Entraîneur au club d’Avoine-Beaumont, Gina Chirilcenco a posté un long message sur la page Facebook du club avoinnais afin de dénoncer “une campagne de harcèlement et de menaces” de la part de la Fédération Française de Gymnastique envers les gymnastes, les entraîneurs et le club.
Les mots sont forts, le message est clair. D’ordinaire assez silencieuse, Gina Chirilcenco, a parlé avec ses tripes. Un véritable “cri du coeur” comme elle le dit elle-même dans lequel elle décrit la situation dans laquelle son club se trouve depuis quelques mois. Posté aux alentours de 19h45, le message comptait déjà plus de 230 partages à 20h30, entraînant par la même occasion un véritable vent de révolte et d’indignation. Si une petite bise avait commencé à se lever suite au post d’Alisson Lapp et de Julien Saleur sur leur compte Instagram respectif afin de dénoncer certains agissements dont ils se disent victimes de la part de la Fédération Française de Gymnastique, celui de Gina Chirilcenco a entraîné le début d’une véritable tempête.
Dans son post, l’entraîneur d’Avoine-Beaumont, qui a quitté la Roumanie à l’âge de 19 ans pour venir s’installer en France, un “pays libre” comme elle écrit, parle du nouveau projet olympique mis en place par la Fédération et qui consiste à regrouper les gymnastes engagé.e.s sur le cycle olympique de Paris 2024 sur une seule et même structure en GAM (à savoir l’INSEP) et deux structures en GAF (à savoir l’INSEP ou Saint-Etienne). Depuis l’annonce du projet, nombre de gymnastes s’y opposent et regrettent “le peu d’écoute qu’on leur accorde” nous a-t-on confié à plusieurs reprises. Si jusque-là, un bras de fer avait commencé à se mettre en place en privé, les choses ont pris une toute autre tournure en ce lundi de Pentecôte avec la publication de ce post :
“Merci à tout ceux qui vont prendre le temps de lire mon petit message.
En fait, il s’agit plutôt d’un cri du cœur, de colère et d’incompréhension face à ce qu’on vit depuis plusieurs années mais surtout depuis les six derniers mois, les gymnastes, les parents du club d’Avoine Beaumont Gymnastique mon mari Marc et moi-même.
Je viens de Roumanie que j’ai quitté à l’âge de 19 ans pour découvrir un pays libre : la France ! Je travaille à Avoine depuis 28 ans dans le même endroit un petit jardin magique qu’on a construit petit à petit avec pas moins de six Présidents de Club successifs qui ont tous participé à son développement.
Je n’avais à l’époque, aucune ambition professionnelle particulière à part celle de faire découvrir aux petites filles ce sport magique qu’est la gymnastique. Les années ont passé mes premières générations de gymnastes ont grandi, fait des études, se sont mariées, fait des enfants, et lorsqu’elles m’ont amenées leurs propres enfants à la salle il y a 10 ans déjà, j’ai su que mon travail avait été compris bien au-delà du simple enseignement technique. Partager une passion et faire aimer la gymnastique aux enfants a toujours été ma priorité et mon mode de fonctionnement, établir une confiance réciproque avec les enfants et les parents est la meilleure manière de faire aimer la gymnastique, de nouer des amitiés, de partager, de vivre tout simplement.
Un travail idéal, une vie rêvée…
Mais, il y a six mois environ, la Fédération Française de Gymnastique a décidé de changer en cours de Cycle Olympique le projet Fédéral (2017-2024). Le principe de regroupement des athlètes, garçons, G.A.F., G.R., Trampolinistes est de retour malgré le fiasco de cette démarche déjà expérimentée de 2009 a 2012, très vite abandonnée en 2013 par le même président « Mr James Blateau ». pour mettre la gymnastique de performance dans les clubs, clubs formateurs et centre d’entraînement Top 12. Projet sur lequel le Président a été élu, un programme que nous avons suivi à la lettre avec enthousiame. Ce qui compte à mes yeux, ce ne sont pas les médailles ou les résultats, ce qui est important pour moi c’est le bien-être des athlètes et nous savons tous que si un ou une athlète se sent bien dans sa tête et dans son environnement, il ou elle a beaucoup plus de chance d’être performant, notre rôle est de trouver l’équilibre entre le physique, le psychologique, le technique et la vie quotidienne.
Nous avons discuté dès novembre de cette proposition avec les gymnastes concernées et leurs parents : Kaylia Nemour, Carolann Heduit, Léa Franceries et Maëva Guery. Aucune ne souhaitait à ce moment-là changer de vie et de lieux d’entraînement. Ce qu’elles ont parfaitement indiqué en mars et avril, dans différents courriers adressés à Madame Legras, Mr Rabaud, Mr Baguelin et Mr Blateau le Président de la Fédération.
Ce que je croyais, moi naïvement peut être, c’est que des jeunes femmes qui avaient construit leurs projets gymniques depuis le CM2 pour certaines auraient leur mot à dire, qu’elles avaient le choix.
Malgré plusieurs réponses négatives des gymnastes renvoyées au D.T.N. en expliquant bien leurs choix de poursuivre leur parcours dans leur club, une campagne de harcèlement et des menaces s’abattent sur elles, sur le club et sur nous, leurs entraîneurs.
Par le passé quatre de nos Gymnastes ont changé de structures d’entraînement et nous les avons accompagnés dans leur démarche, car c’était leur choix,. (Youna DUFOURNET, Alyson LEPIN, Léanne BOURGEOIS et Claire PONTLEVOY la saison derniére) nous avons toujours respecté leur décision.
Aujourd’hui, Carolann HEDUIT et Kaylia NEMOUR, si elles ne changent pas de structure d’entraînement, se voient menacées de perdre leurs « aides individualisées », attribuées aux sportifs de hauts niveaux par l’Agence National du Sport ; quant à Léa FRANCERIES et Maéva GUERY, qui ont essuyé deux refus pour intégrer le parcours de performance fédéral, alors même qu’elles avaient fait les minimas demandés, elles doivent, elles aussi, absolument changer si elles veulent entrer maintenant dans ce parcours.
Mais pourquoi tant de résistance au changement me direz-vous ?
D’abord, tout simplement pour respecter le choix des gymnastes, pour la liberté individuelle de chacune, pour respecter leur travail. Je les vois tous les matins à l’entrainement le nez dans la magnésie dès 07h30, à vouloir se surpasser, à ne rien lâcher et à travailler pour pouvoir intégrer un jour l’équipe de France ou y garder leur place. Des jeunes filles courageuses qui font l’impasse sur les jours fériés, les dimanches, les vacances en famille et l’anniversaire de leurs copines. Des jeunes femmes qui ont des valeurs, des projets et des rêves, la Fédération bafoue leur droit, la Fédération veut piétiner leurs rêves.
Ensuite car le projet n’a pas été construit de manière collective en intégrant tous les acteurs concernés, en l’état le projet est imposé.
Lors d’une réunion qui s’est finalement déroulé le 24 avril au sein de club d’Avoine en présence des 4 gymnastes, de leurs parents, ainsi que la Présidente du club, Madame Stéphanie Nemour et moi-même nous avons compris qu’il n’y avait aucune écoute de la part de la fédération. En présence du DTN, Mr Kévin Rabaud et du Vice-Président chargé du Haut niveau, Mr Xavier Baguelin nous avons assisté pendant près de 5 heures à une réunion durant laquelle ces deux responsables étaient en total décalage avec la réalité du quotidien des gymnastes. Nous avons constaté un total mépris de leur part vis à vis de l’investissement des athlètes, de leur parents et du club. Les deux dirigeants ont soutenu pendant toute la réunion que l’organisation du club, les gens qui gravitent autour de celui-ci tel que, médecin, kiné, instituteurs, professeurs, bénévoles, élus étaient incompétents ou pas suffisamment compétent pour aider ses gymnastes à progresser et que si elles n’intégraient pas l’INSEP au plus tard le 1er septembre prochain et je cite, Kévin Rabaud: «aucune sélection possible en équipe de France» Celui-ci s’est même permis de dire à Carolann que son titre de Championne de France Sénior Elite n’avait pas grande valeur, allant même jusqu’à lui indiquer que sa très belle performance aux Jeux Olympiques de Tokyo était attribuée… au COVID-19 et à Martine George qui ne l’a pourtant accompagné que pendant la phase finale sur place, lors du déroulement des Jeux, son entraineur principal se voyant refusé d’être à ses côtés.
Pendant cette réunion les parents de trois gymnastes se sont vu refuser un échange individuel avec Messieurs Kévin Rabaud et Xavier Baguelin alors que les gymnastes avaient simplement émis le souhait que celui-ci se déroule en ma présence. J’ai assisté avec désarroi a une scène surréaliste ou des Parents en pleurs ont été éconduits gentiment à la porte de la salle de réunion ! Mais peut-être ne savaient-ils pas que les parents de Léa Francerie font depuis 5 ans, 16 heures de route chaque semaine depuis Bordeaux afin que leur fille ait une vie de famille et qu’en même temps elle puisse vivre son rêve gymnique. La même Léa Francerie qui vient de gagner 4 médailles d’or lors des Gymnasiades pour l’équipe de France. (Championnat du monde scolaire). Et qui n’est toujours pas aidée finaciérement par la Fédération.
Le D.T.N. et la D.H.N. Mme LEGRAS ne voient ici certainement que des chiffres, une gym de plus ou de moins cela n’a pas d’importance ? Trois de plus qui arrêtent ce n’est pas grave. La Fédération à oubliée qu’il s’agit ici de la vie de ces gymnastes, de leurs choix, de leurs rêves. La Fédération à oubliée qu’il s’agit de jeunes femmes, La Fédération a oubliée que ce qui est important c’est d’abord l’humain, pas la performance.
Au final, que nous restent-il, à nous les éducateurs, en dehors des performances, il reste le plus important : la satisfaction de voir ces jeunes filles grandir, évoluer à travers leur pratique sportive, s’épanouir, se construire une vie basée sur des valeurs de courage, respect et convictions.
Bien sûr en agissant de la sorte les deux responsables fédéraux n’ont pas imaginé la détresse ainsi crée lors de la semaine qui à suivie leur venue. Ils n’ont pas mesuré que leur absence de sentiment et leur indifférence à l’égard des gymnastes ai créé un tel choc…psychologique que Maëva Guerry ait émis le souhait d’arrêter la gym et est rentrer chez elle dès le jeudi pour finalement faire un break de 10 jours avant de revenir à l’entraînement. Ses parents nous annonçant que Maëva tentera finalement l’aventure à l’INSEP la saison prochaine. Choix que nous respectons car c’est le sien.
Elles sont fortes et elles ont réussi à se relever … mais jusqu’à quand ?
Lors de l’inscription sur le portail haut niveau, elles ont émis le souhait une fois de plus du maintien de leur présence dans la structure actuelle qui est le Club d’Avoine. Elles ont eu comme réponse : un « transfert conditionnel » sur le pôle de Saint Etienne … allez comprendre ! Bien sur tout ceci sans leurs accord et sans leur consentement préalable.
Comment ne pas évoquer la situation de Kaylia Nemour, (championne de France aux Barres asymétrique en 2021). Kaylia est au club depuis sont plus jeune âge et à l’entraînement au quotidien avec moi depuis 6 ans. L’année derniére, elle s’est faite soigner pour une maladie de croissance nommée ostéochondrite, en juillet 2021, par une intervention chirurgicale qui semblait selon le « staff médical » et son chirurgien la meilleure option pour qu’elle reprenne avec les meilleures chances de poursuite de sa carriére de gymnaste.
Nous avons bien entendu respecté à la lettre les instructions de son chirurgien, quant au temps d’immobilisation post opératoire, et de rééducation, puis nous avons effectué un programme de réathlétisation. A l’approche de la date de reprise le 10 mars 2022, (Après 9 mois d’arrêt) elle était très contente car elle vit pour la gym, elle dort gym elle respire gym, Bingo ! le chirurgien donne son feu vert, elle peut reprendre ! mais avant, nous lui faisons passer sa visite médicale pour le certificat de performance que son médecin lui délivre. Nous organisons une réunion avec ses parents et elle-même, nous l’informons qu’il s’agit d’une reprise progressive, malgré son envie de reprendre un entrainement complet, ce qu’elle a compris et acceptée.
C’était sans compter sur le médecin Fédéral, le Docteur Pierre Billard qui lui interdit « à distance et sans l’avoir consulté » la reprise de l’entraînement.
Ah oui, c’est vrai, j’oubliai que de son point de vue, ni le chirurgien, ni le médecin du sport de Kaylia, ni notre Kiné, ou notre ostéopathe ne sont suffisamment compétents…pour évaluer et mettre en place un programme de reprise !
Malheureusement pour l’équipe de France, Kaylia et ses parents ont pris une autre décision et ont demander à la F.I.G. une licence en faveur du pays de son père, l’Algérie, qui lui a proposé un projet sportif adapté à sa situation personnelle. A ce jour la Fédération Française s’oppose à ce changement alors que règlementairement Kaylia n’a plus de licence F.I.G. valide depuis presque 1 an…allez comprendre !
Pourquoi j’écris tout cela maintenant malgré une méfiance profonde envers les réseaux sociaux. Parce qu’en fait, les gymnastes Avoinaises n’ont pas été entendues et elles vivent cela comme une injustice profonde et se heurtent au « mur » qu’est la position de la Fédération Française de Gymnastique. Elles essayent également de comprendre le silence de l’Agence Nationale du Sport, laquelle n’a pas répondue aux mails d’appels au secours que Carolann HEDUIT leur à envoyés ainsi que le stress quotidien qu’elle subit sans aucune réponse de leur part. Pourquoi j’écris tout cela maintenant ? Parceque j’ai appris il y a quelques semaine déjà que le Docteur Pierre Billard à fait un signalement pour « mise en danger d’autrui » et parle à notre encontre « d’une emprise générale ». Des accusations graves qui interviennent justement au moment où la Fédération veut «extraire» les gymnastes Avoinaises et demande à mon mari avec insistance de rejoindre l’INSEP en septembre et de quitter sa famille pour un projet qui ne durera que 2 ans.
Vous croyez aux coïncidences !
Pourquoi j’écris tout cela maintenant ? Parce que je viens de me rendre compte que depuis 30 ans de métier en France, je retrouve actuellement les travers que j’ai connus jeune gymnaste, en Roumanie dans les années 80.
Je viens de comprendre que la Fédération est prête à tout pour obtenir ce qu’elle veut, y compris jusqu’à salir notre réputation d’entraîneur et celle du Club.
Merci de m’avoir lu.
Gina CHIRILCENCO”
Difficile d’avoir un avis sur cette “affaire” car il faudrait lire ou entendre les 2 parties …. mais que – à seulement deux ans des JO – la Fédération Française (FFG) décide la centralisation des entraînements relève du pur et simple amateurisme. La brutalité de la FFG – si on en croit les propos – rajouterait au malaise. Triste.