Ils sont méconnus du grand public mais partagent tous la même passion pour la gymnastique. Portrait de club : la rubrique qui part à la rencontre des passionné.es qui évoluent hors des structures de haut-niveau.

Championne de France en titre en Nationale A 21 ans et +, Mélissande Simonin revient de loin. Peu épargnée par les blessures et un temps épuisée physiquement, elle est finalement toujours revenue mêlant entraînement de gymnastique et études supérieures de front. Celle qui partage désormais sa vie entre la France et l’Italie est un exemple de persévérance.

Mélissande Simonin partage son quotidien entre la France et l’Italie. Photo Mary-Lou L

Mélissande Simonin, c’est le genre d’athlète qu’on a envie de serrer dans ses bras tellement elle est inspirante. Courageuse. Persévérante. Victime d’une rupture du tendon d’Achille droit en 2016 puis gauche en 2020 avant d’enchaîner avec une blessure au pied en 2022, trois semaines avant les championnats de France par équipes, la gymnaste de 23 ans aurait pu tout plaquer, lassée de ce corps qui lâche au pire des moments. C’est ce qu’elle a fait, une fois, avant de finalement revenir. Une pause salvatrice qui a permis à son corps de souffler et à sa tête de retrouver ce plaisir de la gym qui l’anime tant mais qu’elle avait un temps perdu donnant à sa carrière de gymnaste une trajectoire qu’elle aurait préférée différente. “Une carrière en dent de scie” comme elle le dit elle-même “marquée par les blessures” mais également (et surtout) marquée par des come-back dont elle seule a le secret.

Mélissande Simonin a débuté la gymnastique à l’âge de 6 ans au club de Plombières-Les-Bains dans les Vosges. “Sur les conseils d’une amie à elle, ma mère m’a inscrite à la gym” , se souvient-elle. “Je n’étais pas hyperactive mais je sautais tout le temps sur le canapé, j’étais toujours pleine d’énergie.”. À Plombières-Les-Bains, elle découvre la gymnastique et s’en prend rapidement de passion. Là-bas, elle y apprend les bases et à se repérer dans les airs. Des débuts dont elle se souvient avec émotion. Le commencement du reste. Puis ses parents déménagent en Normandie et elle entre alors au sein du prestigieux club de Saint-Lô. “C’était une superbe opportunité pour moi” , sourit-elle.  Les heures d’entraînement doublent, passant de 8h à 20h par semaine, et Mélissande ne cesse de progresser. “À Saint-Lô, j’ai appris toutes les difficultés que je sais faire aujourd’hui” , explique-t-elle. “C’est grâce à mes années là-bas que j’ai pu avoir ce niveau.” Mais les heures d’entraînement finissent par peser sur son corps et les douleurs commencent par apparaître. “En janvier 2016, j’ai commencé par avoir mal au dos et au tendon d’Achille droit. Cette saison-là était compliquée et je n’en garde pas de très bons souvenirs.” Quelques semaines avant les coupes de France, son tendon lâche. “C’était sur un double arrière groupé au sol” , éclaire-t-elle. “Cette blessure allait m’obliger à prendre une pause ce qui a permis à mon corps de souffler, mais je savais qu’ensuite, j’allais tout faire pour retrouver rapidement mon niveau.”

Mélissande Simonin après sa première rupture du tendon d’Achille en 2017. Photo Benoît Bonatre

Opérée du tendon d’Achille, elle prend ensuite son mal en patience et finit par reprendre le chemin de l’entraînement en 2017 avant de signer son retour à la compétition lors des championnats de France individuel, à Cognac. Un retour assez incroyable puisqu’elle s’offre un titre de championne de France en Nationale A, un titre au saut et une médaille d’argent à la poutre. “Un retour inespéré” , sourit-elle d’ailleurs avec fierté. Mais en 2018, les soucis reviennent. “J’ai commencé à avoir mal à l’autre tendon. C’était comme si j’avais une épée de Damoclès au dessus de la tête et c’était une situation difficile à vivre. En plus, j’avais plein d’autres douleurs et ça devenait de plus en plus compliqué pour moi de m’entraîner donc j’ai pris la décision d’arrêter. J’étais au bout du rouleau à ce moment-là, je commençais à perdre cet aspect de gym plaisir. En plus ça correspondait au moment où je devais entrer en études supérieures donc je me suis dit que c’était le bon moment pour moi d’arrêter.”

Elle part s’installer à Caen pour débuter ses études supérieures. Mais la gym lui manque rapidement et elle reprend progressivement les entraînements. À la cool. Sans pression. Ni compétition. “Comme je m’entraînais beaucoup moins qu’avant, j’avais beaucoup moins de douleurs ce qui m’a permis de reprendre plaisir à faire de la gym” , éclaire-t-elle. Et puis finalement, les compétitions la rattrapent. “Il manquait une fille dans une équipe et on m’a demandé si je pouvais matcher. J’ai accepté car ça permettait d’aider mon club et puis les compétitions commençaient à me manquer donc cette proposition tombait bien.” Après deux ans passés à Caen, elle part s’installer à Rennes où elle intègre une école d’ingénierie informatique et se licencie au club de Nantes Gym. Rennes et Nantes n’étant pas à côté, elle s’entraîne en parallèle au club de Chartes de Bretagne et retrouve encore un peu plus plaisir à faire de la gym, sans douleur. Son niveau revient et chasse les doutes mais un nouveau coup dur s’abat sur elle. Un coup de massue. Un coup qui aurait pu lui être fatal mais qui n’ébranlera pas sa passion. Sa motivation.

Un jour d’entraînement au sol, elle se rompt le tendon d’Achille gauche sur la percussion avant de lancer son full in. “Heureusement que la réception était en fosse sinon je me serai écrasée sur le praticable” , ironise-t-elle. “C’était fin octobre 2020, le lendemain de mon anniversaire.” Un sale cadeau. Celui dont on se passerait bien. Mais une nouvelle fois, elle parvient à se relever. À se remettre sur ses deux jambes. “La rééducation a été assez rapide car je savais par quelles étapes j’allais devoir passer donc c’était plus facile que pour mon premier tendon.” En mai 2021, elle retourne sur les agrès, bien décidé à entamer la saison suivante sur de bons rails. Elle obtient alors sa qualification pour les championnats de France individuel jusqu’à cette blessure à la cheville qui survient trois semaines avant la compétition. Une nouvelle grosse claque qui lui fait manquer les championnats de France individuel et ceux en équipe. “Honnêtement, c’était dur. J’avais tellement envie de faire ces compétitions avec Nantes. C’était une manière pour moi de contrer ce sentiment d’inachevé que j’avais par rapport aux deux saisons précédentes.” Mais le sort en a décidé autrement.

Mélissande Simonin a été sacrée championne de France en Nationale A1 21 ans et + cette année à Miramas. Photo Charlotte Maitenaz / Gym française

Nouveau départ
En septembre dernier, elle part vivre en Italie, où elle intègre l’école polytechnique de Milan. Grâce aux contacts de son entraîneur à Nantes, David Guimard, elle peut poursuivre ses entraînements en Italie, au club de Gal Lissone. “Une opportunité incroyable qui m’a permis de continuer à progresser et de m’inspirer de ce que font les Italiennes à l’entraînement” , se réjouit la Française. “La manière de s’entraîner est différente de celle en France et ça me porte, ça me tire vers le haut. Les Italiennes sont très très très techniques aux barres, le niveau est clairement supérieur à cet agrès par rapport à nous en France, ce qui m’a permis de progresser à cet agrès, ce qui est une très bonne chose car c’était l’agrès sur lequel j’étais la moins à l’aise. Et avec les conseils aussi de David Guimard, mon entraîneur à Nantes, j’ai pu corriger les lacunes techniques que j’avais. Cette saison passée entre l’Italie et Nantes m’a été très bénéfique dans ma gym et son approche” , poursuit-elle. Une nouvelle approche qui lui procure un effet booster et qui lui permet de passer encore un cap.

Un quotidien partagé entre l’Italie et la France qui lui a en effet permis d’aborder les championnats de France individuel organisés à Miramas du 19 au 21 mai, prête et bien préparée… ce qui ne l’a toutefois pas empêché de se faire envahir par le stress avant le premier agrès. “Dans la vie, comme dans le sport, j’ai toujours un peu de mal à gérer mes émotions donc forcément en compétition, je n’y échappe pas. Avant le sol, j’étais pas mal stressée” avoue-t-elle. “Mais David a trouvé les mots justes et j’ai réussi à rester concentrée et dans ma bulle. Pendant une compétition, je sais que je suis toujours un peu dans mon coin, renfermée sur moi-même, pas trop extravertie mais ensuite une fois que la compétition est terminée, je peux souffler !” Bien concentrée, elle a déroulé agrès après agrès, maîtrisant son sujet et réalisant un tour sans chute. Elle a fait ce qu’elle savait faire pour aller chercher ce titre de championne de France qui signifie tant. Le titre de la délivrance. De la résurrection. Celui qui prouve que tant qu’on ne s’avoue pas vaincue, il est possible de déplacer des montagnes. Celui qui prouve que mener un double projet entre gymnastique à haut-niveau et études supérieures est également possible. Celui qui prouve que quand on veut (et que le corps peut), on peut. Une première place partagée avec Alisson Lapp, ancienne membre de l’équipe de France, lui offrant également une dose de fierté supplémentaire.

Après à Miramas en individuel, c’est à Lyon et en équipe qu’elle s’est présentée et qu’elle a une nouvelle fois savouré. Savouré la compétition et le maintien en Nationale A1. Savouré la gymnastique qu’elle a un temps délaissé pour laisser le temps à sa tête et son corps de souffler pour revenir de plus belle. Une compétition en équipe avec son club de Nantes Gym qu’elle attendait de pied ferme car même si elle ne s’entraîne pas au quotidien avec ses coéquipières, le lien reste fort et elle remonte sur Nantes dès qu’elle le peut. “C’est important pour moi” lance-t-elle. “Pendant les vacances scolaires ou dès que mon emploi du temps le permet, je viens sur Nantes pour m’entraîner.” Des bouffées d’oxygène au milieu de son rythme effréné qui la conforte dans ses idées et qui font d’elle une gymnaste d’exception. Une gymnaste au parcours et à l’histoire aussi atypique qu’inspirante.

Mélissande Simonin et David Guimard, son entraîneur au club de Nantes Gym. Photo DR
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