Guerre en Ukraine : le club de Beaucaire engagé pour rapatrier ses gymnastes

Céline Pitre (deuxième à gauche) entourée des 4 gymnastes ukrainiennes rapatriées sur Beaucaire. Photo DR

Responsable technique du club de Beaucaire et entraîneuse, Céline Pitre a parcouru des kilomètres pour aller chercher en Pologne, à la frontière de l’Ukraine, Anastasia Bachynska, l’une de ses gymnaste licenciée au club depuis 7 ans. Depuis 3 autres gymnastes ont été rapatriées et d’autres sont en cours de rapatriement.

C’était “une évidence“. “Un devoir“. Céline Pitre ne pouvait pas laisser ses gymnastes sous les bombes. Alors elle est montée dans un avion, accompagnée de son père, président du club de Beaucaire, direction la Pologne, pour rapatrier l’une de ses gymnastes ukrainiennes et les membres de sa famille. “Depuis le début de la guerre, je passe des heures au téléphone avec elles. Ce sont mes gyms, au même titre que celles qui s’entraînent au quotidien avec moi. Elles sont licenciées chez moi depuis des années, elles s’entraînent régulièrement à Beaucaire, se sont des gyms du club. À part entière“, confie Céline Pitre actuellement sur tous les fronts. Alors lorsqu’Anastasia Bachynska lui annonce qu’elle s’apprête à fuir le pays, elle décide de l’aider. Sans hésiter une seule seconde. Nous sommes le lundi 28 février.

Grâce à des amis entraîneurs, elle entre en contact avec un entraîneur de gym polonais. “Un amour de monsieur“, comme elle l’explique. C’est lui qui se chargera d’amener Anastasia, sa mère, sa soeur et son frère à la frontière entre l’Ukraine et la Pologne. De son côté, Céline Pitre monte dans un avion depuis Marseille. “Comme tout s’est fait à la dernière minute, je n’avais pas réussi à trouver un vol direct. Alors j’ai fait une escale à Rome avant d’atterrir à Cracovie” , explique-t-elle. “Une fois arrivée à l’aéroport le mardi, j’avais prévu de louer une voiture pour retrouver Nastia et sa famille à la frontière. Mais c’est finalement mon contact en Pologne qui les a amenées jusqu’à Cracovie. Il a fait 300 kilomètres aller, 300 kilomètres retour pour les mettre à l’abri. Des personnes comme lui, il en existe très peu. Il est exceptionnel.”

Une fois tous rassemblés à Cracovie, ils ont dormi une nuit dans “une sorte de CREPS comme on connaît en France“, explique la responsable technique du club de Beaucaire. “Ensuite, nous avons fait nos tests PCR et pris l’avion le mercredi pour rentrer sur Beaucaire.”

Depuis le rapatriement d’Anastasia Bachynska, avec sa maman, sa soeur et son frère, trois autres gymnastes accompagnées de leur famille sont arrivées sur Beaucaire. “Les papas sont bloqués en Ukraine pour combattre” , livre l’entraîneuse. “L’une des gyms a également dû venir sans sa maman car cette dernière est médecin et elle a dû rester sur place. La situation n’est vraiment pas évidente.” Une cinquième gymnaste devrait également arriver prochainement, sauf si elle décide de rester en Pologne.

Pour tous les rapatriements, le même mode opératoire est mis en place. L’entraîneur polonais récupère les gymnastes et les familles à la frontière ukrainienne puis les emmène à l’aéroport de Cracovie afin qu’elles puissent prendre l’avion direction Marseille. Ensuite Céline Pitre se charge de les accueillir.

Un élan de générosité
Nous faisons face à un énorme élan de solidarité” , confie Céline Pitre. “Nastia et sa famille résident dans un appartement qui leur a été prêté. Dans les alentours de Beaucaire, il y a aussi beaucoup de mas qui ne sont pas occupés, des personnes ont donc tendu leur main en proposant leur logement. Les parents des gyms du club étaient également prêts à les accueillir chez eux. Tout le monde se sent concerné par ce qui leur arrive et tout le monde tente d’apporter son aide à sa façon. Un groupe de mamans de mes gymnastes se plient par exemple en 4 depuis leur arrivée. Elles gèrent les courses, les dons, etc. L’une d’entre-elles dispense également bénévolement les cours de français au gymnase tous les matins.

Si la partie logistique est une partie importante, l’organisation du quotidien l’est aussi. Cours de français, repas, entraînement de gymnastique, papiers, inscription à l’école, Céline Pitre se charge également de tout mettre en place. “Les gyms ont un cours de français tous les matins” , explique-t-elle. “Et afin qu’elles ne soient pas dans une certaine errance psychologique, j’ai organisé leur journée entre cours de français, entraînement, repas, etc, afin qu’elles puissent être occupées. C’est important pour elles.” D’un point de vue psychologique, les gyms tentent de faire face à ce qui leur arrive. “C’est quelque chose de très personnel, qui est propre à chacun. Chacune réagit à sa manière. C’est un peu comme pour un deuil. Je suis là pour les écouter mais je ne les force pas à parler si je sens qu’elles n’ont pas envie de parler. Je ne fais aucune intrusion. Avant d’arriver à Beaucaire, elles étaient clairement sous les bombes, comment aurais-je pu les laisser là-bas ? C’était inenvisageable pour moi. Maintenant, je vais les aider au maximum pour les aider à se reconstruire.

À l’entraînement, il a également fallu s’adapter. “Les choses se mettent en place tranquillement. Google Traduction est mon meilleur ami actuellement” , lance Céline qui malgré le contexte fait son maximum pour leur permettre de sentir bien. Même si tout n’est pas simple. À l’image de ce vendredi matin.  “C’était pas simple pour elles ce matin car elles ont eu de mauvaises nouvelles.” Et puis finalement l’entraînement leur a redonné le sourire le temps d’un instant. “Comme quoi, un entraînement de gymnastique est une thérapie à lui seul”, sourit-elle.

Désormais Céline Pitre se concentre sur tout le côté administratif. Indispensable pour que ses gyms et leur famille puissent obtenir le statut de réfugiés. “Je suis soutenue et aidée par la mairie de Beaucaire, ils font un travail énorme auprès de la Préfecture” , félicite-t-elle. “Une fois qu’elles auront leurs papiers, elles pourront alors se faire soigner, être scolarisées, c’est une étape essentielle. Et si tout va bien, après les vacances d’avril, elles pourront aller à l’école.

Quant au programme gymnique et à la première journée du Top 12 qui se déroulera le 26 mars prochain, pour le moment la responsable technique du club ne se projette pas. “Habituellement, tout est prêt, tout est millimétré mais là je n’ai pas la tête à ça. Il va falloir s’en occuper mais ce n’est pas la priorité. Vu la situation, ce sont les gyms qui me diront si elles se sentent prêtes pour matcher ou pas. Ce sont elles qui décideront. C’est leur bien-être avant tout.” Mais pour l’heure, il est trop difficile de voir si loin. Alors chacun avance un peu au jour le jour avec cette belle intention de leur offrir un quotidien loin des bombes et plus serein, même si tant que la guerre se poursuivra la sérénité sera difficile à trouver.

Vous souhaitez apporter votre soutien et faire un don ? Une cagnotte a été lancée. Pour y accéder, cliquez ici. 

 

 

 

Article précédentCoupe du monde de Doha : Ivan Kuliak et le Z qui fâche
Article suivantTest INSEP : les Top 3

LAISSER UN COMMENTAIRE

Merci d'inscrire votre commentaire !
Merci d'indiquer votre nom