique officiel d’USA Gymnastics, attire les regards et déclenche les sourires. Surnommé “Goodest Boy”, il a trouvé sa place au cœur de l’écosystème des équipes américaines en offrant aux athlètes un véritable sas de décompression en instaurant un rituel de calme avant et après l’épreuve. Une bulle de douceur où la pression retombe.
Les bienfaits du contact avec un chien sont aujourd’hui largement reconnus, au point d’avoir été intégrés jusque dans la gymnastique américaine. Car caresser un chien n’est pas qu’un geste affectueux, c’est un outil de bien-être scientifiquement validé. “Caresser un chien diminue l’anxiété, il offre un contact rassurant, apporte du calme, permet de faire redescendre la pression tout en faisant baisser la tension artérielle“, explique Aude Caussignac, éducatrice comportementaliste canin dans le sud-ouest. “Les chiens sont des éponges émotionnelles, l’énergie qu’on dégage va être déchargée sur eux. Ils nous apaisent par leur présence et à leur contact, par une simple caresse, une simple interaction avec eux, ça permet de relâcher les tensions, de retrouver un équilibre émotionnel et de créer un climat de confiance.” Autant de leviers qui se montrent utiles à la performance, et dont les bienfaits sont longtemps restés insoupçonnés.
C’est donc aux États-Unis que l’initiative a vu le jour dans le monde de la gymnastique. À l’origine, une femme : Tracey Callahan Molnar, ancienne gymnaste et juge pour USA Gymnastics. Un jour, une idée, novatrice, lui vient à l’esprit. Et si Beacon, son chien de thérapie, pouvait aussi aider les athlètes en bord de plateau ? Elle soumet alors la proposition à Li Li Leung, présidente d’USA Gymnastics, également défenseuse des animaux et partisane de la thérapie assistée par l’animal, et elle reçoit un feu vert immédiat. Beacon devient un membre à part entière de l’équipe américaine, avec un rôle clair : celui de mascotte d’USA Gymnastics en charge du bien-être des athlètes. Les bases sont posées.
Une présence sur les grands rendez-vous
La première invitation officielle de chiens de thérapie dans une compétition de gymnastique remonte aux Championnats américains de gymnastique rythmique de 2023, à Indianapolis. Pour cette grande première, Tracey Callahan Molnar a dû constituer une véritable équipe de chiens certifiés : Beacon ne pouvait pas, à lui seul, répondre aux besoins de toutes les athlètes. Un défi logistique important, alourdi par diverses contraintes réglementaires, notamment vaccinales.
Depuis, Beacon est devenu un habitué des grands événements. Plus tard dans l’année, il a fallu mobiliser pas moins de 24 chiens pour les championnats nationaux de gymnastique artistique, tant la demande était forte. L’initiative a d’ailleurs suscité un engouement inédit avec près de soixante candidatures d’animaux de thérapie reçues. Aux Olympic Trials 2024, Beacon s’est ensuite déplacé à Minneapolis avec onze autres chiens afin de soutenir la trentaine de gymnastes qui concourraient ce jour-là.
Atout majeur de la préparation, il n’a finalement pas pu suivre le collectif américain jusqu’à Paris pour les Jeux Olympiques, la logistique rendant le voyage impossible. Mais son absence aux JO n’a fait que renforcer son rôle lors des compétitions suivantes, où il a multiplié les interventions à l’échelle nationale, confirmant son importance auprès des athlètes.
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Un ancrage émotionnel certifié
S’il est la figure emblématique de cette initiative, Beacon n’est pourtant pas le seul chien à intervenir. Mais c’est bien lui la véritable vedette. Toujours guidé par sa “handler”, Tracey Callahan Molnar, il intervient à la demande, principalement en zone d’échauffement, dans les coulisses ou en bord de plateau pendant l’entraînement podium, tant que les gymnastes ne sont pas sur les agrès. Une démarche qui s’inscrit pleinement dans la politique de soutien à la santé mentale mise en place par USA Gymnastics. Au même titre qu’un kiné, un psychologue ou un préparateur mental, Beacon est désormais considéré comme un outil concret pour aider les athlètes à faire redescendre la pression.
Mais tous les chiens ne sont pas adaptés à ce rôle. “Les labradors, les goldens, les bouviers ou encore des chiens croisés s’y prêtent davantage“, observe Aude Caussignac. “Mais c’est surtout une question de tempérament : des chiens trop vifs ou craintifs ne conviendront pas.”
Et si on parle du bien-être des athlètes, il faut aussi penser à celui des animaux. Car pour qu’un chien thérapeutique remplisse pleinement son rôle en compétition, son bien-être doit rester prioritaire. “On privilégie des sessions courtes entrecoupées de pauses régulières“, insiste Aude Caussignac. “Et surtout, il faut l’habituer très tôt aux zones de forte affluence : c’est essentiel afin qu’il puisse être à l’aise avec le bruit, le monde, les odeurs, les différentes sollicitations, etc.” Elle rappelle également que dès les premiers signes de stress, comme des bâillements répétés, les oreilles plaquées ou la queue basse, “on lui offre du calme et on le met au repos.”
Certifié par l’organisme Pet Partners, Beacon est rapidement devenu un véritable repère émotionnel pour les athlètes. Sa présence instaure un rituel de calme, un sas de décompression qui permet de se recentrer, de relâcher la pression et de créer une bulle de récupération. Il contribue à détendre l’atmosphère, et à faire naître des sourires, tout simplement. Une approche innovante de la santé mentale des sportifs qui reste encore trop méconnue et insuffisamment développée à l’échelle mondiale, mais les mentalités évoluent, et Beacon en est, à sa manière, l’un des plus beaux ambassadeurs.
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