Ils sont méconnus du grand public mais partagent tous la même passion pour la gymnastique. Portrait de club : la rubrique qui part à la rencontre des passionné.es qui évoluent hors des structures de haut-niveau.

Entraineur et ancien gymnaste, Lucas Delasalle a marqué le club d’Aulnay-sous-Bois en accompagnant dans leur progression les frères Leeroy et Tyler Traoré-Malatre, deux étoiles montantes de la gymnastique française. Après huit années passées au bord et sur les praticables, il a décidé de tourner la page en allant s’installer en Suisse. Mais s’il n’entraine plus à l’heure actuelle, il reste attaché à ce sport qui lui a tant apporté. Régulièrement bénévole lors de grands événements gymniques, dont les Jeux Olympiques, il couvre actuellement une nouvelle mission au Moreau Gym Sport Paris. Interview découverte.

Spot Gym : Lucas, pour commencer, revenons sur ton parcours avant ton arrivée au club d’Aulnay-sous-Bois ? À quand remontent tes débuts en gym ? Et de quelle manière ? 
Lucas Delasalle : Je faisais du tennis au départ et je ne connaissais pas du tout la gymnastique. Je pensais que c’était uniquement un sport de filles. Un jour on a fait de la gym au collège, et une de mes amies en faisait. On m’a encouragé à tester un cours en club parce que j’arrivais à faire certaines figures assez rapidement. C’est ce que je fais. On m’a accepté dans un club des Pays-de-la-Loire sauf que j’étais déjà grand donc c’était compliqué de me mettre en compétition directement, donc je me suis dit que j’allais faire une année en loisirs et au final on m’a mis en compétition.
Ensuite j’ai voulu passer le BPJEPS et j’ai cherché un club qui pourrait m’embaucher. L’entraîneur du club dans lequel j’étais licencié partait donc j’y suis resté deux ans avant d’aller à Paris.

Tu viens de décider de quitter le club d’Aulnay-sous-Bois, qu’est-ce qui a motivé ta décision ? 
Il y a plusieurs choses qui étaient compliquées, notamment des départs de collègues et une ambiance qui ne me convenait plus. Et j’avais également besoin de changer d’air, de m’éloigner un peu de la gym.

Qu’est-ce que les quatre années que tu as passées à Aulnay t’ont apporté aussi bien humainement que professionnellement ? 
J’ai beaucoup plus confiance en moi, parce que je n’avais pas un gros passif gymnique car j’ai commencé tard, à 15 ans, aujourd’hui j’en ai 24. J’ai pris beaucoup d’expérience en m’occupant des gymnastes qui sortaient de babygym pour aller vers la performance donc c’est moi qui leur préparait la base. Et suite aux départs du club, c’est moi qui ai repris le sport-étude aussi, j’ai eu les cm1-cm2 avec qui ont est allé aux Championnats de France. J’ai beaucoup aimé matcher avec cette équipe. Ça m’a aussi donné plein d’opportunités, j’ai souvent été bénévole pour les Championnats de France Élite, là je suis bénévole sur Bercy où je suis prévu dans le médical surtout.

Quels sont tes projets désormais ?
Je pars m’installer en Suisse ! Depuis tout petit j’ai un besoin de vivre à la montagne, même quand je suis arrivé à Aulnay je leur ai dit que je n’y resterai pas toute ma vie à cause de ce besoin. Au départ je comptais partir pour être entraineur là-bas mais finalement j’ai décidé d’arrêter… et là mon objectif est d’ouvrir un café, donc rien à voir !

Pourquoi un café ? 
Mon frère a une boulangerie/salon de thé et à chaque fois pendant les vacances j’allais l’aider. Et on lui a fait une proposition de reprendre un café et ça m’a intéressé donc pourquoi pas !

Et la gym ? 
J’ai repris la gym car on m’a proposé. C’est la gym suisse avec les agrès un peu différents, je vais reprendre là-dessus pour ne pas complètement arrêter la gym.

Pourquoi ce changement de cap ?
Je pense que j’avais besoin de m’éloigner de la gym parce que je faisais que ça. Mais j’ai fait les Camps Gym Normandie cet été qui m’ont redonné goût à la gym. J’y ai été directeur en salle la première semaine et coach la deuxième, je gérais tout ce qui était entrainement et animation.

Qu’est-ce que tu retiens de tes années passées à Aulnay ? 
J’y ai été quatre ans, quand j’y suis arrivé on m’a super bien accueilli. J’ai rencontré des gymnastes d’un niveau incroyable et j’ai pu y acquérir beaucoup d’expérience. Le fait d’avoir été coach en région parisienne m’a donné pas mal d’opportunités, dont celle d’être bénévole sur les JO.

Pendant ton passage à Aulnay, tu as pu voir les frères Traoré-Malatre, qu’est-ce qui t’as marqué dans leur progression ? 
Déjà ce sont deux gamins super chouettes, vraiment polis et tellement à l’écoute. Leeroy c’est celui que j’ai le moins côtoyé car il n’est pas resté longtemps après mon arrivée, mais j’ai été impressionné par sa détermination et sa précision dans sa préparation. Tyler je l’ai un peu plus côtoyé et j’étais aussi sur les entrainements avec lui. C’est quelqu’un qui ne s’arrête jamais ! Habituellement on doit dire aux gymnastes de passer plus sauf que lui on doit lui dire de passer moins ! (Rires) On lui donne une consigne et tout de suite il va comprendre et le faire derrière. Il passait certains éléments en une séance, c’est impressionnant le niveau qu’il a.

Qu’est-ce que ça t’a apporté, en tant qu’entraineur, d’avoir côtoyé les frères Traoré-Malatre ?
Je ne les voyais pas souvent, en général une fois par semaine, car j’étais plus leur entraîneur secondaire. Mais ça m’a permis d’être avec celui qui s’occupait d’eux, de voir les techniques qu’il utilisait. Mais aussi la facilité avec laquelle ils comprenaient les choses et les appliquaient, c’est enrichissant de voir des gymnastes d’un tel niveau. J’ai pu voir les méthodes qu’on peut utiliser pour aller plus loin avec des gymnastes qui ont de très bonnes capacités.

Est-ce qu’on les entraîne comme on entraîne d’autres gymnastes ?
J’ai pu voir comment l’autre entraîneur faisait et il savait déjà où il allait et il n’avait pas forcément besoin de s’attarder sur certaines choses car c’était vite acquis et ça leur permettait d’aller rapidement sur autre chose. Avec eux on réfléchit beaucoup plus sur le long terme pour des éléments qui serviront plus tard.

Ils ont depuis rejoint le club de Vélizy, mais quels sont les moments forts que tu gardes avec eux en tête ? 
Pour Tyler, je pense que ce sont ses Championnats de France Élite qu’il a remporté avec beaucoup d’avance. On avait visé les 100 points et il les a faits ! Et puis, l’environnement familial dans lequel ils évoluent est exceptionnel. Leurs parents leur apportent un soutien précieux dans leur projet et puis ils ont tété incroyables avec moi aussi.

Quel regard portes-tu sur tes carrières d’entraineur et de gymnaste ?
On va dire que j’ai commencé de pas grand chose, de rien même ! Pour aller un peu plus loin, au départ je voulais être architecte et je savais à 100% que je ne voulais pas être prof, entraineur ou travailler avec des enfants tout simplement. (Rires) Et c’est grâce à la gym que j’ai finalement fait tout ça. J’ai réussi à évoluer en peu de temps. J’ai eu des gymnastes dont je me souviendrais toute ma vie, notamment les dernières années.
Je pense que j’avais besoin de quitter la gym pour souffler et ça m’a fait du bien. Faire les Camps Gym aussi m’ont aidé, voir la gym sous un autre aspect et sans pression. Je pense que je vais renouveler l’expérience chaque année si je peux. Mais sinon je ne suis pas fâché avec la gym ! (Rires) Et j’ai hâte de commencer la gym en Suisse dans une structure qui n’a rien à voir.

Ta passion pour la gymnastique va bien au-delà de la pratique puisque tu as été et continue d’être bénévole sur les compétitions. Parmi tes différentes missions, tu as notamment fait partie des 45 000 volontaires engagés sur les Jeux Olympiques de Paris 2024, revenons sur cette expérience. Comment s’est-elle construite ?
J’ai postulé au printemps 2024, quelques mois avant le début de la compétition, sur le portail des volontaires. Le processus de recrutement a comporté plusieurs étapes. Il fallait d’abord remplir toutes les informations nécessaires puis attendre de savoir si on était sélectionne. Ensuite, il y a eu une seconde étape avec près de 90 questions en anglais pour évaluer notre profil et déterminer où nous serions le plus utile en tant que volontaire. Enfin, ils nous ont proposé des missions que nous pouvions accepter ou refuser.

Pourquoi avoir fait le choix de devenir volontaire ? 
Ce qui m’a motivé, c’est de faire partie intégrante de l’organisation. Je peux dire que j’ai fait partie des Jeux à ma manière. On se dit qu’on est au coeur des JO, c’est impressionnant. On voit tous les bâtiments, tous les drapeaux, et on rencontre les athlètes.

Sur quel poste as-tu été affecté ?
J’étais affecté aux transports. J’étais basé au village olympique et je me chargeais de la distribution des véhicules aux délégations. En fonction du nombre d’athlètes et de membres du staff, j’attribuais des voitures ou des minibus. Il travaillait en étroite collaboration avec les chefs de délégation pour la récupération des véhicules, restant constamment à la gare routière pour enregistrer les informations nécessaires, comme les noms des athlètes, les horaires de départ et d’arrivée, etc. Je m’occupais aussi d’orienter les athlètes vers les bus et leurs lieux d’entraînement ou de compétition. Après chaque trajet, je veillais à vérifier que les portes des bus étaient bien fermées afin de garantir la sécurité.

C’est un poste qui te plaisait ? 
Oui car être au village olympique et gérer le parc automobile était un poste stratégique. Chaque jour, j’avais la chance de côtoyer de nombreux athlètes de haut-niveau et personnalités publiques. J’ai vu beaucoup de monde. En gym, j’ai vu par exemple Simone Biles et toute l’équipe américaine, Mélanie De Jesus Dos Santos et toute l’équipe de France,  mais j’ai également eu l’occasion de rencontrer d’autres athlètes comme Léon Marchand, Kevin Mayer, Teddy Riner et Sasha Zhoya. C’était vraiment une super expérience, car c’était un environnement où il y avait beaucoup d’échanges.

Quel était ton rythme tout au long de cette quinzaine olympique ? 
J’étais soit du matin, 6h30-14h30, soit de l’après-midi, 14h20-22h. On commençait par un petit brief pour connaître le nombre des départs et savoir où se placer, car il y a beaucoup de départs et de lieux à gérer en même temps.

Au milieu de ce rythme effréné, avais-tu le temps d’aller voir quelques compétitions ? 
Oui… J’ai pu notamment à la finale sol en GAF et au podium où on a vu Simone Biles et Jordan Chiles s’agenouiller devant Rebeca Andrade en signe de respect. C’était un moment magique ! Vraiment énorme ! C’est l’un des plus beaux podiums que j’ai pu voir.

Qu’est-ce que ça t’apporte toutes ces missions bénévoles ? 
C’est une source précieuse d’apprentissage et d’opportunités. Si quelqu’un a l’opportunité de faire du volontariat, qu’il le fasse. C’est important. Et s’il a la chance d’être bénévole aux Jeux Olympiques, peu importe l’édition, je le lui recommande vivement. Ça permet de vivre plein de beaux moments et de découvrir les compétitions autrement.

Propos recueillis par Mazarine Mayangha et Fateh Ould Hamouda  

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