Clara Beugnon : “C’est une partie de moi qui est en train de mourir”

Pensionnaire de l’INSEP depuis 2014, Clara Beugnon doit plier bagage. Une décision imposée par la Fédération et qu’elle a du mal à encaisser. Où rebondir ? Comment ? La sociétaire du club d’Epinay-sous-Sénart se confie avec justesse et émotion. Une manière pour elle de dire au revoir.

Impossible pour elle de dire adieu. Impossible de prononcer un discours lors du pot de départ organisé à l’INSEP, ce lundi 27 juin, jour de l’annonce officielle des candidats sélectionnés pour les Jeux Olympiques. Impossible, car Clara Beugnon avait la gorge nouée. Le coeur serré. Petit joyau de la gymnastique française, la sociétaire du club d’Epinay-sous-Sénart, trop peu épargnée par les blessures, doit malheureusement plier bagage et quitter l’INSEP. Pas par choix. Une décision qu’elle a apprise lors d’un débriefing organisé quelques semaines avant les championnats de France avec l’entraîneur national. Ce jeudi de mai, c’est comme si elle avait reçu un gros coup sur la tête. Sonnée, elle ne s’attendait pas à telle décision. “Je sais que je n’ai pas eu de résultats sur papier cette année et que j’ai eu beaucoup de blessures mais j’ai encore tellement de choses à prouver”, regrette-t-elle avant d’ajouter : “En plus, on n’a rien à me reprocher à part ce manque de résultats sur papier. J’ai toujours été motivée à l’entraînement et je sais que j’ai encore une grande marge de progression. C’est dur. Vraiment très dur. Je ne comprends pas. C’est une partie de moi qui est en train de mourir.

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Obligée de quitter l’INSEP, elle cherche donc une nouvelle manière de rebondir. Intégrer un pôle lui est impossible. La raison ? Elle ne figure plus dans le PES (Plan d’Excellence Sportive). “J’ai vraiment cette impression qu’on m’empêche de continuer. Cette impression qu’on me met à la porte. Je ne pensais pas devoir arrêter le haut niveau à même pas 17 ans. J’ai encore tellement de choses à prouver“, lance-t-elle. Accompagnée et soutenue par ses proches et par son entraîneur de club, Diata, elle réfléchit donc à la manière dont elle va pouvoir rebondir. Va-t-elle s’entraîner à Epinay-sous-Sénart, son club de coeur, aux côtés de Diata, son coach en qui elle a entièrement confiance ? Ou alors va-t-elle intégrer un autre club ? Combs-La-Ville ? Saint-Etienne ? Haguenau ? Des pistes parmi tant d’autres. “Pour l’instant, je ne sais pas du tout. On réfléchit, on discute, j’ai besoin de me poser un peu. Les vacances vont me permettre d’y voir plus clair”, confie celle qui doit désormais se construire une nouvelle vie. “C’est tellement flou dans ma tête. Depuis la sixième, je suis dans une structure aménagée. Chaque matin, je me levais avec des objectifs précis en tête, avec cette envie de disputer les Jeux Olympiques. Maintenant, je vais me lever et je vais me demander : ‘Pourquoi je me lève?’ Il va falloir que je me trouve de nouveaux objectifs. Et retourner dans un cursus classique pour faire ma Terminale, ça me fait tellement peur”, soupire-t-elle. “Si encore, ça avait été ma décision, j’aurais vécu les choses différemment mais là c’est quelque chose qu’on m’impose. J’ai eu beau m’expliquer avec la Fédération mais leur décision était déjà prise, ça n’a rien changé.”

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Pour l’heure, la sociétaire du club essonnien envisage de se faire plaisir une dernière fois avant de plier définitivement bagage. Sélectionnée pour participer à la deuxième édition du All Stars Gym, en Alsace, elle compte bien se faire plaisir ! “C’est une sorte de compétition/gala avec un système de points. Nous serons réparties en deux équipes. Une équipe bleue et une équipe rouge. Une gym de l’équipe bleue va passer et ensuite ce sera au tour de l’équipe rouge. La meilleure des deux remportera le point”, explique-t-elle. Et d’ajouter :”Je ne vais pas me mettre la pression, je veux profiter de mon moment. Camille (Bahl) l’a fait l’an dernier, elle a adoré. Cette année, elle sera là pour me coacher. Peut-être que Youna aussi sera là pour me coacher”, se réjouit celle qui n’a jamais caché sa grande amitié pour l’ancienne médaillée mondiale.

Mais si elle ne sait pas encore de quoi son avenir sera fait, la lycéenne en STMG compte bien montrer qu’elle a encore des choses à prouver. Et pourquoi pas, finir par réintégrer l’INSEP dans quelques années grâce à de bons résultats ? “Je n’y crois pas trop. J’ai envie d’y croire et de montrer qu’ils ont eu tort, je garde cet espoir là dans un coin de ma tête, mais je pense qu’on ne voudra pas me reprendre. On me l’a fait comprendre“, lâche-t-elle avec regret. Car des regrets, elle en a. Un en particulier. “Ce que j’aurais voulu, c’est annoncer mon départ moi-même. Pas que la nouvelle se répande à la suite de la publication d’une liste qui mentionnait les arrivées et les départs à la rentrée prochaine. Après la diffusion de cette liste, j’ai reçu des tonnes de messages où l’on me demandait pourquoi je partais. Mais ce n’était pas moi qui voulais partir ! A ce moment-là, je n’arrivais pas à en parler”, précise-t-elle. Aujourd’hui, les messages continuent d’affluer. Dont certains sont d’un réel soutien. “Je reçois beaucoup de messages d’encouragement, je ne m’attendais pas à ça. Certains me remontent vraiment le moral“, sourit-elle.

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En vacances à partir de samedi soir, elle se pose, certes, tout un tas de questions mais regarde avec fierté tout le chemin qu’elle a parcouru jusque-là. Elle se souvient avec émotion de cette première fois où elle a reçu son équipement France, en 2013. “C’était le plus beau jour de ma vie“, se souvient-elle. Elle se remémore aussi son évolution qui lui a permis d’intégrer le Pôle de Meaux, puis celui de Marseille avant d’intégrer le cercle si fermé de l’INSEP. “J’étais tellement fière à chaque fois. Tous ces changements me montraient que j’évoluais”, analyse-t-elle. Mais Clara se souvient également de ce jour de 2011 où, à Toulouse, elle chute sur la tête, au sol, perdant ainsi connaissance. “J’ai l’impression que depuis ce moment-là que j’ai eu un blocage. Car après, j’avais une appréhension en compétition. J’avais peur de me blesser et je me blessais”, lâche-t-elle. Une chute qui, si elle n’a jamais eu lieu, aurait peut-être pu changer le cours de sa vie. Mais il est impossible de réécrire l’histoire et de changer une partie du passé. Par contre, il est toujours possible de tenter d’influer sur son futur… Une nouvelle page s’ouvre pour Clara Beugnon, petite perle de la gymnastique française qui se verrait bien entraîneur national d’ici quelques années, et qui s’apprête à entamer une nouvelle vie. Une nouvelle vie qu’on lui souhaite toute aussi belle…

Propos recueillis par Charlotte Laroche pour Gym and News

Au revoir
Clara a également à coeur de remercier les personnes qui lui ont permis d’en arriver jusque-là : 
“Je tiens à remercier les entraîneurs du Pôle de Meaux, Eric, Nathalie et Fabrice ; les entraîneurs du Pôle de Marseille, François, Pierre et Adi. Je tiens particulièrement à remercier Elvire Teza. J’ai adoré sa manière d’entraîner et c’est elle qui m’a appris à faire le flip vrille sur la poutre. J’étais la deuxième Française a savoir faire ça. Merci à elle. 
Je tiens également à remercier les entraîneurs de l’INSEP : Nellu, le couple chinois et Cathy. Enfin, je souhaite dire merci à mes parents, à ma famille, à mes proches. Ils m’ont toujours soutenue et sans eux, je n’en serai certainement jamais arriver là.”

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7 Commentaires

  1. La solution de partir aux USA pour continuer de vivre la gymnastique avec des études est une solution très intéressante. Avec son niveau, il ne devrait pas y avoir de souci … mais qu’en est-il des études ? Des équipes gymniques (UCLA par exemple) tournent dans la NCAA dans des ambiances qui valent largement la tristesse observé dans le sport de haut niveau. Et puis quelle expérience!

    • Le niveau des gymnastes dans les meilleures équipes universitaires américaines est très élevé (beaucoup de recrutement elite). On attend pas seulement un bon niveau, mais des formes parfaites, chose qui manque cruellement aux gymnastes françaises (l’execution des mouvements compte presque plus que la difficulté). Autre gros point négatif, il faut scorer correctement au TOEFL, ce qui demande un niveau élevé en anglais, sinon pas de recrutement.
      Et puis le système américain n’est pas si gentil qu’il n’y paraît, les études sont hors de prix (40 000 à 60 000$/an) et les équipes n’hésitent pas à supprimer les bourses si pas de résultats en compétition et en cours. C’est un système que je connais assez bien, et que je ne conseil pas aux français non bilingues.

  2. […] Son histoire vous aura émus. Moi aussi. Obligée de quitter l’INSEP pour manque de résultats, Clara Beugnon tente désormais de rebondir du côté de Saint-Etienne. Un départ forcé qui aura fortement marqué cette gymnaste talentueuse, peu épargnée par les blessures. Désormais en sports études à Saint-Etienne, l’ancienne pensionnaire de l’INSEP est loin d’avoir baissé les bras et continue de croire en ses rêves. (Lire ici) […]

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