Isabelle Severino, une femme caméléon

Elle est l’une des grandes gloires de la gymnastique française et a marqué son époque par ses médailles internationales. Aujourd’hui propriétaire de son propre restaurant parisien, Isabelle Severino continue de garder un oeil sur la gymnastique actuelle. Que devient-elle ? Pourquoi n’occupe-t-elle plus de poste au sein de la FFG ? Et quel regard porte-t-elle sur sa carrière et sur la génération actuelle ? Elle nous dit tout. Sans langue de bois.

Isabelle Severino est ce que pourrait appeler une femme caméléon. Une femme multi-casquettes ou multi-fonctions, au choix. Et surtout, elle est souvent là où on ne l’attend pas forcément. Souvenez-vous. Alors qu’elle avait mis un terme à sa carrière de gymnaste internationale en 2000, on la retrouvait quelques mois plus tard au sein de l’équipe de France d’aérobic pour finalement la retrouver, quatre ans après, en tant que capitaine de l’équipe de France féminine de gymnastique artistique aux Jeux Olympiques d’Athènes ! C’est tout cela Isabelle Severino. Une gymnaste talentueuse au tempérament bien trempé, persévérante, obstinée et très travailleuse qui écoute son instinct.

Isabelle severino podium

En 1996, cette gymnaste élancée, qui ne passait pas inaperçue, entrait dans l’histoire de la gymnastique française et internationale en devenant la première tricolore médaillée mondiale aux barres asymétriques. “C’est un excellent souvenir, sourit-elle. En plus, c’était à Porto-Rico donc le lieu était paradisiaque ! Et au-delà du résultat sportif, l’ambiance était super chouette. Je décrochais le bronze, Elvire (Teza) terminait quatrième, il y avait du beau monde sur cette finale aux asym et j’ai pris beaucoup de plaisir.” Une médaillee de bronze qui lui permettait de lancer sa carrière internationale. Sélectionnée pour les Jeux Olympiques d’Atlanta, elle se classe alors treizième au concours général. Membre incontestable de l’équipe de France, elle décide finalement de mettre un terme à sa carrière, en 1998, après une blessure au genou. Un arrêt qu’elle pensait être définitif et pourtant…

En 2000, elle s’envole pour les Etats-Unis et évolue au sein du mythique Cirque du Soleil. En parallèle, elle monte sa propre boîte de communication puis accepte finalement une proposition d’intégrer l’équipe de France d’aérobic. Elle devient alors vice-championne du monde par équipes. Nous sommes en 2003. “Cette expérience était vraiment sympa, l’ambiance était top mais l’aérobic n’était pas un sport olympique. A l’approche des Jeux d’Athènes, je me suis dit pourquoi pas essayer de revenir à la GAF“, livre-t-elle. Après quatre ans sans entraînement intensif, Isabelle Severino signe donc son retour dans le monde de la gymnastique artistique.

C’était un enfer au début !

La reprise, elle s’en souvient encore ! “C’était un enfer au début ! J’avais beaucoup de courbatures. J’avais l’impression qu’un jour durait un mois. Techniquement, ça allait, les figures étaient toujours là et bizarrement j’avais même gommé certaines choses mais physiquement, c’était très difficile. En plus j’étais plus âgée donc je récupérais moins vite“, éclaire-t-elle. Un retour et des années en plus au compteur qui lui font apprendre à mieux travailler. “J’ai appris à optimiser mes entraînements. Je n’avais pas le choix“, précise-t-elle. Un retour qui, néanmoins, n’a pas été tout de suite vu d’un très bon oeil… “Au début, je me suis entraînée dans un club du 95 et puis j’ai demandé si je pouvais venir m’entraîner à l’INSEP. J’ai eu l’autorisation mais mon intégration a été un peu compliquée. Cela se comprend, certaines ont eu l’impression que je venais prendre une place…

En août 2004, sept mois après avoir repris le chemin de l’entraînement, elle devenait capitaine de l’équipe de France féminine pour les Jeux d’Athènes. “Après les Jeux d’Athènes, j’ai voulu continuer encore une année. Pour le plaisir. Et finalement, je deviens championne d’Europe au sol à Debrecen, en 2005 ! C’était une superbe récompense. Emilie Le Pennec décrochait une médaille d’or aux barres, Marine Debauve devenait championne d’Europe au concours général, moi au sol, on a partagé tout cela ensemble et c’était vraiment top“, se souvient-elle. “J’aimais beaucoup travailler en équipe, j’aimais cette émulation. J’étais d’ailleurs plus forte quand l’équipe était forte. Je ne suis pas du tout quelqu’un d’individualiste“, décrit-elle. Mais en 2008, alors que les Jeux de Pékin approchait, une rupture du tendon d’Achille la pousse à s’arrêter définitivement. Elle a 28 ans. “Ce qui me dérange, c’est d’avoir dû arrêter sur blessure car je m’étais fixée de m’arrêter après les Jeux de Pékin“, regrette-t-elle.

Isabelle severino 3

Aujourd’hui, la première gymnaste française médaillée mondiale aux barres asymétriques garde un pied dans le monde de la gymnastique. Le dernier week-end de mai, on a par exemple pu la retrouver au micro de SFR Sport pour commencer les finales par appareil des championnats de France élite. Avec son oeil d’expert, bienveillant, elle n’en garde pas moins son franc parler. Car elle est ainsi Isabelle Severino. “Les filles de la génération actuelle sont adorables. En revanche, je ne suis pas particulièrement convaincue du niveau technique, surtout lorsqu’on voit l’envolée des Américaines et de filles d’autres pays. Mais les Françaises ont encore le temps pour progresser et surtout elles sont sur la bonne lancée avec un très bon état d’esprit. C’est très important“, analyse-t-elle avant d’ajouter : “Il y a eu une époque de ‘down’, on a quand même été à deux doigts de ne pas se qualifier pour les Jeux, mais on recommence à avoir des résultats donc c’est encourageant pour la suite. Il faut continuer comme ça et mettre un place en vrai travail de rigueur.”

Après son retrait du haut-niveau, la championne d’Europe au sol en 2005 a également été vice-présidente de la FFG lors du précédent mandat mais a préféré se retirer au moment des dernières élections. “Je n’ai jamais réussi à trouver ma place donc j’ai préféré arrêter. Et puis ma reconversion en tant que restauratrice a été éprouvante donc j’ai dû faire des choix“, explique-t-elle. Mais elle ne ferme pas la porte à un possible retour… “Tout dépend des conditions ! S’il y a un réel projet, pourquoi pas oui, cela me tenterait bien“, lance celle qui avoue qu’elle aurait été un très mauvais entraîneur. “Je pense que j’aurais été la plus relou de la terre“, sourit-elle avant d’ajouter : “En revanche, j’aurais aimé être sélectionneur. Comme Yann Cucherat actuellement en GAM par exemple. Le côté manager me plaît bien.

Si elle ne fait plus partie de la FFG, en revanche, elle est toujours au sein de la Commission des athlètes de haut-niveau du Comité national olympique et sportif français et fait également partie du comité des athlètes Paris 2024. Des postes qu’elle occupe avec passion. En parallèle, elle s’occupe de son bar restaurant basé à République, le Rouge. “J’y suis très bien“, confie-t-elle d’ailleurs. Pleinement épanouie dans tout ce qu’elle fait et tout ce qu’elle entreprend, que nous réserve cette multiple médaillée au tempérament de feu pour les prochaines années ? Surprise, surprise…

Charlotte Laroche pour Gym and News

Revivez les barres d’Isabelle Severino lors des championnats du Monde de Porto-Rico, en 1996 :

 

Revivez le sol d’Isabelle Severino qui lui a permis de devenir championne d’Europe sur cet agrès en 2005 : 

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