Nouveau code de pointage (2017-2020) : qu’est-ce qui change pour les masculins ?

[DOSSIER DU MOIS DE MARS] Chaque Jeux Olympiques laissent place à un nouveau code de pointage. Quels sont les principaux changements pour les masculins ? Certains profils de gymnastes sont-ils plus handicapés ? Ou encore certains agrès sont-ils plus concernés que d’autres ? Le point, en trois questions, avec le collectif des juges internationaux. Par ailleurs, principaux concernés, quel(s) regard(s) les gymnastes portent-ils sur ce nouveau code ? Danny Pinheiro-Rodrigues, Edgar Boulet, Zachari Hrimèche, Cameron-Lie Bernard et Kévin Dupuis nous donnent leur avis.

Le point avec les juges

Quelles sont les modifications principales de ce nouveau code ? 

D’un point de vue général, la principale modification de ce nouveau code est la réduction à 4 groupes de structures par agrès, au lieu de 5 le cycle précédent. De ce fait, un maximum de 5 éléments par groupe est autorisé. Voici un petit tour d’horizon sur les changements aux différents agrès masculins :

  • Sol :

Pour les seniors, il est obligatoire d’exécuter dans l’exercice un double salto qui doit être dans les 10 éléments qui comptent. Une pénalité de 0,3 points sera appliquée en cas de non présentation de cet élément (dans les déductions neutres, comme les sorties de praticable par exemple). Un maximum de 2 connexions entre saltos sont prisent en compte, à partir de D+B. D’autre part, dorénavant, les éléments de type « twist » sont dans le même groupe que les éléments acrobatiques en arrière.

 

  • Cheval d’arçons :

Un maximum de deux éléments à l’ATR sont autorisés, sans compter la sortie. Les passés faciaux et dorsaux sont désormais dans le groupe II, celui des cercles.

 

  • Anneaux :

Les éléments d’élan se terminant à l’ATR tenu deux secondes  se situent maintenant dans le groupe I. Cependant, il est obligatoire d’en effectuer un pour ne pas avoir de pénalité (déduction neutre) de 0,3 points. Il doit faire partie des 10 éléments qui comptent. Le gymnaste peut exécuter la même position finale de maintien en force maximum une fois par groupe d’élément. Ainsi, on ne peut plus faire deux forces pures qui se terminent dans la même position finale.  En revanche, il est possible de faire une force en force pure et une autre venant d’un élan. C’est un changement fondamental.

 

  • Saut de cheval :

En règle générale, quasiment tous les sauts ont été dévalués de 0,4 points.

 

  • Barres parallèles :

Les éléments de type « salto en-dessous » (2 maximum autorisés) apparaissent dans le groupe des éléments en suspensions.

 

  • Barre fixe :

Les éléments d’élan en prise cubital sont maintenant dans le groupe I, celui des élans. Les éléments types « Adler » apparaissent dans le groupe III, celui des éléments près de la barre. Le gros changement à la barre fixe concerne les lâchers de barre. Il peut y en avoir jusqu’à 5 dans un mouvement. Les connexions sont uniquement prisent en compte sur les lâchers, à partir de C+C. Par exemple, désormais ces deux connexions suivantes, qui comptaient au cycle précédent, ne comptent désormais plus : Adler (engagé dorsal) 1/2 tour à l’ATR + Kovacs (pas de connexion car l’Adler est un élément près de la barre et non pas un lâcher) ou encore Adler 1 tour + Yamawaki = pas de connexion. On voyait systématiquement ces 2 éléments enchaînés sur l’ancien code.

A la barre fixe, enchaîner les lâchers de barre permettra de faire la différence

 

Quel est l’impact de ces modifications sur les gymnastes ? Certains profils vont-ils être plus “handicapés” que d’autres avec ce nouveau code ? 

L’impact de ses modifications peut avoir des conséquences à certains agrès. Il faut surtout comprendre la philosophie du code de pointage et l’orientation que la FIG veut prendre concernant la diversité des éléments présentés. De plus, la cotation de l’exécution revient sur les fondamentaux. J’attire vraiment l’attention à tous les gymnastes et entraîneurs sur la bonne exécution des éléments, tant sur les angles à respecter que sur la bonne position du corps. Une position groupée, carpée ou tendue ne doit laisser aucun doute dans l’esprit des juges. Toute position imprécise du corps sera obligatoirement pénalisée. Pour le haut niveau, voici mon avis sur l’impact de ces changements qui influent sur le profil de certains gymnastes. Au sol, les gymnastes très acrobates pourront tirer leur épingle du jeu sur des difficultés sèches, ou en connexion sur des éléments très difficiles ; seules 2 connexions comptent, il faudra faire la différence sans chuter. Aux anneaux, la variété des éléments de force sera obligatoire en raison de la limite des positions finales qui ne peuvent plus être répétées. Il faudra faire très dur et très diversifié. Enfin, à la barre fixe, enchaîner les lâchers de barre permettra de faire la différence.

 

 

Certains agrès sont-ils plus concernés que d’autres par les modifications ? 

Comme détaillé dans la première question, les modifications majeures concernent surtout le sol, les anneaux et la barre fixe. Pour les autres agrès, même si le code de pointage n’a pas de changement fondamental, les entraîneurs et gymnastes doivent adapter leur contenu malgré tout pour répondre aux exigences du code de pointage.

 

Merci au collectif des juges internationaux pour leur disponibilité

 

Le point avec les gyms 

edgar

Edgar Boulet, spécialiste à la fixe :
“Ce nouveau code a entraîné pas mal de changements. Premièrement, la perte de 0,5 points sur nos notes de départ, ça fait un peu mal au coeur. Ensuite, en ce qui concerne la fixe, il y a des éléments qui sont déclassés, des connexions qui n’existent plus également ce qui fait que j’ai perdu à peu près 0,7 points sur ma note de départ. Mais bon, je sais que c’est pareil pour tout le monde donc il faut travailler encore plus pour combler cet écart. De plus, ce nouveau code est devenu très exigent. La moindre faute, même légère, est pénalisée. Sur un mouvement complet, ça finit par faire mal donc je pense que les objectifs de ce code visent à rendre la gymnastique encore plus précise et spectaculaire qu’avant. Mais il va falloir un peu de temps, je pense, avant que la gymnastique atteigne ces objectifs…”

 

Danny anneaux okDanny Pinheiro-Rodrigues, spécialiste des anneaux :
“On perd tous 5 dixièmes sur la note de départ car il y a une exigence en moins. Aux anneaux, on n’a plus le droit de faire la même force en force pure, il faut une force pure et une force venant d’un élan. Par exemple, Azarian croix et Nakayama croix est maintenant interdit et il faut remplacer l’une des deux par temps de ventre croix ou honma croix. Avec les modifications du nouveau code, ma note de départ passe donc de 6.9 à 6.10. Un nouveau code qui est d’ailleurs beaucoup plus rigoureux donc parfois, il vaut peut-être mieux mettre un élan plutôt qu’une force sur laquelle on peut perdre plus de points. Je regardais un peu sur quelle note partent les autres spécialistes aux anneaux. Petrounias, le champion olympique, est actuellement sur 6.3 mais ensuite, il a très peu de fautes d’exécution. Ceux qui participent à Bakou actuellement, certains d’entre-eux sont à 6.20 ou 6.30 en note de départ et sortent ensuite à 14.7 ou 14.8 donc je suis encore dans le coup.”

 

zachari portraitZachari Hrimèche, généraliste et spécialiste au saut :
Avec le nouveau code, il y a un groupe en moins par agrès (hors saut) donc les notes descendent partout de 5 dixièmes ce qui fait bizarre mais c’est une question d’habitude ! Il y a des éléments qui étaient dans deux groupes distincts et qui sont désormais dans le même. Les mouvements peuvent donc changer en fonction de ce que l’on présentait mais on a aussi désormais le droit à 5 éléments par groupe. Est-ce que ce nouveau code m’handicape ? Je dirais que non. Même au contraire. Sur certains agrès, cela m’avantage. Par exemple, aux arçons, il y a un groupe d’éléments où je ne suis pas très bon et un autre où je suis meilleur, je peux donc désormais présenter 5 éléments de ce groupe ce qui en rajoute un par rapport à avant ! Tout ça est un peu compliqué mais globalement, c’est pour tout le monde pareil et ça ne va pas changer grand chose sur le travail qu’il faut fournir. Et s’il y avait quelque chose à en dire, je dirais donc que ce nouveau code tend plutôt à m’aider sur certains points que m’handicaper.”

 

Camerone sol

Cameron-Lie Bernard, généraliste et spécialiste des barres parallèles :
“Pour le sol, cela ne change pas grand chose hormis que les twist n’existent plus et que le nombre de combinaisons est limité à deux par complet. Aux arçons rien n’est embêtant mais tous les éléments en Thomas sont valorisés d’un dixième donc cela vaut beaucoup plus le coup de le travailler. Aux anneaux, c’est surtout aux niveau des forces que ça pause problème car on ne peut pas amener une force à la même position plus d’une fois. Au saut, tous les sauts baissent. Aux barres parallèles, il y a quelques règles qui sont embêtantes comme le fait de ne plus pouvoir faire plus de deux types de salto en dessous ce qui fait que pour ceux qui en font trois et bien ils doivent trouver un autre élément de même valeur pour ne pas baisser leur note de départ et ce ne sont jamais des éléments simples. C’est le plus gros changements aux barres parallèles avec également quelques déclassement d’éléments en fonction de l’élément que l’on met comme le salto en dessous sur une barre. S’il n’est pas suivi directement d’un eli en partant de la même barre, l’élément descend d’une valeur ce qui n’a plus aucun intérêt. Et à la barre fixe l’exigence des tours en prise dorsale n’est plus obligatoire ce qui est un soulagement pour moi car je n’ai jamais aimé cette exigence !”

 

kévin dupuis sautKévin Dupuis, généraliste et spécialiste au sol :
“Concernant le nouveau code, pour moi il m’handicape sur certains agrès. Aux anneaux, en ce qui concerne les forces, étant donné qu’elles ont été regroupées, je ne peux pas faire Azarian croix et Nakayama croix, je ne peux faire que l’un des deux. Aux barres parallèles, sur le travail en dessous, nous sommes limités du coup ça me fait perdre un élément. En revanche au sol, on peut enchaîner les diagonales ce qui me permet d’enchaîner de plus grosses difficultés, ce qui est un bon point pour moi dans ce nouveau code. Dans tous les cas, il faut s’adapter, travailler de nouveaux éléments pour augmenter la note de départ.”

 

 

Propos recueillis par Charlotte Laroche

 

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