Ils les connaissent mieux que personne. Eric et Céline Boucharin, entraîneurs de Loan His et Oréane Lechenault au Pôle de Toulon, parlent de leurs deux championnes qui s’apprêtent à disputer leurs premiers Jeux Olympiques. L’occasion également pour eux de dévoiler où ils vont poser leurs valises à la rentrée prochaine suite à la fermeture du Pôle toulonnais.
Gym and News : Loan His et Oréane Lechenault viennent de s’envoler pour le Brésil, comment avez-vous vécu leur sélection olympique ?
Eric Boucharin : Nous avons ressenti une joie intense. Sur une équipe de cinq, deux d’entre-elles sont de Toulon, c’est immense ! Ce n’était pas spécialement une surprise car c’était l’objectif de la saison et depuis toutes ces années, elles travaillent dur pour faire les Jeux, mais on était vraiment très contents.
Céline Boucharin : Enfin, s’il y a un an, on nous avait dit qu’Oréane allait faire les Jeux, on ne l’aurait pas cru. Elle sortait d’une année difficile, elle avait beaucoup de mal à gérer la pression mais malgré cela, elle n’a jamais baissé les bras. Elle a toujours travaillé dur et a prouvé qu’elle méritait sa place. Nous sommes vraiment contents. Pour Oréane et pour Loan.
Quels sont leurs points forts ?
Eric Boucharin : Loan est une jeune fille qui a un vrai feeling aux barres. Elle est très technique, très précise. Et elle est également très élégante. Avec Oréane, c’est tout feu, tout flamme. Elle est très spontanée dans sa gym. Elle est hyper talentueuse et elle sent bien les choses. Et elle a aussi une physionomie hors-norme !
Céline Boucharin : Loan et Oréane ont toutes les deux un point commun : elles sont très talentueuses mais également très travailleuses. C’est important car parfois, une gym talentueuse peut se reposer sur ses acquis. Pour Loan et Oréane, ce n’est pas le cas.
Comment se passent les entraînements avec elles ?
Eric Boucharin : Il n’y a aucune concurrence entre elles deux. On leur a toujours appris qu’elles étaient meilleures à deux que toutes seules. Et sinon, Céline a plus préparé Oréane, c’est elle qui s’est occupée de jouer sur son émotivité qui la pénalisait en compétition, et j’ai plus préparé Loan. Cela nous permet d’avoir un regard extérieur sur le travail de l’autre. Si on était tous les deux le nez dans le guidon, on ne pourrait pas voir certaines choses.
Quel sera votre rôle à Rio ?
Céline Boucharin : Eric part en tant que troisième entraîneur. Il part en même temps qu’Anne (Kuhm, NDLR), la remplaçante, lundi 1er août. Pour les qualifications, il n’aura pas accès au plateau olympique, uniquement aux salles d’entraînements. Mais si Loan ou Oréane entrent en finale, à ce moment-là, ce sera lui qui les accompagnera sur le plateau. Uniquement en cas de finale. Quant à moi, je pars en récompense de mon employeur mais je n’aurai pas accès au plateau. Je serai une simple spectatrice (Rires).
Pensez-vous que Loan ou Oréane ont une chance d’entrer en finale ?
Céline Boucharin : Ce sera compliqué mais tout est possible. Loan ne pourra pas passer aux quatre agrès car elle a un petit problème à un pied qui n’est pas totalement résorbé. Donc elle passera en barres et peut-être en poutre. Elle a ses chances pour atteindre une finale aux barres mais ça risque d’être compliqué car elle n’a pas encore une note de départ suffisamment élevée pour rivaliser avec les Américaines, les Chinoises, les Allemandes ou les Britanniques. Oréane a également une carte à jouer aux barres mais surtout au concours général.
Le Pôle de Toulon vient de fermer ses portes, comment vivez-vous la chose ?
Eric Boucharin : Je suis rempli d’amertume. C’est une vraie déception de voir le Pôle qui se ferme à cause de problèmes financiers. En huit ans d’existence, on a réussi à mettre des gyms en équipe de France, deux d’entre-elles vont même participer aux Jeux Olympiques mais malgré cela, la Ville de Toulon s’est totalement désengagée. Petit-à-petit, ils ont réduit nos subventions. Lorsqu’ils ont su que la Fédération allait fermer le Pôle, ils ont carrément tout supprimé ! La Ville nous a poignardés. Je n’ai pas honte de le dire, il y a eu un désengagement et un désintéressement total de la Ville. On a eu une année royale cette année et pourtant, ils n’ont jamais mis en avant nos sportives. Quand on est assujetti aux subventions, c’est difficile de s’en sortir si on nous coupe tout. Et c’est encore plus difficile de se dire que le Pôle ferme alors qu’on est en haut de l’affiche et qu’on arrive à produire de belles choses.
Où allez-vous rebondir ?
Eric Boucharin : On part s’installer sur l’Île de la Réunion. Je pars le plus loin possible pour pouvoir oublier tout ça. J’aurai moins de regrets comme ça ! Je pars en tant que CTR. Les Réunionnais ont toujours été présents en équipe de France mais il manque une structure de base de préparation sur l’Île. Donc les jeunes sont obligés de partir, très tôt, dès leur entrée en collège. Le but est donc de créer une vraie structure qui permettra de faire le pont entre l’Île et la Métropole pour la GAM, la GAF et la GR. Cette structure nous permettra de sélectionner, d’identifier et de détecter les jeunes sur l’Île avant qu’ils partent en Métropole. Et grâce à cette structure, les filles pourront rester à la Réunion jusqu’à la quatrième et les garçons jusqu’en troisième. Nous allons totalement restructurer la filière du haut-niveau à partir de l’Île.
Cécile Boucharin : Pour ma part, je fais un break avec la gym. Grâce à mes indemnités de licenciement économique, je vais suivre une formation. Je ne sais pas encore laquelle par contre. Je reste passionnée par la gym mais j’ai besoin de faire un break. D’une part, sur l’Île il n’y avait pas de poste à pourvoir pour moi, d’autre part, j’ai envie de profiter de mes deux enfants. Je veux pouvoir travailler et profiter de mes enfants. C’est un changement de cap pour moi, j’en ai besoin.
Pour quand est prévu votre départ pour l’Île ?
Pour l’instant, on part à Rio pour les Jeux. Ensuite, on revient quelques jours et après, on décolle pour la Réunion, le 29 août, pour un nouveau départ !
Propos recueillis par Charlotte Laroche pour Gym and News
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