Le 23 juillet dernier, lors des Universiades en Allemagne, le destin de Lorenzo Bonicelli a basculé. À 21 ans, le gymnaste italien chutait lourdement aux anneaux à la réception d’un triple arrière. Depuis, il mène un combat quotidien. En fin de semaine dernière, il a donné de ses nouvelles dans une interview accordée à La Republicca.
Allongé sur son lit de l’hôpital Niguarda de Milan, où il a été rapatrié début août après avoir été opéré en Allemagne, Lorenzo Bonicelli, entouré de ses parents, de ses soeurs et de sa compagne Lisa Rigamonti, se souvient des minutes qui ont suivi sa chute. « J’étais conscient tout le temps. Je me rappelle chaque seconde, de la chute jusqu’au bloc opératoire » , confie-t-il dans les colonnes de La Republicca.
Sorti de la salle de compétition sur civière puis transporté en urgences à l’hôpital d’Essen, en Allemagne, il avait été opéré des vertèbres cervicales avant d’être temporairement placé dans un coma artificiel. Les premiers jours qui ont suivi l’opération ont été hantés par des images obsédantes. « Elles revenaient sans cesse et provoquaient des crises profondes » , livre-t-il. Depuis, il a appris à les apprivoiser pour aller de l’avant. Avancer. Avec une grande force mentale. « La seule réponse que j’ai, c’est d’affronter la situation de face, pas à pas. «
Depuis son rapatriement en Italie, ses journées sont désormais réglées comme une horloge : kinésithérapie le matin, travail avec les ergothérapeutes, séances en caisson hyperbare et nouvelle kiné l’après-midi. Une ou deux fois par semaine, il retrouve aussi la psychologue de l’hôpital, un soutien essentiel. « Même quand j’étais gymnaste, j’ai toujours accordé de l’importance à l’aspect mental » , explique-t-il. Alors forcément, dans de telles circonstances, les habitudes ne changent pas. Au contraire.
Se concentrer sur le moment présent
Dans ce quotidien exigeant, chaque progrès, aussi minime soit-il, est vécu comme une victoire. Avec cette volonté de se concentrer sur l’instant présent. Sans regarder vers l’arrière. Ni trop loin vers l’avant. « Je ne me fixe pas d’objectifs à long terme. Chaque jour, je me concentre sur un point positif. Un mouvement gagné, c’est un millimètre dans une course de cent kilomètres. »
L’un de ses souvenirs les plus marquants, symbole d’espoir, reste ce moment, alors qu’il était encore en soins intensifs, où il a senti pour la première fois un mouvement dans son bras. « Infime, presque imperceptible, mais je me suis dit : Oh mon Dieu…«
C’est dans ces petites victoires que Lorenzo Bonicelli puise son énergie. Elles deviennent des jalons qui lui permettent d’avancer, pas à pas, dans un chemin semé d’incertitudes. La rééducation est longue, mais il s’y engage avec cette même rigueur qu’il a toujours eu sur les agrès. Chaque exercice, chaque séance, chaque millimètre gagné est un pas de plus vers la reconstruction. Vers l’acceptation. Accepter ce qui est arrivé. Accepter les limites du cors aussi. Avec la volonté de ne rien lâcher, en avançant étape par étape.
Dans ce combat, Lorenzo s’appuie sur les siens et sur les marques de soutien venues du monde entier. A l’image de celui de la gymnaste rythmique Sofia Raffaeli, qui lui a dédié sa médaille d’or mondiale quelques jours après son accident. « Cela m’a énormément ému« , sourit-il. Et puis, il puise sa force dans le regard de celles et ceux qui l’entourent. « Quand je ferme les yeux, je vois les visages de mes parents, de mes sœurs, de Lisa. Ils passent tout leur temps libre avec moi. La seule chose que je peux leur rendre, c’est de leur montrer que je suis fort. Quand je me regarde dans le miroir aujourd’hui, je me dis que j’ai de la chance. »






