Pensionnaire de l’INSEP depuis 2020 et membre du collectif France depuis ses années espoir, Arthur Ballon vient d’intégrer la prestigieuse université américaine d’Oklahoma pour les quatre prochaines années, avec qu’il va découvrir la NCAA, le célèbre championnat universitaire américain. Un nouveau projet pour une nouvelle vie qu’il raconte.

Spot Gym : Arthur, tu as intégré l’université américaine d’Oklahoma, quel est l’origine de ce projet ?
Arthur Ballon : Tout a commencé il y a un an. Il faut savoir que j’ai commencé la gym aux États-Unis quand j’étais petit et ça a toujours été un pays qui m’a beaucoup attiré. J’adore leur culture, j’ai toujours été impressionné par la NCAA, j’ai une famille qui a toujours beaucoup bougé et j’ai l’impression que c’est un peu familier pour moi de vouloir partir à l’autre bout du monde pour tenter de nouvelles expériences. Et puis, c’était un moment où j’avais besoin de changement. Ça faisait trois ans que j’étais à l’INSEP, je sortais d’une période assez compliquée donc mon envie de partir aux États-Unis est venue tout naturellement. Comme un nouveau challenge. J’en ai parlé à mes parents, j’ai pris contact avec Léo (Valentin) qui a matché en NCAA, il m’a donné quelques conseils très utiles, dont celui d’envoyer des vidéos aux universités qui m’intéressaient et tout a commencé comme ça.

C’était à quelle période ?
En juillet 2022, juste après les championnats de France élite, à Élancourt.

Une fois que tu as pris la décision de partir, quel a été le cheminement qui a abouti à ton intégration au sein de l’université d’Oklahoma ?
J’ai fait quelques vidéos de toutes mes « skills » en gym, de certaines de mes compétitions avec une petite présentation de moi en anglais et je les ai envoyées aux six meilleures universités. Très vite deux-trois universités m’ont répondu positivement dont Michigan et Oklahoma. J’étais content car leur niveau académique est vraiment top et puis elles sont toutes les deux en tête du classement NCAA derrière Stanford. À cette époque-là, je n’étais pas encore très au courant de toutes les démarches administratives qu’il fallait faire pour intégrer une université américaine or c’était une étape essentielle qui s’est aussi révélée être très longue et fastidieuse. En janvier / février j’ai vraiment commencé ce processus d’inscription, j’ai envoyé mon dossier aux universités et encore d’autres vidéos aux entraîneurs. Mark Williams, Head Coach de l’université d’Oklahoma a commencé à vraiment se rapprocher de moi à ce moment-là en me disant qu’il était très intéressé par mon profil. Il faut signaler que cela correspondait aussi à la période où je faisais le top 12 avec mon club d’Orléans et lors d’une rencontre contre Boulazac nous nous sommes retrouvés face à une équipe dont un des membres était Yul MoldauerCe jour-là, j’ai fait un super match, je suis allé le voir à la fin de la rencontre pour discuter un peu avec lui et il se trouve qu’il avait fait ses études à Oklahoma. Entre tout le bien qu’il m’a dit au sujet de Oklahoma et l’excellent contact que je tissais au fur et à mesure avec Mark, mon choix a été très simple à faire : GO OU (Oklahoma University) ! J’ai beaucoup travaillé le TOEFL, j’étais tout juste, mais là encore Mark a été génial et a su faire le nécessaire pour pousser ma candidature. Elle a été acceptée en mai. C’était comme une délivrance après des mois d’attentes et j’étais super content.

Pour combien de temps pars-tu là-bas ?
Je pars pour quatre ans. Et à la fin, j’aurai un diplôme d’une grande université américaine.

Quelles études suis-tu ?
Pour l’instant ce n’est pas encore bien défini mais je pense m’orienter dans une major qui s’appelle “ Health and exercice science”. Cela se rapproche en France de coach sportif, préparateur physique. Je voulais une major qui m’était familière avec le sport pour ne pas me rajouter encore plus de difficultés au niveau académique.

Tu disais avoir débuté la gym aux Etats-Unis, peux-tu revenir sur cette période ?
Oui, j’ai débuté la gym aux Etats-Unis. Mon père travaillait là-bas et quand j’avais six mois, on est tous partis vivre à Chicago. Rapidement, mes parents m’ont inscrit à la gym. J’y ai vécu jusqu’à mes 5 ans avant de revenir en France. À mon retour, je voulais absolument continuer la gym, ce que j’ai fait. Mon père travaillant dans le tennis, au début je faisais du tennis et de la gym en même temps. Quand je suis entré au pôle de Lyon en Sixième, il a fallu faire un choix car je ne pouvais plus continuer les deux sports, et j’ai naturellement choisi la gym car c’était la gym qui me faisait le plus kiffer.

Tu as évoqué un peu plus haut une année compliquée à l’INSEP, c’est-à-dire ?
Je sortais de ma première année senior et j’ai pris un bon coup sur la tête. Je n’ai pas peur de le dire, je pensais qu’après mes années juniors, la transition allait bien se passer car j’étais bien au niveau technique mais finalement le cap entre junior et senior ça n’a rien à voir et la marche est vraiment haute. Ça a été un coup dur mais ça m’a bien servi de leçon. Et puis au niveau des études, ce n’était pas évident non plus. Je faisais un BTS marketing commercial, ça ne me plaisait pas et comme j’étais dans le groupe B et pas dans le groupe CPO (olympique), mes horaires d’entraînement ont changé et tout tombait en même temps. Il m’était donc impossible de suivre les cours, sinon je ne pouvais plus m’entraîner. L’année a donc été assez compliquée. Mais je ne peux m’en prendre qu’à moi de m’être retrouvé dans cette situation car c’est à la suite de mes résultats et de ma saison précédente que je n’ai pas pu intégrer le groupe CPO ce qui ne m’a pas permis d’adapter mes cours. Si j’avais fait une bonne saison, j’aurais eu des horaires d’entraînement différent. C’est aussi pour ça que j’ai décidé de partir car je n’arrivais plus à trouver une voie qui m’intéressait réellement et qui me permettait de continuer de performer en gym. Aux États-Unis, le double cursus est exceptionnel, la gym et les études sont prises à leur juste considération, ce ne sont pas les études avant la gym ou la gym avant les études, il n’y a pas un domaine plus important que l’autre.

Vas-tu pouvoir bénéficier d’une bourse ?
Oui. Heureusement, cela nous permet avec mes parents d’en supporter les coûts.

Arthur Ballon, membre de l’équipe Top 12 du club d’Orléans. Photo Amandine Vallée / Spot Gym

Tu pars pour quatre ans, quel lien comptes-tu garder avec la France pendant ces quatre années ?
L’INSEP me soutient dans mon projet, la fédération aussi. Je fais tout ça dans le but de m’épanouir de nouveau et de progresser en gymnastique pour faire remonter sur le podium NCAA mon équipe de l’université d’Oklahoma et bien entendu aussi réintégrer l’équipe de France. Je veux garder un lien fort avec la France et ils ont bien compris mon projet. Je reviendrai tous les ans pour la revue d’effectifs et les Championnats de France élite. J’ai également pour projet de revenir pour quelques rencontres Top 12 avec mon club d’Orléans. Pas pour toutes les rencontres car la NCAA reste la priorité, mais dès que je le peux, je reviendrai. J’enverrai également régulièrement des vidéos à Laurent Barbieri (le directeur du haut-niveau masculin, NDLR) avec l’espoir de réintégrer le plus rapidement possible l’équipe de France avec les Jeux Olympiques de Los Angeles 2028 en ligne de mire.

Tu es arrivé aux Etats-Unis le 16 août dernier, cela fait plus d’un mois que tu es installé, comment se sont passées ces premières semaines ?
Je commence petit à petit à trouver mes marques. Je ne vais pas mentir, je suis épuisé en fin de semaine… et je n’ai qu’un seul jour, le samedi, pour récupérer totalement ! Ce n’est pas du tout le même rythme qu’en France, et j’ai dû gérer pas mal de choses à la fois. Mais j’ai eu la chance que mes parents m’accompagnent et m’installent dans mon nouveau chez moi. Je pense aussi que cela les rassurait de voir où j’allais habiter durant mes quatre prochaines années. Les 4-5 premiers jours, j’ai visité l’université qui est tout simplement immense. Je n’ai jamais vu ça ! C’est une vraie ville. Pour donner une idée, il y a plus de 25 000 étudiants et l’université dispose d’un stade de foot (américain) de 85000 places. C’est le stade de France dans l’université (rires) !… et il est plein à chaque rencontre ! Je n’en reviens toujours pas. Après bien sûr, je suis allé au gymnase pour rencontrer ma nouvelle équipe composée de 22 gymnastes.

Comment s’est passée cette découverte du gymnase et de ton équipe ?
Le gymnase est neuf et il y a tout ce qu’il faut pour bien travailler. Tout s’est bien passé et j’étais super content de les rencontrer en vrai car j’avais déjà pris contact avec certains via les réseaux sociaux. J’ai été super bien accueilli par toute l’équipe et notamment Mark ainsi que les 3 autres coaches Valery, Josh, Genki et les capitaines de l’équipe Jack et Daniel.Le lundi suivant, j’ai fait mon premier entraînement avec toute la team, j’avais une adrénaline de fou furieux ! Cela faisait une semaine et demie que je ne m’étais pas entraîné, mais j’étais en super forme. Mais après une semaine j’ai découvert ce qui m’attendait réellement toutes les semaines suivantes…pour les 4 prochaines années… et je vous promets, au début, ça peut faire peur… Mais vraiment (rires) !

À quoi vont ressembler tes journées ?
Pour donner une idée de journée type, je commence à 7h du matin pour faire musculation, renfo et cardio à la salle de muscu. La salle de muscu se trouve dans le stade de football américain et c’est tout simplement immense. Ensuite j’ai 2 à 3h de cours. Cela dépend des jours et je retourne à l’entraînement en début d’après-midi jusqu’à ce qu’on finisse le programme déterminé pour la journée. Cela fait parfois des longues journées, surtout pour moi car tout est en anglais ce qui me demande deux fois plus de concentration. Mais après un mois passé ici, je commence à m’habituer à cette charge d’entraînement très dense. On fait beaucoup de préparation physique, et au début j’ai eu du mal à enchainer avec l’entraînement qui suivait, mais en parlant avec les gars de la team, ils m’ont tous dit qu’ils sont tous passés par là et qu’au fil du temps j’allais m’habituer pour ensuite en voir les bénéfices sur mon entraînement en me sentant beaucoup plus fort et endurant. Pour l’instant ce n’est pas encore le cas, car je suis toujours dans le processus d’adaptation, mais je sens tout de même mon corps changer et encaisser une charge de travail plus grosse.

Concernant les cours, pas trop difficile l’adaptation ?
En ce qui concerne les cours, c’est vrai que ça change de tout faire en anglais. On va dire que pour l’instant, je comprends 60 à 70 % lorsque le professeur parle mais je ne m’en sors pas trop mal. Ce qui est top, c’est qu’ils ont fait en sorte que je commence par des cours assez généraux histoire que je ne sois pas trop perdu pour qu’ensuite cela devienne un peu plus simple avec l’anglais et suivre ce nouveau rythme pour le second semestre.

Comment s’est passée ton intégration avec les membres de ton équipe ?
Avec les gars de la team ça se passe super bien, je suis dans un appartement au sein de l’université avec trois nouveaux gymnastes comme moi et on s’entend super bien. Toute la team est super bienveillante avec moi en tant qu’étudiant international, ce qui est génial. Je ressens vraiment la cohésion de groupe et tout le monde se tire vers le haut. Tout le monde prend soin de l’autre, on est tous dans la même situation au final, on veut tous réussir à se dépasser pour faire gagner notre équipe. L’esprit d’équipe est très très fort aux USA. On fait d’ailleurs souvent des réunions avec tout le monde, les coaches, les gyms et le kiné pour savoir ce qu’on pourrait améliorer, et nous prévenir des prochaines échéances à venir. En ce moment on fait des demi parties et dans les prochaines semaines, on commencera déjà les complets pour ensuite élire les cinq meilleurs gymnastes qui passeront à chaque agrès. Bien sûr, ce n’est pas tous les mêmes gymnastes qui passeront à tous les agrès. Chacun a ses spécialités ce qui permet ensuite de former les cinq meilleures notes à chaque agrès. Le seul problème en ce moment c’est qu’il y a toujours mon poignet qui m’embête et je suis limité à trois agrès : sol, saut et barre fixe. J’en saurai plus les semaines qui suivent et quand je pourrai reprendre les trois autres. La saison NCAA débutera en janvier et je compte bien en être !

Tu as l’air épanoui ? Comment te sens-tu ?
Je suis super content de mon choix, même si ce n’est pas tous les jours facile, loin de là. Il y a même eu des moments de doute, de nostalgie et de tristesse mais je sais ce que je veux, et je suis prêt à affronter ce nouveau challenge. J’ai la chance d’avoir mes potes, ma famille et tous mes proches derrière moi qui me donnent de la force au quotidien. J’espère par la suite, pouvoir faire plus de vidéos et partager mon quotidien sur les réseaux sociaux, mais pour l’instant je n’ai pas trop le temps et je préfère me concentrer sur mes cours et mes entraînements. Mais patience ! Comme on dit ici : I’ll be back ! (Rires)

Propos recueillis par Charlotte Laroche 


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