À l’approche de la cérémonie d’ouverture des JO 2024, la flamme vient d’entamer son parcours en France, les sélections olympiques et paralympiques se valident, sport après sport, qualifications après qualifications, pays après pays. Ce sont près de 15 000 sportifs qui, durant 3 semaines, auront à cœur de réaliser leur meilleure performance possible pour atteindre le podium et décrocher les récompenses olympiques, et paralympiques.

Emilie Le Pennec, championne olympique aux barres asymétriques en 2004 à Athènes. Photo DR

Selon les sports, selon les Etats, selon les performances et selon les époques, les sportifs ne reçoivent pas tous les mêmes avantages. Mais s’il est un graal universel c’est la médaille. Les médailles de Paris 2024 ont été dévoilées le 8 février dernier, elles seront 5 084 distribuées lors des Jeux olympiques et paralympiques, indifféremment du sport ou du pays que l’athlète représente. En outre les 8 finalistes recevront un diplôme.

Ensuite, chaque pays propose, parfois, pour ses représentants des récompenses supplémentaires, des primes financières, des logements, des voitures, des objets symboliques ou courants voire un poste dans l’administration étatique… Par exemple la France attribue une prime de 80 000€ à chaque champion olympique et paralympique (et la moitié à la fédération à laquelle il appartient pour l’encadrement), contre 65 000€ à Tokyo. Pour une médaille d’argent, ce sera 40 000€, au lieu de 25 000, et 20 000€ pour le bronze, au lieu de 15 000.

Pour la première fois lors des Jeux Olympiques de Paris en 2024, une fédération internationale attribuera aux champions olympiques une prime : l’athlétisme a validé l’octroi d’une prime de 46 000 € à chaque vainqueur sur la piste Dyonésienne. Les autres athlètes médaillés seront récompensés, seulement, à partir de Los Angeles 2028. Une ouverture dans laquelle les sportifs d’autres grandes fédérations pourraient vouloir s’engouffrer, tant l’olympisme génère des flux financiers.

Les médailles d’hier à aujourd’hui, voyage organisé
Sous l’Empire, durant l’Antiquité, les vainqueurs des épreuves sportives étaient récompensés par une couronne de laurier. Cela représentait à la fois les attributs de l’Empereur et une allégorie de la Victoire. Lors des Jeux Olympiques antiques, la couronne d’olivier a été préférée à celle de laurier. L’Histoire dit que c’est pour honorer Zeus que l’olivier a été choisi, car le kotinos (nom donné à la couronne d’olivier dont le rameau est coupé avec une faucille en or tressé en cercle ou fer à cheval) assure la protection divine à celui qui le porte.

Chacun des jeux panhélleniques offre une couronne aux vainqueurs, chacune étant réalisée avec des feuillages différents (le laurier pour les Jeux Pythiques de Delphes, pin pour les Jeux isthmiques, céleri aux jeux néméens, et donc olivier aux Jeux Olympiques).

Cette tradition de couronne a été remplacée lors des Jeux Olympiques modernes par une médaille. Néanmoins pour fêter les Jeux Olympiques d’Athènes en 2004 et leur portée historique, les médaillés ont tous reçu une couronne d’olivier en plus de leur médaille.

En 1896, alors que le baron Pierre de Coubertin réhabilite les Jeux Olympiques, les récompenses sont d’abord des médailles en argent aux vainqueurs, puis des Trophées en 1900 et enfin le fameux trio d’or, d’argent et de bronze à compter de 1904. En 1960, les trois lauréats sont décorés de leur médaille fixée à un cordon (ou une chainette) autour de leur cou. Cette tradition perdure jusqu’à ce jour.

Le design des médailles a lui aussi évolué, pour être aujourd’hui encadré par plusieurs critères.

La forme ronde : toutes les médailles ont été rondes, à l’exception des médailles de Paris 1900 qui étaient rectangulaires.

En 1896, leur création est confiée au sculpteur français Jules Clément Chaplain, et à la monnaie de Paris. Il choisit de représenter sur l’avers, Zeus tenant un globe surmonté de la déesse grecque Niké ailée, allégorie de la victoire). Le revers est alors consacré à l’Acropole entouré par l’édition formulée en grec. Entre 1928 et 1968, les deux faces des médailles sont uniformisées pour l’ensemble des éditions et conceptualisée par Cassioli sous le nom de « trionfo » : la déesse Niké et un vainqueur porté en triomphe.  Puis en 1972, le revers est laissé à la discrétion de chaque comité d’organisation, avec cependant des critères techniques très précis et des symboliques obligatoires : diamètre minimum (60mm), épaisseur minimum (3mm) et composition.

L’avers représente toujours la déesse Niké, qui depuis 2004, apparait sortant du Stade Panathéïque symbolisant ainsi que la victoire va bien au-delà du sport et s’ouvre sur le monde. Les anneaux olympiques, l’édition et la discipline ou le sport sont aussi précisés sur cette face.

Concernant l’édition pour les paralympiques, elle reste libre tant sur l’avers que le revers, mais doit disposer de certaines informations, et être inclusive, notamment pour les personnes mal voyantes.

Paris 2024 a choisi de rendre cette médaille, au-delà du symbole, monumentale.

Médaillés à Paris, Eiffel à la conquête du monde
Le maitre mot du Comité d’Organisation des Jeux Olympiques (COJO) de Paris 2024 est de mettre la symbolique, l’art et les valeurs du pays au centre des épreuves.

Si, en 2017, Philippe Starck avait proposé un modèle de médaille à partager qui symbolisait la notion de performance en équipe, ce projet n’a pas été retenue par la commission des athlètes, pour éviter aux athlètes d’avoir à choisir entre certaines personnes de leur entourage.

Ainsi, le COJO a associé la Commission des athlètes et la maison Chaumet (expert joaillier à la renommée internationale et membre du groupe LVMH, partenaire prémium des JOP) pour réunir les critères : le luxe et la mode française, le savoir-faire de l’artisanat et quoi de plus symbolique du pays que la Tour Eiffel pour le monde entier ? Comment regrouper tout cela dans un cercle de quelques centaines de grammes, aux exigences strictes ?

Faire appel à un joaillier du luxe, à la Monnaie de Paris, au patrimoine Historique et artisanal du pays pour rendre le symbole de la médaille encore plus symbolique et iconique.

Visuel Paris 2024

Les médailles ont été imaginées comme un bijou avec trois caractéristiques : l’hexagone, le rayonnement et le sertissage. Au-delà des incontournables, chaque médaille comporte 18 grammes de fer de la Tour Eiffel, au revers. La dame de fer a été rénovée au cours du XXème siècle et certains éléments ont été retirés et conservés. Ce sont ces éléments qui ont été confiés à la confection du revers des 5 084 médailles olympiques et paralympiques. Ce fer dit puddlé est fabriqué dans les forges et haut-fourneaux de Pompey en Lorraine. Autre élément indispensable de la médaille et qui promeut le savoir-faire ancestral de l’industrie française : le ruban, bleu ou rouge, ce ruban est confectionné par les métiers à tisser de Saint-Etienne.

Les médailles, comme un symbole supplémentaire, seront réalisées à l’Hôtel de la Monnaie, à l’image des 1er Jeux olympiques modernes en 1896 et comme il y a 100 ans, pour la dernière édition d’été accueillie par Paris.

En quelques chiffres, les médailles font 85 mm de diamètres, elles pèsent entre 455 grammes (bronze) et 529 grammes (or – 525 grammes pour l’argent).

Les médailles d’or et d’argent contiennent de l’argent massif 925millièmes, et la médaille d’or est valorisée de 6grammes d’or.

Les médailles de bronze respectent la volonté de réemploi, puisque le cuivre, l’étain et le zinc sont issus des chutes de la production de monnaie.

L’avers représente la déesse Niké ailée et victorieuse, au-devant de la Tour Eiffel, comme un symbole de la ville conquérante et qui embrasse l’événement.

Ces médailles seront remises comme un trésor du patrimoine française à la conquête du monde.

Un morceau d’histoire de France, pour les champions olympiques sur leur sol
Un autre morceau de l’histoire de France et du savoir-faire du pays est mis en avant aussi pour récompenser chaque champion olympique et paralympique français.

C’est au sein de la manufacture de Sèvres que se joue cette autre création exceptionnelle.

La cité de la céramique Sèvres-Limoges et les Beaux-arts de Paris se sont en effet associés pour cette occasion en désignant six lauréats[1]. Ces six artistes verront leur œuvre respective peintes sur un vase dit de Blois. Dans le cadre de la transmission du savoir-faire, ces vases ont été cuits selon une méthode ancestrale dans un four à bois du XIXème siècle à 1300°C pendant plus de 30h. A l’occasion de cette cuisson exceptionnelle, Camille Jouneaux (la Minute culture) a proposé une pastille remarquable sur sa page instagram. Elle partagera à cette occasion les coulisses de cette cuisson olympique unique.

Le vase de Sèvres, le sport en général et l’olympisme en particulier c’est une histoire qui dure, qui dure…. En effet, en 1924, la manufacture de Sèvres confie à l’artiste Octave Guillonnet et au céramiste Emilie-Louis Bracquemont la conception des 324 vases remis à l’ensemble des lauréats des Jeux Olympiques de Paris. Déjà il s’agissait de vase de Bois, et ils devaient s’inspirer des vases remplis d’huile d’olive remis aux vainqueurs des Jeux antiques. Ces 324 vases étaient déclinés en quatre modèles représentants chacun une partie des sports olympiques de l’époque. Par exemple un des vases regroupait l’escrime, l’équitation, la pelote basque et les barres parallèles. Ces vases colorés du fameux « bleu de Sèvres » se parent des rameaux d’oliviers dorés. Ils seront remis aux récipiendaires par voie diplomatique en 1925. Les médaillés français, eux seront réunis en l’hôtel de Ville pour une cérémonie en grande pompe. Quelques exemplaires sont aujourd’hui exposés au Musée Olympique de Lausanne, au Musée national du Sport de Nice ou encore au Musée des Beaux-Arts du Petit Palais à Paris.

Au-delà de l’art et des beaux-arts, la transmission, l’héritage, le souvenir de la performance sportive dans l’antre iconique de l’édition olympique doivent rester dans le temps et dans la matière. Chaque nom de médaillé olympique sera également gravé dans le marbre du Stade de France, à l’instar de tous les médaillés olympiques qui ont laissé leur nom sur les murs du stade de chaque ville olympique. C’est ainsi qu’indéniablement le Stade de France deviendra le stade olympique, le stade olympien, le cocon des champions Paris 24,… 2024, comme Jean Bouin était le cocon de Paris 24… 1924.


LE SAVIEZ-VOUS ?

Le vase de Sèvres est un présent que le Président de la République offre en guise de cadeau diplomatique, mais aussi dans le cadre du sport. Depuis Louis Philippe lors du Grand Prix du Bouquet de tir à l’arc se voit remis ce fameux vase. Sur les Champs Elysées, chaque année depuis un certain Bernard Thévenet en 1975, le vainqueur du Tour de France cyclisme reçoit un vase de Sèvres dit « Coupe omnisport » de Roger Vieillard. La gymnastique n’est pas en reste. En effet de nombreux champions de France (Senior) ont reçu des vases de Sèvres comme « prix du Président de la République ». Et si depuis une trentaine d’années, ce prix du Président de la République est une médaille de la Monnaie de Paris, jusqu’en 1995, chacun recevait avec honneur un vase de Sèvres. Isabelle Séverino et Patrice Casimir ont ainsi reçu le dernier exemplaire pour des gymnastes français lors de leur sacre à Villeurbanne.

Karine Boucher a reçu trois vases de Sèvres pour ses trois titres nationaux consécutifs en GAF (1986, 1987 et 1988) nous a offert une photo d’un des siens.

Quant à Laëtitia Bégué, championne de France en 1994 ex-aequo avec Elodie Lussac, livre une petite anecdote : « J’ai bien failli ne jamais avoir ce vase. Car il n’y en avait qu’un et nous étions 2. Finalement je l’ai récupéré une semaine après la compétition ». Un cas unique dans l’histoire.

Parfois, le vase de Sèvres n’est considéré que comme une récompense, une breloque parmi d’autres, parfois même oublié dans des gradins… mais le temps aidant à prendre conscience de la valeur du travail quotidien et de l’engagement, et à réaliser la valeur des récompenses, il devient un objet de reconnaissance précieuse pour le sportif qui l’a reçu.

Le vase remis comme « Prix du Président de la République » qui est-il vraiment ?

Il s’agit d’un vase dit de Clermont en « bleu de Sèvres » ornés de semis de fleurs et de filet d’or.  Ce vase de Sèvres numéroté et signé au nom du Président de la République française, au nom de la nation est offert lors de concours sportifs, entre autres. Il devient le plus haut prix symbolisant par son excellence les talents à qui il est remis. La taille peut variée mais en général ils mesurent entre 24 et 45 cm de haut. Celui remis aux gymnastes mesurent 30 cm.

On ne peut que souhaiter qu’un (ou plusieurs) vase(s) de Sèvres se retrouve(nt) parmi les Trophées des gymnastes à l’issu des Jeux Olympiques de Paris. Ce sera le vase de Blois, pour l’occasion.

BIBLIOGRAPHIE

https://www.huffingtonpost.fr/sport/article/les-medailles-a-partager-imaginees-par-starck-pour-paris-2024-collent-parfaitement-au-slogan_104550.html

https://presse.paris2024.org/actualites/annonce-des-medailles-8-fevrier-74c0-e0190.html

https://www.art-critique.com/2024/04/des-vases-pour-les-vainqueurs/

Préparation du four :  https://www.facebook.com/watch/?v=323902064033190

Présentation de la cuisson des vases de Blois :  https://www.facebook.com/reel/929465748554277

[1] Ece BAL, Thomas BESSET, Sacha FLOCH POLIAKOFF, Samya MOINEAUD, Nassim SARNI, Domitille SIERGÉ

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